La protection de la vie privée, un concept en voie de disparition selon Vinton Cerf

La protection de la vie privée, un concept en voie de disparition selon Vinton Cerf L'un des pères fondateurs d'Internet, aujourd'hui chief evangelist chez Google, affirme que le concept est très récent et voué à disparaître si les conventions sociales n'évoluent pas.

Vinton Cerf, co-inventeur du protocole TCP/IP sur lequel repose Internet, reconverti en chief evangelist de Google depuis 2005, vient de faire une sortie remarquée concernant la protection de la vie privée ("privacy"), qui serait un concept assez récent risquant fort de ne pas être viable très longtemps.

"En réalité, la protection de la vie privée est peut-être une anomalie", a-t-il lancé lors d'une séance de questions-réponses sur un événement organisé par la FTC. Selon lui, elle n'était même pas garantie il y a seulement quelques dizaines d'années, lorsque tout le monde, dans une ville de 3000 personnes, savait très bien ce que faisaient les autres habitants. "C'est la révolution industrielle et la concentration des populations dans les villes qui ont mené à l'idée d'anonymat"... avant que les nouvelles technologies plus intrusives encore ne conduisent à celle de protection de vie privée.

Vinton Cerf affirme donc que la protection de la vie privée n'est pas un élément inhérent à notre société qu'auraient mis à mal les nouvelles technologies, mais justement une création de la technologie. Et constate : "il nous sera de plus en plus difficile de protéger notre vie privée".

Une remarque qui pourrait s'interpréter au regard de la surveillance pratiquée par la NSA mais s'applique en fait surtout à l'articulation entre vie privée et réseaux sociaux. "Notre comportement social est très dommageable à la protection de notre vie privée", explique-t-il, citant l'exemple d'une action que son auteur aurait préféré garder secrète et peut aujourd'hui retrouver exposée en arrière-plan d'une photo partagée en ligne. "La technologie que nous utilisons aujourd'hui a dépassé de très loin notre intellect social. [...] Il nous faut bâtir des conventions sociales plus respectueuses de la vie privée des gens." Car de plus en plus souvent, "des gens se retrouveront embarrassés et d'autres finiront en prison" suite à ces indiscrétions, volontaires ou non. Mais cela prendra du temps.