2015 : le démantèlement de Google ? Vers un démantèlement de Google ?

La Commission européenne peut-elle aller au-delà d'une sanction financière et procéder à un démantèlement de Google ? Non, répond Sylvain Justier, qui souligne que le droit communautaire ne prévoit pas ce type de sanction. Un éventuel démantèlement du groupe serait davantage à envisager de l'autre côté de l'Atlantique, aux Etats-Unis, où la moindre initiative du moteur (rachat, nouveau service, etc.) est scrutée avec attention par les autorités de la concurrence. 

Aux Etats-Unis, la justice du Texas a justement ouvert en juillet dernier une enquête sur les pratiques commerciales de Google et leur lien éventuel avec le référencement naturel ou payant. Google y est en effet accusé par trois entreprises, le britannique Foundem (déjà à l'origine de l'ouverture de l'enquête de la Commission européenne), et les entreprises américaines myTriggers (moteur de shopping) et SourceTool (plate-forme de recherche de fournisseurs), de manipuler ses résultats. Les trois entreprises se plaignent de voir leurs sites arriver trop bas dans le moteur de recherche, ce qui aurait une incidence sur leur activité. 

Les Etats-Unis disposent d'une politique antitrust, qui prévoit des peines pénales pouvant dépasser les 10 millions de dollars et jusqu'à 10 ans de prison pour ses dirigeants. Les peines de prison restent cependant moins fréquentes que des amendes : sur plus de 1 500 affaires antitrust étudiées entre 1955 et 1993*, des peines de prison avaient été requises dans environ un quart des cas. La moyenne des amendes infligées sur cette période s'élève à environ 700 millions de dollars de 2010. Une bagatelle à côté des quelques 33 milliards de dollars de trésorerie dont dispose le groupe. 

Surtout, la condamnation d'une entreprise par un tribunal fédéral pour abus de position dominante peut conduire outre-Atlantique à son démantèlement. L'opérateur télécom américain AT&T, qui fut démantelé en 1982 au terme de six années de procédure est le cas le plus emblématique de ce que pourrait risquer Google en cas de condamnation aux Etats-Unis. A l'époque, l'opérateur Bell System, devenu AT&T, avait dû se séparer d'une partie de ses activités régionales, divisées en sept entreprises différentes.


* J. C. Gallo, K. G. Dau-Schmidt, J. L. Craycraft, C. J. Parker, "Criminal penalties under the Sherman Act", Research in Law and Economics, Volume 16, 1994, pp 25-71.