Publication du décret pour les lettres recommandées : une fausse bonne nouvelle

Le décret tant attendu sur les modalités de l’envoi d’une lettre recommandée électronique est paru le 2 février 2011. Mais les fournisseurs de recommandés "tout électroniques" devront encore attendre pour diffuser leurs offres.

Le courrier recommandé électronique a été introduit à l'article 1369-8 du code civil par l'ordonnance du 16 juin 2005, selon deux modalités :

-         la lettre recommandée électronique hybride. Le contenu de la lettre est imprimé par le tiers fournisseur du service, pour être acheminé par voie postale.

-         la lettre recommandée électronique de bout en bout, acheminée vers le destinataire par voie électronique.

 

Par deux fois l'article 1369-8 fait mention de la nécessité d'un décret. D'une part pour définir les modalités d'application du texte, et d'autre part pour fixer les conditions permettant de présumer la fiabilité du procédé électronique apposant la date d'expédition ou de réception.

 

Le courrier recommandé tout électronique ne peut pas se déployer de façon substantielle en l'absence de présomption sur la fiabilité de la date de réception
Le gros du marché des courriers recommandés électroniques se situe chez les entreprises, qui utilisent le recommandé par obligation légale dans des domaines variés où la date de réception fait courir des délais qui comportent des enjeux financiers importants. Ces grands utilisateurs ne prendront pas le risque d'abandonner le cachet-de-la-Poste-qui-fait-foi s'ils n'ont pas la certitude que la date de réception de leur courrier recommandé électronique ne peut pas être remis en cause par le destinataire. Cela ne sera pas le cas tant que cette date ne pourra pas bénéficier d'une présomption de fiabilité, raison pour laquelle le décret afférent était très attendu par la profession.

 

Une action pour rien devant le Conseil d'Etat
La société DOCUMENT CHANNEL avait saisi le Conseil d'Etat aux fins de faire constater la carence de l'Etat à édicter les textes d'application de l'article 1369-8 du Code Civil. Dans son arrêt du 10 octobre 2010, le Conseil d'Etat enjoignait en effet le Premier ministre «de prendre, dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision, le décret en Conseil d'Etat nécessaire à l'application de l'article 1369-8 du code civil ».

 

Le décret du 2 février dernier ne répond ni aux attentes du marché ni à l'injonction du Conseil d'Etat puisque son seul véritable apport est de pouvoir substituer à la Poste un autre prestataire agréé de services postaux. On notera d'ailleurs que la Poste n'avait pas attendu ce demi décret pour commercialiser son service de recommandé hybride.

 

Le marché du recommandé tout électronique devra quant à lui, encore une fois, attendre.