Quelques pistes de travail pour une France numérique

La nomination d'Eric Besson comme Secrétaire d'Etat chargé de l'économie numérique traduit une réelle priorité gouvernementale. Voici quelques pistes de travail pour une France numérique "Web 2.0" qui s'inscrivent dans la logique du rapport "Hyper-République".

Avec plus de la moitié des Français connectés à Internet, en majorité haut débit, la France est rentrée dans une nouvelle ère. Aujourd'hui, la nomination d'Eric Besson comme Secrétaire d'Etat chargé de l'économie numérique traduit, une priorité gouvernementale forte et suscite beaucoup d'espoirs. D'autant plus que le secteur est ainsi placé directement auprès du Premier ministre, c'est-à-dire considéré de manière interministérielle et transversale.

Quelle pourrait être la politique du gouvernement pour développer encore davantage le numérique sous tous ses aspects et faire définitivement entrer la France dans l'économie et la société de l'information ? Voici une liste non exhaustive de pistes de travail :

1. Montrer l'exemple, par la généralisation de l'administration électronique dans l'ensemble de la sphère publique (Etat, collectivités locales, santé-social). Cette modernisation est par ailleurs la condition sine qua non du non renouvellement d'un fonctionnaire sur deux sans abaissement du niveau du service public.


2. Assurer un rôle de régulateur, en garantissant la libre concurrence entre les opérateurs. Dans le domaine des télécoms, cette régulation a permis le beau succès du haut débit en France, le moins cher d'Europe. Mais la concurrence loyale doit être défendue à tous les niveaux, y compris celui des logiciels grands publics (systèmes d'exploitation, bureautique...) et des commandes informatiques de l'Etat. La lutte contre les monopoles de fait et la mise en concurrence entre solutions informatiques propriétaires et Logiciels libres est une "ardente obligation". Bien mieux que des subventions directes à l'informatisation des ménages, elle permettrait de faire baisser les prix des équipements.


3. Garantir la confiance dans le numérique en protégeant les nouveaux consommateurs de l'Internet et des technologies confrontés à de nombreux pièges (publicités mensongères, services après ventes défectueux, escroqueries...), et garantir la protection des libertés personnelles, menacées par certains services de commerce électroniques ou certains "réseaux sociaux".

4. Viser la modernisation des petites structures de l'économie et de la société (PME, TPME, professions libérales, agricultures, petites associations, petites communes...). En effet, les grandes structures (grandes entreprises, grandes collectivités) ont déjà basculé dans l'ère numérique. En revanche, beaucoup des "petites" restent réticentes, mal équipées, mal formées. Elles sont en outre, chacune d'entre elles, très coûteuses en bureaucratie. Des incitations financières fortes à l'administration électronique pourraient concerner aussi bien les petites entreprises (crédits d'impôt) que les petites communes (augmentation de la DGF).

5. Développer et promouvoir le réseau des PME innovantes. Garantir l'accès des PME aux marchés publics de l'informatique, par un "Small Business Act" à la française. Favoriser une industrie française des Sociétés de Services en Logiciels Libres (SSLL). Faute d'un tel développement, il existe un réel danger que notre Internet haut débit ne soit une zone de consommation pour les produits technologiques américains...

6. Créer une "DATAR du numérique", regroupant les moyens éparpillés des différents services, structures, conseils comités chargés du numérique. Cette structure modeste, interministérielle, travaillant de manière transversale, aurait comme mission d'inciter la totalité des administrations à achever leur révolution numérique.

7. S'attaquer aux handicaps réels de la France, dans le domaine de la formation initiale et permanente (avec une pénurie d'informaticiens qualifiés) ou de la recherche (fondamentale ou appliquée). La mise en place de nouvelles filières de formation et l'amélioration des dispositifs actuels d'incitation à la recherche et à la création d'entreprises innovantes, réclamées de toute part, doivent être des priorités rapidement mises en oeuvre.

8. Cesser de parler de "retard français", en valorisant nos réels atouts dans le domaine des NTIC, notamment le haut débit, clé du développement et le dynamisme de certaines de nos entreprises "Web 2.0" (nouvelle génération de services sur le Net).

9. Défendre les intérêts Français et Européens dans le cadre de la gouvernance globale de la Société de l'information. Le poids excessif des Etats Unis dans la gouvernance de l'Internet, via l'ICANN (le "gouvernement" de l'Internet), doit être rééquilibré, autant que possible, par des négociations multilatérales menées avec le concours de l'ONU (Internet Gouvernance Forum) et par des choix stratégiques en faveur des objets communicants autres que l'ordinateur, nouveaux vecteurs de l'Internet de demain.


En résumé, le numérique en France demande moins à être aidé par l'Etat qu'à être défendu et libéré des obstacles placés sur sa route.

Lire le rapport Hyper-République sur le site de la Documentation française.