Parcours omnicanal : itinéraire d’un client perdu

Contrairement aux vœux pieux des marques, il arrive encore que le parcours d’achat d’un client se heurte à quelques obstacles. Passer d’un canal à un autre sans perdre de vue la marque avec laquelle nous souhaitons interagir n’est pas toujours une évidence. Tribulations de consommateurs perdus…

Enrichir l’expérience client, être au plus proche de ses désirs et de ses envies, trouver l’instant idéal, pour lui proposer le bon produit, au moment le plus juste. Bref, faire mouche à tous les coups. Tel est le Graal activement recherché par l’ensemble des marques. Pour y arriver, lesdites marques ont compris, depuis bien longtemps que sans parcours omnicanal et sans couture, point de salut. Pour faire simple : offrir au client une expérience jalonnée de paillettes, c’est apprendre à le connaitre parfaitement en commençant déjà par réussir à le suivre, sans perdre sa trace, du début à la fin de son parcours, de l’inspiration à l’achat. Et le parcours en question est loin d’être rectiligne : multi-écrans, réseaux sociaux, recommandations, boutiques physiques... Du moment où il décide d’acheter jusqu’à l’acte d’achat, le client est devenu le Shiva du point de contact !


Seulement voilà, la promesse du parcours sans couture est-elle toujours au rendez-vous ?


Prendre le client par la main

Rappelons quelques fondamentaux, histoire de poser le sujet avec un minimum de sens pratique. « La notion de parcours client sans couture fait référence au fait que l’entreprise soit capable d’assurer une expérience fluide et sans friction à l’égard des consommateurs ayant un parcours cross-canal. Le concept de parcours client sans couture sous-entend que l’entreprise ait su répondre aux nombreux défis posés par le fait qu’un client utilise différents canaux de contacts, aussi bien physiques que digitaux lors de son parcours d’achat » selon definitions-marketing.com. En d’autres termes, le client doit, par exemple, pouvoir débuter son parcours d’achat en s’appuyant sur des recommandations Facebook, aller faire des repérages sur Internet, et décider d’aller en boutique avant de passer en caisse… Le tout sans qu’à aucun moment le contact n’ait été rompu entre lui, et la marque. Prendre le client par la main : pur fantasme marketing ou possible réalité ?


Nombre de marques et enseignes ont investi beaucoup, ces dernières années, dans la mise en place de cette fameuse fluidité qui doit permettre d’enrichir davantage ce parcours client. Munies de précieuses data savamment raffinées et exploitées, adossées à des technologies pointues, elles simplifient l'achat, suggèrent des recommandations personnalisées ou se dotent de « vendeurs augmentés » … Sauf que, dans les faits, certains loupent parfois la marche et le client, livré à lui-même, s’en va voir ailleurs !


Vous avez dit fluidité ?

Prenons 2 exemples. Pas plus tard qu’il y a quelques jours, une amie me rapporte une aventure assez cocasse. Elle décide de se rendre dans une enseigne de produits de beauté. Pas franchement le petit commerce de quartier, non. Plutôt le grand barnum, ultra porté sur les nouvelles technologies, la digitalisation du parcours d’achat et le commerce cross-canal. Sa mission : s’offrir ce superbe rouge à lèvres d’une marque très connue et a priori, inratable. Raté. Dans la boutique, la vendeuse lui explique que ledit rouge à lèvres ne se fait plus. Serait-elle devenue totalement has been ? Déçue mais déterminée, elle rentre chez elle afin de dégoter l’objet de ses désirs sur Internet. Surprise : non seulement le rouge à lèvres existe encore, mais elle peut le commander sur la boutique en ligne de l’enseigne dont elle vient tout juste de sortir. Et pourtant, elle n’en fera rien car ce très attentionné Google le lui propose également sur le site d'un concurrent, avec une promotion de -30 % ! 


Le lendemain, un autre ami m’explique s’être rendu dans la boutique d’une grande enseigne pour y acheter un équipement pour la maison. L’équipement en question est affiché ce jour-là avec une offre de moins 10 %. Estimant qu’il est dans un jour de chance, il déchante pourtant assez rapidement lorsque le vendeur lui explique que pour bénéficier de cette ristourne, il doit acheter la carte de fidélité de l’enseigne. Après un calcul rapide, il s’aperçoit que la promotion compense l’achat de la carte. L’opération, certes, est nulle, mais mon ami sera tout de même l’heureux propriétaire d’une carte de fidélité, avec son lot de services et d’un appareil d’électroménager. Deuxième déconvenue lors du passage en caisse : l’hôtesse lui annonce qu’en fait, les 10 % de remise sont accordés sous forme de bon cadeau utilisable 15 jours plus tard ! Et lorsque, 15 jours après, mon ami voudra faire son achat sur le site e-commerce de l’enseigne, le fameux bon cadeau sera refusé car utilisable uniquement en boutique physique. Moralité, mon ami a acheté son appareil au prix fort, s’est en plus acquitté d’une carte de fidélité, et doit retourner en boutique, s’il ne veut pas perdre son bon cadeau. Bref, agacé et perdu face à tous ces irritants qui ont jonché son parcours, mon ami, ce client, est surtout définitivement perdu pour la marque !


Devant ces exemples, loin d’être des cas isolés, nous voilà quelque peu perplexes : Comment se fait-il que la boutique physique et la boutique en ligne d’une même enseigne ne disposent pas des mêmes informations ? Pourquoi la vendeuse, pourtant équipée d’une tablette, n’a-t-elle pas vérifié la disponibilité du rouge à lèvres ? Pourquoi la cliente n'a-t-elle pas été accueillie avec davantage de considération ? Pourquoi les informations concernant les conditions promotionnelles ne sont-elles pas plus transparentes ? Comment se fait-il qu’un bon d’achat valable en boutique ne puisse pas l’être sur Internet alors qu’il s’agit de la même enseigne ?...


Désiloté ? Cross-canal ? Sans couture ? Vous êtes sûrs ? Bref, il y a de quoi en perdre son latin… et son parcours d’achat. Quelques trous dans la raquette subsistent encore. Rien d’irrémédiable, bien sûr. Mais tant que le client ne sera pas totalement tenu par la main afin de ne pas se prendre les pieds dans ce genre d’obstacle, il sera difficile de lui promettre, la main sur le cœur, que l’hyper personnalisation et l’expérience client enrichie et sans couture, c’est une réalité…