Le "make or buy", question clé pour l'IT

Le "make or buy" est un vrai choix stratégique pour les DSI et notamment dans les télécoms où cette alternative est une question de fond.

La prime au premier entrant n’est plus ce qu’elle était ! Traditionnellement, le premier entrant bénéficiait d’un double avantage commercial, d’une part, et en termes de supports notamment pour les systèmes d’information déployés en premier, d’autre part. Cependant, un véritable changement de paradigme se produit avec  le dilemme du « make or buy ». Dans le cas du « make », l’opérateur développe lui-même l’ensemble de ses solution technologies (SI, plateforme, application, etc.).
Dans le cas du « buy » il achète les solutions à un tiers qui en fait bénéficier bien sur d’autres acteurs. Bref, faut-il faire soi-même ou plutôt acheter une solution prête à l’emploi ayant déjà fait ses  preuves ?  Si le dilemme n’est pas nouveau, il prend,  à présent, une dimension jamais vue.

En effet, les systèmes d’information s’inscrivent à présent plus que jamais dans la réflexion du make or buy. De plus en plus souples, de plus en plus industrialisées, les différentes briques SI se prêtent de plus en plus à cette approche. Le développement d’outils et de technologies permettant cette souplesse, au premier rang desquels les infrastructures cloud, facilitent l’appropriation de systèmes achetés « sur étagère ». Dans le cadre des  opérateurs, la question requiert une analyse stratégique pour les directeurs des systèmes d’informations en particulier pour les opérateurs télécoms anciens qui disposent souvent d’un SI historique, « legacy », souvent peu compatible avec des modifications rapides. Or ce SI historique est au cœur de l’activité économique et ne peut donc être changé facilement.
L’analyse doit intégrer certes le comparatif budgétaire entre le « make » et le « buy » mais surtout elle doit comprendre les impacts en termes d’activité. D’un côté, l’achat d’une solution ayant fait ses preuves peut s’inscrire dans une péréquation  économique pertinente où le gain de temps voire l’agilité sera un élément structurant d’appréciation. Si la question concerne le système d’information lié au client (en boutique, le « CRM », etc.) le fait de bénéficier d’une solution ayant fait ses preuves dans des contextes similaires de marché est un facteur de succès.
Quand le système d’information constitue « l’usine de production » (c’est le cas dans le secteur télécom notamment) la question sera plus sensible que dans les domaine où le SI est un juste un support de gestion (RH, comptabilité, gestion, etc.). De l’autre côté, il faut expliquer aux décisionnaires (et ensuite à leur équipe) qu’une solution achetée sera peut-être, à budget sous contrôle, moins adaptable et donc qu’il faudra faire des arbitrages. Cette question est clé car elle peut être génératrice à termes d’incompréhension et de regrets sur tel ou tel choix.  Faire le choix du « buy » peut être aussi celui d’un renoncement sur certaines applications / usages mais compenser par l’effet gain de temps.
La question du « make or buy » posera celle aussi des équipes en internes et d’un éventuel transfert de compétence qu’il faudra intégrer. Toute chose égale par ailleurs, la possibilité de pouvoir se poser la question est aujourd’hui une opportunité. Dans le cadre des pays émergents, c’est un moyen réel et factuel de pouvoir rattraper un retard en termes technologiques et de bénéficier plus rapidement des bons systèmes d’information sans passer par les retards, dérapages budgétaires qu’ont connu certains opérateurs occidentaux dès la fin des années 90. C’est un opportunité réelle pour les acteurs des pays émergents de bénéficier d’un effet d’accélérateur qui sera particulièrement vrai à double titre.
D’une part, car ils n’ont généralement pas à s’encombrer des sujets de type « legacy » qui eux peuvent être un handicap pour certains opérateurs historiques. D’autre part, sur des sujets nouveaux type big data ou digitaux, le fait de partir de rien est un vrai atout pour faire un choix pertinent entre le « make » et le « buy ».
La question devient de plus en plus clé pour les opérateurs télécoms car, indépendamment des enjeux concurrentiels classiques (nouveaux entrants, MVNO, baisse de l’ARPU, déploiement LTE), le « make or buy » est aussi un élément de décision face aux concurrents autre que les opérateurs télécoms classiques. Les OTT et autres acteurs du web disposent d’une agilité, d’une rapidité de changement, exécution et lancement de nouveaux produits qui constituent un vrai défi concurrentiel pour les opérateurs télécoms. La capacité de mouvement et de projection devient un différenciateur.
Dans ce genre de situation, à côté d’un « legacy » historique, le choix de nouvelles briques peut tout à fait se regarder au regard de la souplesse et de la vitesse de déploiement.
Le changement de paradigme induit est donc aussi d’ordre culturel pour les opérateurs établis et leur équipe technique. Pour pousser le trait, le SI n’est plus un élément différenciant en soit sauf quand il garantit le triptyque « qualité/budget /délai » bref assurer le bon fonctionnement des services télécoms (et leur facturation) dans un budget global tenu, le tout rapidement et avec souplesse. Pour reprendre une expression d‘économistes, ce triptyque est dans les faits considéré dans les télécoms, depuis des années, comme un « triangle d’incompatibilité » (une des trois dimensions doit être sacrifiée). 
Cette posture n’est plus tenable de nos jours et c’est un des éléments concurrentiel clé du marché.