Pierre Omidyar : l'ingénieur à l'origine d'eBay, féru de journalisme

Pierre Omidyar : l'ingénieur à l'origine d'eBay, féru de journalisme Depuis Hawaï, le fondateur d'eBay se consacre à son fonds d'investissement caritatif. En 2014, il a aussi lancé First Look Media, groupe de presse en ligne controversé.

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Pierre Omidyar est le fondateur d'eBay. © S. de P. Omidyar

Pierre Omidyar naît le 21 juin 1967, à Paris, de parents iraniens. En 1973, la famille s'envole pour Washington D.C, dans le Maryland, aux Etats-Unis. Son père, docteur en physique, enseigne à l'université Johns Hopkins. Sa mère enseigne le persan à Georgetown. Ses parents se séparent, et Pierre Omidyar passe deux ans à Hawaï. Il se passionne rapidement pour l'informatique : en 1981, il crée son premier programme d'informatique, qui permet de cataloguer les livres de la bibliothèque scolaire. Naturellement, il consacre ses études à l'informatique. Il sort diplômé de l'université de Tufts et rejoint directement les rangs de l'entreprise Claris, filiale d'Apple, en 1988. En 1991, il fonde avec trois amis une société informatique qui se consacre notamment à la vente en ligne, Ink Development (rebaptisée eShop). Il y travaille en tant qu'ingénieur jusqu'en 1994. Il alors est engagé par General Magic, une société à l'origine d'une plateforme de communication. En 1996, eShop est rachetée par Microsoft.

Il crée eBay pour élargir la collection de distributeurs Pez de sa femme

A cette période, Pierre rencontre Pamela, qui a grandi à Hawaï. Elle deviendra sa femme. Elle collectionne les distributeurs de bonbons Pez. Pour l'aider à élargir sa collection, Pierre Omidyar crée un espace sur son site personnel qui lui permet d'en échanger avec des internautes. Chacun peut enchérir sur un produit proposé. Le site est un succès et, lorsque la commission qu'il prélève sur chaque vente finit par dépasser son salaire chez General Magic, Pierre Omidyar démissionne pour se consacrer pleinement à cette nouvelle activité.

En 1997, il lance AuctionWeb, qui sera rebaptisé eBay deux ans plus tard -une allusion à la baie de San Francisco, où l'entrepreneur s'est installé. Le premier article acheté : un pointeur laser défectueux, par un collectionneur d'objets cassés. Dès 1997, eBay compte un million de membres. La société entre en bourse l'année suivante : les parts de Pierre Omidyar valent trois milliards de dollars.

En 2003, Pierre Omidyar lance, avec sa femme, le fonds d'investissement Omidyar Network, destiné à financer des entreprises dans les pays en voie de développement. En 2005, il permet la création de la Microfinance Fund Omidyar-Tufts à l'université de Tufts grâce à un don de 100 millions de dollars.

En tout, lui et sa femme auraient donné plus d'un milliard de dollars à des œuvres caritatives. En 2014, le couple se classe ainsi au douzième rang des philanthropes américains, en faisant don de 180 millions de dollars. Parmi les principaux bénéficiaires : Democracy Fund, HopeLab, Humanity United, Omidyar Network et Ulupono Initiative (Lire : "Les milliardaires de la Silicon Valley, plus grands philanthropes américains", du 17/02/15).

Il craint les catastrophes naturelles

En 2006, Pierre Omidyar part s'installer à Hawaï avec sa femme et ses trois enfants dans une maison de 5 800 m², face à la mer. Il a beaucoup investi sur l'archipel, dans des énergies renouvelables ou encore dans l'agriculture responsable. Selon Honolulu Advertiser, Pierre Omidyar envisagerait sérieusement l'hypothèse de grandes catastrophes naturelles, d'où ses dons dédiés aux ressources alimentaires, mais aussi à l'achat de stocks de nourriture stockés près de chez lui et d'un ranch dans le Montana, où il pourrait se retirer avec sa famille.

Discret, Pierre Omidyar donne peu d'interviews. Pourtant, petit à petit, il laisse entrevoir une passion pour les médias. En 2010, il lance à Honolulu un site d'informations locales focalisé sur l'investigation, Civil Beat. Il en est le directeur de la publication. En octobre 2013, il révèle avoir un temps envisagé de racheter le Washington Post –finalement acquis par Jeff Bezos pour 250 millions de dollars- avant de décider de lancer son propre média indépendant et participatif ex-nihilo. Il recrute notamment le journaliste américain Glenn Greenwald, à l'origine des révélations sur les écoutes de la NSA pour le Guardian et réputé pour ses tribunes réclamant plus de démocratie et de transparence. Pierre Omidyar annonce qu'il va injecter 250 millions de dollars dans le pure-player.

First Look Media et controverses

En 2014, Pierre Omidyar crée le groupe de presse en ligne First look Media, qui se veut "adversorial journalism", un journalisme de contre-pouvoir. Il y injecte 50 millions de dollars pour démarrer et annonce vouloir y consacrer 250 millions. Le groupe est basé à New York mais possède des bureaux à Washington et San Francisco. Pierre Omidyar lance First Look Media avec Glenn Greenwald, un ancien du Guardian, Laura Poitras et Jeremy Scahill. Le groupe est par exemple à l'origine de The Intercept, magazine dédié aux révélations d'Edward Snowden. Plusieurs journalistes quittent cependant rapidement le navire pour cause de dissensions avec la direction et Omidyar. Après Matt Taibbi et John Cook, le journaliste d'investigation Ken Silverstein quitte ainsi en février 2015 le groupe en le qualifiant de "blague". Il dit avoir été "engagé sous de faux prétextes" : "On nous a dit qu'on nous donnerait les moyens d'être indépendant, de faire du bon journalisme, mais en réalité on est bloqués à chaque étape par l'incompétence et la mauvaise foi du management".

En février 2015, Forbes estime la fortune de Pierre Omidyar à 7,9 milliards de dollars (contre 8,5 milliards de dollars en septembre 2013) : il est la 162ème personne la plus riche de la planète. Pierre Omidyar possède encore une dizaine de pourcents du capital d'eBay. Il en préside toujours le conseil d'administration.