Thierry Philippet (Planet Media) "En supprimant les floors, nous avons doublé les revenus du header bidding"

Le directeur du programmatique de Planet Media, éditeur des sites Planet.fr, Medisite.fr et E-sante.fr, détaille sa stratégie en matière de header bidding.

JDN. Arrivé à la tête de l'activité programmatique de Planet Media en mars 2019, l'une de vos premières décisions a été d'enlever les floors qui s'appliquaient à votre inventaire. Pourquoi ?

Thierry Philippet est directeur du programmatique chez Planet Media. © S. de P. Planet Media

Thierry Philippet. Nous avions effectivement établi des floors sur la majorité de notre inventaire. Mais nous avions le sentiment que ces prix planchers, en dessous desquels il n'était pas possible d'acheter chez nous, nous coupait d'une partie de la demande. Nous les avons donc enlevés pour laisser la compétition algorithmique décider de la juste valeur de notre inventaire.

Les floors ont longtemps été utilisés dans une logique de protection de valeur, à une époque où on opposait ventes en gré à gré et ventes en open auction. Définir un prix plancher permettait à un éditeur de s'assurer que les ventes programmatiques ne viendraient pas cannibaliser les ventes en gré à gré. En clair, pour ne pas qu'un acheteur, qui découvre qu'il peut acheter à 2 euros votre inventaire en open auction, décide d'arrêter de l'acheter en gré à gré à 10 euros. Mais tout ça n'a plus vraiment car avec le header bidding, le gré à gré et l'open auction peuvent être mis en compétition.

Comment avez-vous procédé ?

Dans les faits, on ne peut pas complètement supprimer un floor… On les a donc abaissés de 1 euro à une quinzaine de centimes d'euros. Puis nous avons analysé les conséquences de cette décision sur notre taux de remplissage, notre CPM et notre chiffre d'affaires mensuel. Nous étions plutôt sereins, ayant confiance en la qualité de notre inventaire. Le groupe Planet Media attire une audience plutôt senior qui prend le temps de consulter ses pages, essentiellement sur desktop, et clique beaucoup plus sur les publicités que la moyenne.

Quels ont été les résultats ?

Cela nous a permis de multiplier par deux les revenus réalisés chaque mois grâce au header bidding. C'est loin d'être anodin puisqu'il contribue à 40% de nos revenus programmatiques. Et c'est la preuve qu'en assumant de laisser la main aux machines, on est capable de créer de la valeur. Il faut tout de même préciser que ce n'est pas sans danger sur des périodes un peu plus creuses en termes d'émulation. C'est pour ça que nous ne voulons pas faire du zéro floor un dogme. Nous préférons adapter notre stratégie selon les périodes de l'année, selon le volume d'inventaire, lorsqu'il y a une actualité forte, et selon les opérations spéciales ou campagnes premium que nous diffusons. Nous pouvons donc être amenés à remettre en place cette logique de floor. Nous faisons tout cela manuellement pour l'instant mais notre ambition est de développer un algorithme qui nous permettra de définir des adaptive floors en fonction des facteurs que j'ai évoqués.

La promesse du header bidding est de mettre tout le monde en compétition au sein d'une même enchère. Ce n'est pas encore votre cas puisque Smart, votre stack techno, peut décider de surenchérir sur le CPM que vous avez obtenu en header bidding. De même, vous pouvez être amené à faire de la vente en cascade auprès de partenaires, lorsque Smart ou le header bidding n'ont pas trouvé preneur…

C'est vrai… En tant que média pure-player, on vise bien évidemment une mise en compétition parfaite. Ce n'est malheureusement pas toujours possible. Il suffit de regarder l'outil de header bidding de Google, EBDA, qui n'est pas compatible avec prebid.js. Il y a donc deux compétitions en parallèle. C'est un peu pareil avec Smart, auquel nous allons envoyer l'enchère obtenu via header bidding, pour qu'il décide s'il matche ou pas. Ce n'est pas une mauvaise chose je pense car ce serait très compliqué de mettre l'ensemble de nos partenaires (ils sont une vingtaine) dans notre wrapper prebid.js, en client-side. Cela créerait évidemment de la latence… Tous ne pourraient pas répondre dans le laps de temps imparti (le time out, ndlr). Nous préférons donc limiter prebid.js aux partenaires qui ont le plus de valeur et solliciter les autres en cascade. Nous avons également adopté le wrapper d'Amazon, TAM, pour tester certains partenaires en server-side. Cela nous permet de voir s'ils apportent de l'incrément, sans nuire à la latence.

Thierry Philippet est directeur du programmatique chez Planet Media, éditeur des sites Planet.fr, Medisite.fr et E-sante.fr, Avant cela, il était directeur adops au sein du groupe Les Echos - Parisien durant trois ans. Il a également été responsable des opérations au sein de la régie Caradisiac Publicité.