Nouvelles extensions Internet : un 2e tour dès 2016 ?
Depuis 2012, plus de 1000 nouvelles extensions se préparent à ouvrir, dont 400 sont déjà lancées. Et la révolution ne va pas s'arrêter là. L'ICANN, régulateur du nommage sur Internet, prépare déjà une suite dont cet organisme a grand besoin. Décodage.
Les premiers arrivés ne
seront donc pas les seuls servis ! Les early adopters ayant demandé une
extension comme le .GURU, le .NINJA ou le .BIO ont certes pris un train
d'avance. Mais la suite est déjà en préparation. "Compte tenu du travail
qu'il reste à faire sur le premier tour, l'ouverture d'un 2e appel à
candidatures ne devrait pouvoir se faire avant 2016, au plus tôt," indique
l'ICANN dans un rapport interne daté du 22 septembre.
Petit rappel. Le 13 juin
2012, après avoir ouvert une première fenêtre de tir de quelques semaines,
l'organisme annonçait avoir reçu 1 930 demandes pour de nouvelles extensions. Environ
1400 d'entre elles peuvent réellement espérer aboutir.
De nouvelles opportunités… commerciales
Sur ces candidatures
reçues au premier tour, 911 venaient d'Amérique du Nord et 675 d'Europe. Les
américains étaient en pointe. Ils ont vite compris l'intérêt d'obtenir les
droits exclusifs sur les nouveaux panneaux des autoroutes de l'information, le
principe des nouvelles extensions étant en effet de guider l'Internaute vers le
contenu qu'il souhaite avec beaucoup plus de précision que les actuels .COM ou
.ORG.
Des habitués de
l'industrie du nommage se sont jetés sur ces nouvelles opportunités, certains allant
jusqu'à lever USD 200 millions, ou à s'introduire en bourse, pour en profiter.
Mais à la surprise générale, les géants traditionnels de l'Internet que sont Amazon
et Google s'y sont aussi mis, déposant à eux deux environ 170 dossiers.
Sachant qu'à chaque
dossier, l'ICANN prélevait une "taxe de gestion" de USD 185 000, on
comprend vite que les nouvelles extensions sont autant une histoire de gros
sous qu'une ambition (réelle et sincère) d'offrir de nouvelles possibilités aux
utilisateurs d'Internet.
Pourtant, dans le
Landernau icannien, personne ne croit plausible de lancer une 2e tour de
sitôt. Il faut évaluer l'impact économique, technique et financière des
premières nouvelles extensions, celles de 2012. Puis il faudra peut-être
retravailler les règles fixées pour 2012.
"Tout cela prendra
beaucoup de temps," entend-on dans les couloirs de l'ICANN. "Pas de
2e tour avant 2017 ou 2018 au plus tôt." Même le rapport interne ne change
pas les avis. L'ICANN est notoirement incapable de tenir des délais cours. Le
premier tour des nouvelles extensions, celui de 2012, n'avait-il pas été initialement
annoncé en 2008 ? Ainsi personne ne serait étonné si le 2e tour prenait un
retard similaire.
Mais ce serait compter
sans la situation financière de l'ICANN, aujourd'hui très différente…
Tendances onusiennes et dépassements budgétaires
Le budget de l'ICANN pour
l'année fiscale 2008 était de USD 39,9 millions. Pour 2015, ce chiffre passe àUSD 169,9 millions ! En 6 ans, les besoins financiers de l'ICANN ont explosé.
Pourquoi ? Les nouvelles
extensions n'y sont finalement pour pas grand chose. Depuis juin 2012, l'ICANN
a doublé le nombre de ses salariés, passant de 143 à environ 330. Mais seul 10%
de cette masse salariale a été embauchée pour s'occuper des dossiers nouvelles
extensions.
Que font les autres ? Ils
travaillent sur les grands dossiers politiques. Printemps arabe, affaire
Snowden, tensions politiques et commerciales attisées par l'essor d'Internet
dont la gestion de la racine… entre 2008 et aujourd'hui, la gouvernance de
l'Internet est passé d'un sujet pour geeks à un enjeu économique majeur.
Problème, la direction de l'ICANN avait tablé sur les nouvelles extensions pour financer ces autres opérations. Le budget prévisionnel 2015 représente une augmentation de 31,7 % sur les USD 129 millions de celui de l'année précédente ! En établissant ce budget 2015, l'ICANN a compté sur le fait qu'environ 400 nouvelles extensions seraient actives à fin 2014. Aucun problème, ce chiffre étant déjà dépassé.
En revanche, l'ICANN avait aussi tablé sur le fait que 33 millions de noms de domaine serait enregistrés dans les nouvelles extensions au 31 juin 2015. Comme c'est principalement sur ces enregistrements que l'ICANN se finance, cette prévision est la plus importe. Où en est-on aujourd'hui ? Un peu plus de 2 millions d'enregistrements "seulement".
Alors pouvoir "rentrer" de nouvelles taxes d'enregistrement de dossiers ne serait pas pour déplaire à un organisme qui n'a peut-être plus tout à fait les moyens de ses ambitions. Lancé un 2e tour dès 2016, comme le suggère le rapport internet de l'ICANN, n'est peut-être pas qu'une parole en l'air…