L’entreprise 3.0 impose un « Reset » de la gestion de la relation client

Economie digitale oblige, l’entreprise 3.0 ne doit plus seulement attirer, acquérir et fidéliser les clients mais optimiser l’expérience qu’elle leur propose sur tous ses canaux et médias d’interactions, qu’ils soient directs et intermédiés, digitaux et physiques.

Une expérience qui se vit connectée via des objets toujours plus intelligents, mais aussi à plusieurs, de façon sociale, collaborative et mobile sans barrière de temps et d’espace.
Et face à des comportements hautement volatiles, cette expérience client, pour être engageante et plus seulement utilitaire, se doit d’être toute à la fois différenciée, contextualisée, personnalisée, et surtout non intrusive. Elle doit être omni-canal, c’est-à-dire dynamique, fluide et cohérente entre tous les points de contacts digitaux  et tous les points de contact physiques.
Et c’est bien là toute la complexité de l’équation digitale 3.0 que doit résoudre l’entreprise numérique et qui place son système d’information au centre de ses préoccupations.

La segmentation client, nouveau défi de l’entreprise 3.0

Avec chaque contact qui devient une expérience à part entière, il ne s’agit plus de chercher à vendre un produit mais de satisfaire d’abord à un besoin. En marketant son savoir-faire et son expertise plus que son offre et en interagissant régulièrement (via du crowdsourcing), et de façon subtile (via de l’in-bound marketing) ou ludique (via de la gamification) avec ses parties prenantes, l’entreprise peut faire évoluer les interactions en conversation. Ce lien se veut désormais plus intime et plus fréquent et son analyse doit se faire de façon réactive et prédictive et plus fiable et précise pour ne pas gérer d’insatisfaction ou de communication erronée. A défaut, l’entreprise risque de rater le primo-objectif qui reste de transformer tout visiteur en client et de fidéliser chaque client, à minima ceux qui présentent le plus d’attrait.
La conséquence directe est qu’il devient impératif de coller au comportement individuel, d’opérer un profilage en temps réel à un grain suffisamment fin pour adapter de façon optimale le scénario d’interaction proposé, d’anticiper les actions et de devancer les besoins de l’individu en relation avec l’entreprise, visiteur, prospect ou client. Tous les signaux captés, même les plus faibles, deviennent  importants.
Ainsi, on ne peut plus se contenter des traditionnelles visions à 360° (identité, catégorie socioprofessionnelle, lieu de résidence, données budgétaires, équipements produits/services, situation personnelle, patrimoniale, professionnelle, loisirs/centre d’intérêt, projets…) ni des analyses de risque (défaut de paiement, interdit bancaire, antécédents…) pour segmenter et scorer le client. Il faut passer d’une segmentation de masse à une micro-segmentation affinée en continu et basée sur une vision holistique, multicanal et sociales d’informations qui vont au-delà des données traditionnelles client.
Il faut qualifier son potentiel non seulement en termes d’opportunité business d’up-selling et de cross-selling mais aussi évaluer plus finement ce qui pilote sa logique d’achat. Il faut comprendre sa sphère d’influence (ceux qu’il influence et ceux qui l’influence), son leadership d’opinion, son aptitude à devenir ou non un ambassadeur de la marque. Il faut connaître son graphe relationnel, savoir avec qui et avec quoi il est connecté. Une évolution qui impose de redéfinir la valeur client. Une valeur client qui ne se situe plus seulement dans sa rentabilité vis-à-vis de l’entreprise mais dans sa valeur globale vis-à-vis de l’entreprise.

Gestion de l’information : comment exploiter les données client ?

