Comme "Kelkoo", le site "LeGuide.com" est lui aussi un site publicitaire
La "jurisprudence Kelkoo" vient de faire une nouvelle victime, avec la condamnation prononcée le 28 septembre 2011 par la Cour d'appel de Paris à l'encontre de la société LeGuide.com, qui édite à la fois le site Internet du même nom et le site Webmarchand.com.
A l'instar de Kelkoo, ces sites Internet se
présentent comme des comparateurs d'offres de prix proposés par des cybermarchands.
Or les prix comparés sont ceux des partenaires commerciaux de la société
éditrice de ces sites, qui est rémunérée en contrepartie de ce référencement
prioritaire. Il ne s'agit pas d'une comparaison de l'ensemble des offres
disponibles sur Internet. De la sorte, et en raison d'un potentiel risque de
tromperie du consommateur, l'objectivité du comparatif a été mise en cause
devant le juge.
Dans cette affaire, le grief avait été formulé par
deux sociétés, EtainPassion.com et Etains du Campanile, qui avaient conclu un
contrat de partenariat avec LeGuide.com pour faire apparaître leurs offres de
produits de manière prioritaire par rapport aux offres apparaissant en vertu
d'un référencement dit "naturel".
EtainPassion.com et Etains du Campanile s'étaient
toutefois estimées lésées au cours de l'exécution de ce contrat et avaient
sollicité l'indemnisation de leur préjudice sur divers fondements. De l'arrêt
du 28 septembre 2011, nous ne retiendrons que l'aspect relatif au caractère
potentiellement trompeur du comparateur de prix, comme dans l'affaire Kelkoo.
Les deux litiges présentent d'ailleurs un lien étroit, puisque LeGuide.com
avait demandé à la Cour de surseoir à statuer dans l'attente de la décision de
la Cour de cassation dans l'affaire Kelkoo, finalement intervenue le 29
novembre 2011 (voir à ce sujet la chronique sur Le Journal du Net: http://www.journaldunet.com/ebusiness/expert/50877/kelkoo-est-un-site-publicitaire-et-doit-s-afficher-comme-tel.shtml),
ce que la Cour d'appel de Paris a toutefois refusé.
Selon l'arrêt, le service fourni par LeGuide.com,
consistant à référencer, contre rémunération, les offres de ses partenaires
commerciaux de manière prioritaire, avant les offres d'autres commerçants,
consiste bien en une activité de prestataire de service commercial et
publicitaire. Ceci n'a rien de répréhensible en soi. Cependant, la loi pour la
confiance dans l'économie numérique ("LCEN") du 21 juin 2004 impose
aux annonceurs d'informer clairement les internautes du caractère publicitaire
de tel ou tel contenu.
La Cour a en effet rappelé que "l'article 20 de la loi du 21 juin 2004 (…) dispose que toute
publicité, sous quelque forme que ce
soit, accessible par un service en ligne, doit pouvoir être clairement
identifiée comme telle et doit rendre clairement identifiable la personne
physique ou morale pour le compte de laquelle elle est réalisée".
Cependant, jusqu'alors, le site LeGuide.com
n'identifiait pas clairement son caractère publicitaire : pour comprendre le
fonctionnement du site et la distinction entre le référencement payant et le
référencement naturel, il revenait à l'internaute de cliquer sur les liens "En savoir plus" et "En savoir plus sur les résultats".
Ce même reproche était également formulé naguère à l'encontre de Kelkoo.
Et dans les deux affaires, les juges ont considéré
que l'effort demandé à l'internaute d'avoir à cliquer sur un lien pour "en savoir plus" n'était pas
compatible avec les exigences de la LCEN, en particulier celle relative à une
identification "claire" du
caractère publicitaire d'un contenu sur Internet. Selon la Cour, l'absence
d'une telle identification, immédiatement accessible, pouvait altérer de
manière substantielle le comportement économique du consommateur, puisque ce
dernier était attiré en priorité vers les offres issues du référencement payant
(et pour cause, c'était le but recherché). Il s'agissait, par conséquence,
d'une pratique trompeuse selon l'article L. 121-1 du Code de la consommation et
d'une pratique déloyale selon l'article L. 120-1 du même Code.
Que vont devenir les sites comparateurs de prix ? A priori, ils poursuivront leurs
activités (d'autant que la condamnation prononcée dans l'affaire LeGuide.com, à
hauteur de 15.000 euros, n'est pas très élevée). En revanche, on constate
l'apparition de mentions telles que "résultats
provenant de marchands référencés à titre onéreux", lors d'une
recherche sur le site. Est-ce suffisamment clair pour le consommateur ?
L'avenir le dira.