Dis moi quelle règle d’attribution tu as, et je te dirai qui tu es

La règle d’attribution est officiellement choisie en fonction des objectifs de l’entreprise… dans les faits, le choix prend en compte souvent d’autres contraintes, plus… personnelles. Description synthétique, au risque d'être caricaturale, de quelques règles d'attribution et de leurs risques.

Pas de déduplication ? Abandonniste !

Oui, c’est vrai que décider d’une règle d’attribution n’est pas facile, mais ça a quand même le grand mérite de comprendre ce qu’on fait, et de permettre qu'on l’améliore.

Néanmoins, certains ont préféré ne pas dédupliquer (et pas forcément des petits acteurs, Cdiscount par exemple ne déduplique pas). Impacts pour leurs partenaires : les coûts d’acquisition maximum acceptés sont très bas (normal, il faut bien que cette non-déduplication soit absorbée quelque part). Le risque avec une telle règle, c’est que les partenaires sont encouragés à poser des cookies partout, pour pouvoir s’attribuer un maximum de ventes. Et qui dit cookies partout, dit une visibilité dans des environnements pas forcément hyper qualis, un harcèlement des internautes, une récompense à la quantité des créas affichées plutôt qu’à la qualité du ciblage par internaute… cela revient de fait à promouvoir des techniques dépassées de mass-media et à ne pas encourager les nouvelles opportunités du marketing hyper personnalisé, possible notamment via le RTB.


Dernier clic ? Chenille… et papillon en devenir :)

Le dernier clic est la règle usuelle sur le marché, c’est la plus facile à mettre en place techniquement et à faire accepter, en interne comme aux partenaires. Si vous en êtes là, c’est que :

  • soit vous êtes encore en réflexion avant de basculer sur une règle plus pertinente pour vous, et dans ce cas vous êtes une chenille qui se prépare à devenir un papillon…
  • soit vous n’avez pas les ressources en interne (technique, analytics, marketing, temps…) pour avancer. Il est peut-être temps de renforcer votre organisation, surtout sur un sujet autant apporteur de marge incrémentale ! Ce n'est pas inaccessible : faites-vous accompagner si besoin au début sur les profils, la méthodo, les quick wins... Vous aurez aussi la capacité de devenir un beau papillon qui a les moyens d'aller là où il veut aller, et de ne plus être une chenille qui rampe avec difficulté et que les oiseaux picorent.

1er clic ? Acquéreur court-termiste

Celui qui veut se développer, acquérir de nouveaux visiteurs ou de nouveaux clients, va logiquement se concentrer sur les leviers qui initient de nouveaux contacts. C’est bien, mais attention, car ça ne peut pas suffire : la finalité économique est rarement dans la visite de nouveaux internautes ou de nouveaux clients, il faut que ceux-là transforment aussi… et il se passe souvent tellement de jours et/ou tellement de clics entre le 1er clic et la commande, qu'une attribution de cette commande au 1er clic n'est souvent pas légitime.

Utile pour justifier des budgets “branding” (display en fait, avec même parfois du post view…), mais cette règle n’est adaptée qu'à certaines étapes de développement d’une entreprise et sur certains secteurs, pour certaines campagnes.

C'est d'ailleurs une vision court-termiste parce qu'elle minore complètement le travail de réassurance et de transformation qu'ont pu faire d'autres leviers après le 1er clic et sans lesquels la commande n'aurait peut-être pas eu lieu. A force de ne valoriser que les 1er clics, les leviers transformateurs vont moins travailler : vous aurez à terme beaucoup de nouveaux visiteurs, mais peu de commandes.

Dépriorisation de tous les leviers gratuits : hum… abusé ?

Pourquoi faire ce choix ? Vos leviers gratuits ne contribuent-ils donc pas ? Si bien sur, mais comment leur donner une valeur si vous ne les valorisez pas dans vos règles d’attribution ? Pire : cela entraine une perturbation complète de la prise en compte des contributions des autres leviers. Bah oui : comment expliquer par exemple qu’une fleur pousse si vous ne prenez pas en compte le soleil qui l'a éclairée tous les jours ? Vous remarquez qu'elle pousse les jours de pluie : vous en concluez qu'elle pousse donc grâce à la pluie ? Essayez de mettre une fleur dans une cave et de l'arroser pour voir :) On n'y pense plus parce que le soleil est là tout le temps, mais il est bien là, et sans lui la fleur ne pourrait pas pousser (c'était la minute bucolique de cette chronique :)). Dès que vous retirez un paramètre, vous simplifiez le problème bien sur, mais la réponse devient fausse. Attention à ne pas minorer la contribution de votre newsletter.

Ce type de règle se retrouve en général dans des équipes marketing qui ont besoin de justifier leurs dépenses. Mais qu'elles se rassurent : certains emarchands ont plus de 50%, jusqu’à parfois 80% de leur business généré par des leviers gratuits (newsletter et référencement naturel essentiellement) : ce n’est pas si grave, c’est que la marque est forte. Dans ce cas, les investissements marketing sont justifiés parce que le trafic repose en grande partie sur des visiteurs qui connaissent déjà la marque : il faut donc aller chercher de nouveaux visiteurs, et transformer ce flot de visiteurs venus par les leviers gratuits. Peut-être aussi modifier les segmentations anciens / nouveaux clients, car un ancien client est parfois plus difficile à réactiver qu'un nouveau client... Dans tous les cas, le travail doit se faire en symbiose entre leviers gratuits et leviers payants, avec ce que chacun peut apporter, et donc en ayant une visibilité claire des apports de chacun.

Conclusion

Allez, il y a plein d’autres règles d'attribution utilisées, ce sera peut-être l’objet d’autres chroniques.

A retenir : une règle, quelle qu'elle soit, peut être le meilleur choix pour certains acteurs à certains moments de leur développement. Il faut avancer prudemment sur ce sujet complexe aux impacts puissants.

Soyez donc vigilants avec la règle que vous choisissez, sa cohérence avec vos objectifs, sa légitimité par rapport aux limites que vous connaissez des supports que vous utilisez, les déséquilibres qu’elle peut éventuellement créer entre vos partenaires, et votre capacité à en changer... car une règle d’attribution ne peut pas être figée dans le temps : vos campagnes évoluent, le marché aussi… alors dans un tel contexte mouvant, il faut s’adapter !