Plus globalement, il faut croiser à la volée des données opérationnelles (data in use, data in motion) et historiques (data at rest) de toute nature : contextuelles, transactionnelles, conversationnelles, sociales, structurées et non-structurées, internes et externes. Des informations dont la variété, le volume et la vélocité explosent mais dont la valeur et la véracité sont incertaines. Le tout dans le respect de la législation sur l’information, des choix et préférences du client, des valeurs de l’entreprise et de l’image de marque qu’elle souhaite véhiculer. Il faut permettre au client d’accéder à l’ensemble des informations détenues par l’entreprise et l’autoriser à les modifier selon des processus qui en garantissent l’intégrité. Une tâche qui peut devenir ardue selon le niveau d’intégration de l’entreprise dont l’information client peut se retrouver distribuée entre de multiples acteurs en cascade : l’entreprise, ses distributeurs et ses fournisseurs. Il faut également permettre à l’ensemble des métiers de tirer parti de cette manne d’information opérationnelle et historique, la décloisonner entre les lignes métiers et offrir des capacités d’investigation à la demande, de puissants outils d’accès, de recherche, d’interrogation et de visualisation de ces Big Data.
Une gestion de l’information qui implique d’abord d’identifier avec certitude l’individu entrant en relation, à minima d’en cerner le profil au plus tôt dans l’interaction pour adapter dynamiquement l’expérience proposée : du simple push de contenu ciblé, à la conception dynamique d’une offre en passant par la modification de la logique d’interaction (informations, séquences des étapes…). Une exigence de reconnaissance qui ne va pas sans  poser de problème. D’une part parce que nous ne sommes pas toujours homogènes dans les informations que nous donnons, d’autre part parce que selon le canal et le média que nous employons, les éléments à disposition pour l’authentification et l’identification ne sont pas au même niveau. Il n’est donc pas toujours possible d’employer des algorithmes de rapprochement en logique booléenne (c’est avec certitude cette personne). Il faut recourir aux probabilités (il y a 50 % de chance que ce soit cette personne) voire à de la logique floue (il y a de bonne chance que ce soit cette personne).
Cela implique ensuite de disposer de la bonne information au bon moment et au juste niveau de qualité et d’actionnabilité vis-à-vis de l’individu qualifié. En particulier cela requiert de maîtriser et partager l’ensemble des flux conversationnels multi-canaux entrants et sortants. Il faut ensuite réduire l’espace-temps entre information et action, prendre les bonnes décisions dans le bon momentum et agir en conséquence, corrélativement sur la logique d’exécution de l’interaction. Une complexité qui pousse de plus en plus à l’automatisation de la relation client digitale via des robots-conseillers et autres assistants virtuels et au déploiement d’outils ACM (Advanced Case Management) pour orchestrer une expérience client qui devient non-linéaire, événementielle, interruptible, multi-acteurs et doit supporter de plus en plus de combinatoires.
Autant d’exigences qui changent tout ou presque en matière de système de gestion de la relation client et d’animation des forces et réseaux de ventes, dont le rôle de conseiller s’estompe et les modèles de rémunération évoluent face à des consomm’acteurs qui prennent le pouvoir et réclament du self-service et du self-care pour agir en tout autonomie.
Des exigences qui poussent à une mue profonde de la gestion de relation client telle que nous la connaissons et de facto des outils associés de CRM et par contagion des outils compagnons de gestion des relations publiques (défense de la marque), de marketing (promotion de la marque, des offres, génération d’opportunités), de force de vente (transformation des opportunités en acte d’achat) et d’éditique (communication multi et cross-média).

La gestion de la relation client passe du CRM au x-RM

La Gestion de la Relation Client (GRC) va au-delà du Customer-Relationship Management pour embrasser le Social-Relationship Management, le Collaborative-Relationship Management et l’Experience-Relationship Management.
Cette extension impose que les solutions CRM évoluent de système d’enregistrement et de support à l’automatisation des processus d’avant-vente, vente et après-vente (system of records) à système d’intelligence client et d’engagement (system of engagement). Elles doivent valoriser l’ensemble des données de connaissance clients à disposition de l’entreprise, permettre des analyses réactives, prédictives et cognitives de façon élastiques et à moindre coût. Elles doivent s’intégrer sans couture avec les solutions de marketing digital.
En résumé, « Entreprise 3.0 »  = « CRM 3.0 »  = « CRM à la puissance Big Data ».