Commerce physique : le plan d'attaque de Paypal Renier Lemmens, VP EMEA de Paypal

r.lemmens, vp emea de paypal
R.Lemmens, VP EMEA de Paypal © F.Fauconnier / JDN

JDN. Quel rythme de déploiement prévoyez-vous pour Paypal Wallet ?

Renier Lemmens. Aux Etats-Unis comme en Europe, nous avons déjà commencé à tester le service avec quelques marchands de toutes tailles. Nous allons lancer une première expérimentation à Paris d'ici la fin de l'année. 2012 verra un déploiement plus agressif.


Quelles sont vos ambitions pour Paypal Wallet ?

Pour l'instant elles sont modestes. Nous considérons le Wallet comme une cerise sur le gâteau que constitue notre activité actuelle. Mais nous nous attendons à ce qu'à partir de 2014, la cerise devienne plus grosse que le gâteau. Le paiement dans le monde physique deviendra notre cœur d'activité.


Les services proposés par Paypal Wallet seront-ils les mêmes dans tous les pays ?

Tous seront disponibles partout. Les concepts imaginés pour le marché américain s'adapteront très bien à l'Europe. Quant à certaines spécificités locales, comme le recours au virement ou à la facturation, nous permettons déjà aux consommateurs d'utiliser ces sources pour alimenter leur compte Paypal, ce qui restera donc le cas dans Paypal Wallet. Mais plus largement, c'est aussi ce que nous allons tester en 2012 : nous voulons voir ce qui a de la valeur pour les consommateurs de chaque pays.


Vos projets sont basés sur l'idée que le consommateur partagera beaucoup d'information sur lui-même. Pas de danger qu'il ne se montre plus réservé à l'avenir ?

Il y aura effectivement plusieurs segments de consommateurs, en fonction de ce qu'ils décideront de partager. La valeur qu'apportera Paypal différera en conséquence. Mais quoi que le consommateur fournisse comme information, nous avons de la valeur à apporter. En outre, les informations que l'on n'aime pas partager, comme son adresse ou ses infos bancaires, sont beaucoup moins pertinentes pour un marchand que votre pointure de chaussure ou votre plat préféré ! Nous pensons donc que les consommateurs accepteront de donner ce type d'informations. Ensuite, il nous appartient de sécuriser ces infos et de mériter leur confiance.


Dans vos démonstrations de Paypal Wallet, vous n'évoquez même pas le NFC. Pourquoi ?

Nous ne croyons pas à cette mode. Très franchement, payer en passant un téléphone mobile devant un terminal n'apporte rien à l'expérience d'achat en boutique, par rapport au paiement par carte bancaire. La vraie valeur, c'est tout ce que nous apportons en amont et en aval du paiement : la possibilité de choisir sa source de paiement, d'en changer après-coup, de personnaliser son shopping, de susciter des offres des marchands, etc.

Nous ne savons pas si le NFC va décoller. Nous regardons de très près au cas où. Mais nous ne voulons pas en être dépendants comme le sont les solutions concurrentes de la nôtre.


Est-ce la principale caractéristique qui distingue votre service des Wallet de Visa ou de Google ?

Nos concurrents se focalisent sur une partie très spécifique du paiement. Paypal se donne une vocation beaucoup plus large, en s'insérant avant et après la transaction elle-même. Au-delà de tous ces services, nous voulons couvrir l'ensemble de la population, pas uniquement la fraction qui détient un mobile équipé de la technologie NFC. Notre solution est conçue pour fonctionner sur tous les terminaux et tous les OS. Même quelqu'un qui n'a pas de mobile peut utiliser notre Wallet en payant avec sa carte de débit Paypal. Tout cela n'est d'ailleurs pas limité aux magasins physiques, mais concerne aussi les compagnies aériennes, les associations caritatives et j'en passe !


Paypal Wallet permet de changer de méthode de paiement jusqu'à 5 jours après l'achat. Comment cela fonctionne-t-il ?

Imaginez que vous achetez une télévision avec Paypal Wallet : vous choisissez laquelle des sources de financement de votre compte Paypal vous désirez utiliser, par exemple votre carte Amex. Mais quelques jours après cet achat, vous vous rendez compte que vous allez avoir besoin de votre compte Amex pour vous payer une croisière. Vous pouvez alors réattribuer le paiement de votre téléviseur à un autre compte. Quant au marchand, il est payé au moment de l'achat, cette modification a posteriori est transparente pour lui. Il n'est impliqué que dans certains cas, par exemple lorsque l'acheteur se rabat sur un paiement en trois fois, puisque nous lui demandons alors de participer. Enfin, avec certains marchands, ce délai de 5 jours est porté à 30.


En arrivant sur le paiement en boutique physique, vous allez considérablement augmenter le volume de transactions que vous traitez sur mobile. Quelles actions prenez-vous pour les sécuriser ?

Nous sommes la plus grande entreprise de paiement mobile : eBay et Paypal totaliseront 5 milliards de dollars de paiements mobiles cette année. Rien que lors du Cyber Monday, le 28 novembre, les transactions Paypal sur mobile ont progressé de 500 % par rapport à l'an dernier. Bref, la sécurisation des paiements est notre métier principal et nous prétendons être la solution de paiement la plus sûre. D'ailleurs, contrairement à certains très grands acteurs, nous n'avons jamais subi de faille de sécurité sur les données des acheteurs.

En outre, la nature même du canal mobile nous permet d'affiner encore cette sécurisation, en tirant profit de nouveaux paramètres au moment de déterminer le risque d'une transaction. Par exemple, chaque device et chaque carte SIM possède un numéro d'identifiant unique. Nous regardons aussi où le mobile est utilisé : si un même téléphone est à l'origine d'une transaction en France le matin et au Vietnam l'après-midi, cela nous met la puce à l'oreille... Or en la matière, l'acteur qui détient le plus de données est celui qui peut le plus affiner la sécurité. Enfin, le plus souvent, les problèmes de fraude se produisent chez le marchand. Or en utilisant Paypal, les informations de paiement ne sont pas partagées avec le marchand. Ce qui porte ce risque à zéro.


Renier Lemmens est vice-président EMEA et general manager de Paypal Europe. Titulaire d'un master en informatique de l'université technique de Delft et d'un MBA de l'Insead, Renier Lemmens a d'abord travaillé chez GE Capital Corporation, McKinsey & Company et Arthur D. Little, avant de devenir le directeur exécutif de la division "retail international et banque de détail" de Barclays. Plus récemment, il a occupé la fonction de directeur général de ZBG Group / Amodo Consumer Finance. Il vit aujourd'hui entre le Luxembourg et Londres.