Patrick Bertrand (CNNum) "Nous souhaitons organiser un grenelle du numérique en juin"

Même si l'avenir du Conseil national du numérique n'est pas assuré, son nouveau président détaille sa feuille de route pour les 12 prochains mois.

Quel est votre bilan un an après la création du Conseil national du numérique ?

J'estime que le CNNum a bien montré son rôle tant sur sa réactivité suite aux saisines du gouvernement que quant à sa capacité à s'emparer de sujets d'actualité et de fond, qu'il s'agisse par exemple de la question du statut du JEI ou de la fiscalité du numérique. Tout comme Gilles Babinet, mon objectif sera d'accentuer le rôle du numérique dans la croissance de l'état à travers des séries de recommandations.

La création du CNNum a été initiée par Nicolas Sarkozy par décret présidentiel et a été critiquée à gauche. Avez-vous vocation à survivre suite à l'élection de François Hollande ?

"Nous attendons des directives de la part du futur gouvernement"

Nous attendons des directives de la part du futur gouvernement. Nous estimons que Fleur Pellerin (conseillère économie numérique de François Hollande durant la campagne et pressentie pour un secrétariat d'Etat, ndlr) a réussi à établir un lien avec les acteurs du numérique. Et je sais qu'elle a compris que le CNNum est utile au gouvernement en sa qualité de trait d'union entre l'écosystème et l'appareil politique. Il pourra y avoir des réajustements puisqu'en période de campagne électorale Fleur Pellerin indiquait qu'elle souhaitait que le CNNum soit systématiquement consulté sur les projets de lois le concernant. De telles prérogatives nécessiteraient toutefois des ajustements de moyens pour le CNNum.

Le financement du numérique semble être l'une de vos principale priorité. Pourquoi ?

Nous travaillons sur de nouveaux sujets, notamment sur le financement de l'économie numérique. L'impact de Solvency 2, de Bâle II et III, ainsi que de la possible disparition du dispositif FCPI inquiète les entrepreneurs. Il faut donc stabiliser ce contexte économique et réglementaire au plus vite, voire même sanctuariser les dispositifs fiscaux pour laisser les jeunes sociétés croître dans des conditions stables. Il y a par ailleurs peu de marchés financiers pour les PME et il est certainement temps de réfléchir à l'ensemble de la chaîne du capital risque.

Quelles sont vos recommandations ?

"il y a un travail urgent à mettre en œuvre quant à l'accessibilité des fonds du FSN et du FNA"

Beaucoup d'argent a été levée à l'occasion du grand emprunt mais il y a un travail urgent à mettre en œuvre quant à l'accessibilité des fonds du FSN, du FNA et même quant au rôle d'Oséo, que ce soit pour les intermédiaires ou pour les entrepreneurs. Un guichet unique relève du rêve mais il faut faire ce qui est nécessaire pour y tendre. Enfin le rabot sur la loi TEPA pose la question de la rupture de la chaîne de financement. Il faut donc retrouver des dispositifs permettant aux personnes physiques de financer les start-up.

Quels sont les autres chantiers et pistes de réflexion pour les six prochains mois ?

Nous souhaitons approfondir les réflexions sur la protection de l'enfance en ligne et parallèlement sur l'e-éducation, qui concerne à la fois l'éducation à l'utilisation d'Internet et le développement d'outils numérique. Nous allons également cartographier les besoins métiers dans le numérique et travailler avec le gouvernement, les écoles et universités sur le sujet de l'emploi dans le numérique.

Comment va s'organiser la gouvernance du numérique en France ? Quel sera votre rôle ?

"Nous souhaitons réunir un grenelle du numérique sous le thème "jeunesse et croissance"

Encore une fois nous avons trop peu de visibilité tant que le gouvernement n'est pas encore nommé. Un ministre du numérique serait formidable, mais le plus important est de pousser des postes de représentants du numérique dans chaque ministère, surtout qu'ils ont déjà des personnes compétentes en la matière. Nous souhaitons également réunir un grenelle du numérique au mois de juin pour faire écho au programme de François Hollande sur le thème "jeunesse et croissance". Nous profiterons également des prochains mois pour nous déplacer en région et rencontrer davantage d'universités, de pôles de compétitivité, de start-up et de fonds régionaux.

Le CNNum doit continuer à être clairement identifiable et renforcer ses recommandations au côté d'autres organisations, quelles que soient leurs formes juridique. Dans un an nous devons être définitivement une figure incontournable sur l'ensemble des sujets du numérique...

Titulaire d'une licence de droit et diplômé de l'IEP de Paris, Patrick Bertrand débute sa carrière en 1977 comme attaché de direction pour ensuite être Fondé de Pouvoirs au Crédit Chimique. Il devient par la suite directeur financier d'Eurafrep en 1983 avant de rejoindre Cegid en 1988. Il est directeur général du groupe depuis 2002.