La ville de demain sera collaborative, participative et inclusive

Pour que la smart city décolle, les services développés doivent inclure un maximum de citoyen. Les entreprises du secteur doivent faire un effort pour intégrer les citoyens en difficulté numérique.

La vague collaborative déferle sur les villes, chamboule nos usages et fait naître de nombreux espoirs. Elle crée aussi certaines peurs car ses contours sont aussi vagues que les chamboulements économiques qu'elle crée sont importants, car sa réglementation, qui se cherche, laisse encore la place à certains abus. Il faut investiguer sur ces nouveaux modèles et éviter les amalgames. Passer au crible leurs valeurs morales et d’usage, leurs engagements en matière de confidentialité, de protection des données, leurs actions à vocation sociétales et leur impact environnemental. Collecticity (plateforme de crowdfunding territorial) ou Koolicar (mobilité partagée basée sur l’usage et non la propriété) n’ont rien à voir avec Uber. Avec ces nouvelles plateformes, le collaboratif crée du lien social dans la vraie vie, impacte positivement notre environnement, génère de nouvelles formes de dialogue citoyen, permet d’arrondir ses fins de mois et répond à de nombreux enjeux de notre société en pleine mutation politique, écologique, économique et sociale.Ce collaboratif là, qui prend appui sur la puissance des plateformes numériques pour nous offrir de nouvelles opportunités de partage à l'échelle locale, est décidément d’avenir. À nous de l’envisager avec pragmatisme, méthode, humanisme ! Et de le considérer pour ce qu’il est : un socle.

Le collaboratif nécessite un projet et une vision à l’échelle du territoire
J’en suis convaincu, initier une démarche collaborative sur son territoire ne peut se limiter à l’utilisation d’une plateforme collaborative. Pour prendre toute sa puissance, elle doit s’inscrire dans un projet de territoire, être adaptée aux problématiques locales, puis portée par une vision mobilisatrice et enfin, être pilotée en collaboration avec tous les acteurs de la solidarité dudit territoire. Le plan d’action idéal fera collaborer les acteurs historiques ou de terrain et les nouveaux acteurs du numérique vers un objectif commun. La commune Bretonne de Langouët est en train de réussir ce pari en affichant une vision claire et partagée avec ses habitants autour de 4 piliers : écologique, collaboratif, solidaire, économie circulaire. Cette collectivité agit concrètement avec ses habitants en ce sens : cantine 100% bio, projets d’aménagement urbains écologiques, animation d’un pôle économie sociale et solidaire, production d’énergie solaire verte, adoption d’une plateforme collaborative d’entraide et de partage. Ce faisant elle déploie une démarche complète, crée des synergies et des ponts entre les initiatives. Bravo !
L’inclusion numérique comme condition sine qua non
En matière de smart city, les initiatives foisonnent, nos lieux de vie, nos villes, nos territoires deviennent plus intelligents. Nous, habitants de ces villes, allons pouvoir accéder à de nombreuses données en temps réel (qualité de l’air, énergie, transports…) et aux outils nécessaires pour les comprendre et ajuster nos usages. Mais sans mutualisation des ressources, sans organisation des solidarités et sans pilotage d’une démarche vertueuse et participative, l’équation est incomplète.Pour réussir cette vision dans laquelle le collaboratif devient un mode de vie partagé et vertueux, il me semble nécessaire de ne pas négliger l’exclusion numérique qui frappe de plein fouet les plus faibles d’entre nous. Entendons le cri d’alerte porté par Emmaüs Connect : 13% des Français seraient en grande difficulté numérique et 40% des publics en difficulté sociale seraient aussi en difficulté numérique. À l’heure de la dématérialisation, de cette montée en puissance du collaboratif qui invente de nouvelles solidarités, il est de notre devoir de nous mobiliser pour inclure le plus grand nombre. Le rôle des pouvoirs publics est crucial. Les plateformes collaboratives doivent prendre le sujet à bras le corps en continuant leur travail pédagogique et en travaillant à des sites plus accessibles, plus simples d’utilisation.

Par ailleurs, même si l’idéologie propriétaire, à savoir l’affirmation de la nécessité de propriété (comme exclusive, privative, entière), atteint ses limites pour les raisons que nous avons évoqué précédemment, partager requiert inévitablement une possession initiale par l’individu. Les plus démunis seraient-ils exclus par définition de ce nouveau paradigme collaboratif ? Il semble alors évident que la ville de demain ne sera vraiment smart que si le collaboratif ne reste pas cantonné aux échanges financiers. Une partie de cette manne collaborative doit rester portée par le coeur, par les bonnes volontés, et par l’envie d’aider son prochain, vraies sources de mieux vivre ensemble. Ce schéma reste à construire territoire après territoire.