En matière d’énergie, un consom’acteur est un consommateur connecté

La domotique est un atout de taille, désormais accessible au plus grand nombre, pour réussir la transition énergétique.

La transition énergétique est l'affaire de tous. Pour remporter ce défi, chaque personne, chaque consommateur peut contribuer, dès aujourd'hui, à réaliser des économies d'énergie. La domotique, c'est à dire le mariage de l'informatique et des télécommunications au service de la maison, est un atout de taille, désormais accessible au plus grand nombre. Pourtant, si le marché des objets connectés est en forte croissance, il ne suffira pas de cribler sa maison de ces outils pour infléchir sa facture d’électricité. C’est un peu plus compliqué que cela.28 milliards. C’est, selon le cabinet d’études IDC le nombre d’objets connectés dans le monde à l’horizon 2020. Une omniprésence dont l’une des vertus sera de fournir aux consommateurs les moyens de devenir véritablement acteurs de la transition énergétique. Ces objets intelligents permettent, en plus d’une multitude de services, au foyer de reprendre le contrôle sur sa consommation d'électricité, d’eau, ou de chauffage/air-conditionné, afin d'augmenter la performance énergétique d'un logement ; avec, à la clé, de substantielles économies d'argent. Couplés à un compteur communicant (lui-même une forme d’objet connecté), ils transmettent par ailleurs des données précieuses sur nos habitudes de consommation. Ces données et leur gestion par l'intelligence artificielle permettront aux opérateurs de mieux gérer le marché de l'offre et de la demande de l'énergie, et ainsi de proposer le meilleur prix au consommateur ; tout en préservant son niveau de confort.
Les objets connectés au service des économies d'énergie
Concrètement, quels types d’objets peuvent nous aider à traquer nos dépenses énergétiques fantômes, c’est-à-dire superflues ? Pour s’en faire une idée, il suffit de jeter un œil à l’éventail des produits présentés au Consumer Electronics Show (CES), organisé chaque début d’année à Las Vegas. Parmi ces concentrés de technologie, le thermostat intelligent Ween a retenu l'attention. Développé par une entreprise française, Ween utilise la géolocalisation des smartphones des membres de la famille afin de détecter leur présence dans une pièce et de réguler la température en conséquence. L'entreprise promet jusqu'à 25% d'économies sur le chauffage domestique.Filiale d'Engie, Homni a présenté à Las Vegas un autre thermostat connecté, appelé Homnistat, qui permet à son utilisateur de gérer sa consommation de gaz à l'euro près : en effet, celui-ci peut programmer son thermostat en fonction de la somme mensuelle qu'il ne souhaite pas dépasser. Inversement, il lui est aussi possible d'afficher sa dépense en temps réel, tout en réglant lui-même la température de sa chaudière. Une innovation qui n'a rien d'un gadget : augmenter ou diminuer la température ambiante d'un degré pendant plusieurs heures peut faire réaliser une économie de cinq euros sur sa facture mensuelle de gaz.
Plusieurs modèles de prises et multiprises connectées permettent également de piloter les appareils électriques à distance, en wifi, par Internet ou SMS et, in fine, de réduire sa consommation d'énergie. Sans parler des douches connectées, comme celle développé par Hydrao, dont le pommeau de douche change de couleur selon la consommation d'eau : moins de 10 litres, le voyant est vert ; entre 30 et 50 litres, il vire au rouge ; au-delà de 50 litres, le voyant se met à clignoter. Même s'il est ludique, le pommeau de douche connecté n'a rien de futile : réduire sa consommation à 50 litres par douche permet à une famille de quatre personnes d'économiser 45 000 litres d'eau par an et plus de 300 euros.

Tout comme nous le faisons actuellement à Singapour ou d’en d’autres pays du monde, Enedis (ex-ERDF) a également lancé son propre compteur communiquant. Baptisé Linky, il remplacera les compteurs traditionnels et équipera, d'ici 2020, quelque 35 millions de foyers français. Un boîtier qui permettra aux consommateurs de suivre leur consommation d'électricité en temps réel. Ils pourront identifier les appareils électriques et les comportements qui font gonfler leur facture, mais aussi comparer leur consommation avec celle des mois précédents – ou avec celle de foyer ayant le même profil. Enfin et surtout, le compteur communiquant permettra à l'opérateur, en analysant les données transmises, de mieux adapter la production d'électricité en fonction de la demande.
L’émergence du consom’acteur
Reste que ces objets ont un prix, et que les consommateurs n’y trouveront leur intérêt que si l’investissement consenti est compensé par les économies réalisées. C’est là que les opérateurs énergéticiens ont un rôle fondamental à jouer de catalyseur de la chaîne de la valeur, afin de créer les économies d’échelles nécessaires à rendre le service économique pour le consommateur.D’ailleurs, certains acteurs l’ont compris et investissent dans des plateformes digitales, comme Singapore Power ou bien Veolia à travers sa filiale Homefriend. Au-delà de la dimension purement économique, c’est bien de la transition énergétique dont il s’agit. En s’invitant dans nos foyers, et en nous épaulant dans notre gestion de l’énergie, l’intelligence artificielle peut nous permettre d’économiser quelques dizaines d’euros par mois, certes, mais elle fait aussi bien plus que cela : elle entraîne une réduction proportionnelle de notre empreinte carbone, autrement dit, de la pression que nous exerçons sur notre environnement. A une condition : que nous nous emparions de cette technologie, en nous équipant, bien sûr, mais aussi en l’utilisant. Ça parait évident, ça nécessite pourtant un bouleversement profond de nos habitudes de consommation.

Ainsi, le compteur Linky, qui équipera tous les foyers d’ici quelques années, ne sera pleinement utile que si chacun prend la mesure des possibilités qu’il offre. Il ne fera pas d’économies à notre place, il nous incitera à en faire. C’est sur la compréhension de cette nuance par le consommateur, devenu consom’acteur, que repose le succès de la transition énergétique à la française, mais aussi sans doute dans le monde entier. Les objets connectés sont de formidables outils, pourvu que nous sachions nous en servir. Pourvu que nous sortions de la passivité qui nous caractérisait jusqu’à présent dans notre rapport à l’énergie – bien malin qui pourrait expliquer à quels usages correspondent exactement les sommes présentes sa facture d’électricité – pour devenir actifs, et acteurs. Comment ? En consultant régulièrement l’évolution de notre consommation, en modérant notre recours aux appareils les plus énergivores, en favorisant les heures creuses, en consommant, enfin, que ce dont nous avons réellement besoin.

Que chacun se rassure, en rendant notre courbe de charge bien plus lisible et en identifiant et régulant les appareils les plus énergivores, les objets connectés devraient grandement nous faciliter la tâche.