Christophe Castets (Météo France Régie) "Nous ne voulons pas intégrer une place de marché privée"

Météo France lance son propre ad-exchange. Le dirigeant de la régie explique pourquoi il n'a pas voulu rejoindre La Place Media ou Audience Square.

JDN. En quoi Météo France est-il un acteur atypique du paysage digital français ?

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Christophe Castets, Vice-président Météo France Régie. © Météo France Régie

Christophe Castets, Météo France Régie. D'abord, je tiens à préciser que nous sommes aujourd'hui un acteur majeur de l'Internet français au même titre que des groupes tels que le Monde ou le Figaro aux côtés desquels nous apparaissons chaque mois dans le classement des 50 premiers groupes en France en termes d'audiences (en 34e position au mois de juillet avec près de 10,2 millions de VU, ndlr).

Nous nous différencions toutefois de la majorité de nos concurrents par la très forte saisonnalité qui caractérise notre audience. En automne et en hiver, le mauvais temps va booster le trafic sur notre site. En revanche, l'arrivée d'un été indien à cette période de l'année peut le dégrader significativement. Par ailleurs, nous observons également une dépendance selon l'activité des gens. Au printemps et en été, nos utilisateurs consulte notre site en fonction de leurs loisirs. Le mauvais temps à cette période affecte un peu notre audience mais celle-ci reste importante quoi qu'il arrive.

Comment se structure votre offre publicitaire ?

Nous procédons à de la vente directe avec des contrats cadres passés avec les agences auxquelles nous donnons la priorité. Mais nous faisons également, depuis plus de 4 ans déjà, du yield management grâce à un ERP qui nous permet de savoir en temps réel combien d'inventaire il nous reste pour le commercialiser via de la vente "au CPM low-cost", avec un ordre de priorité dépendant des offres de chacun. Nous diffusons dans ce cadre les publicités de Criteo ou Mythings.

Par ailleurs, la data nous permet notamment de proposer de la publicité conditionnée par le temps qu'il fait, en interprétant en amont les prévisions météorologiques. De telle sorte que nous sommes capables de diffuser une publicité, sur notre site ou via de l'extension d'audience, pour un anti-moustique lorsque l'on atteint un certain seuil de chaleur et d'humidité. Si les conditions sont réunies, on diffuse la publicité, ce qui présuppose que l'on sache également géolocaliser l'adresse IP de l'internaute. C'est pourquoi nous avons développé notre propre technologie via la reconnaissance des codes Insee. Nous obtenons un fort taux de réussite, de l'ordre de 87%.

Tout cela laisse penser que le lancement de votre ad-exchange n'est qu'un aboutissement logique ce votre stratégie...

Tout à fait. Nous suivons ce qui se passe sur le secteur des ad-exchanges depuis un petit moment. Tout s'est concrétisé avec le lancement d'un appel d'offre fin 2011 concernant un ad-server doublé d'un SSP, en vue de continuer dans la veine du "yield management". Notre choix s'est porté sur Adtech qui, couplé avec l'offre data de nugg.ad, nous a permis d'automatiser aussi bien l'achat d'espace que l'apport de data.

Car c'est l'une de nos autres priorités : apprendre à qualifier notre inventaire et le vendre le mieux possible. Une fois cette courbe d'apprentissage achevée, nous espérons savoir quels sont les emplacements qui intéressent le plus, qui et à quel instant. Le cœur de ce dispositif doit être alimenté par la data sur les comportements de navigation. Un exemple ? Le parisien qui regarde le temps à Biarritz pourra intéresser une marque comme IDTGV. Alors que celui qui consultera le temps à Val Thorens sera répertorié comme un intentionniste ski et un prospect intéressant pour les hôteliers locaux. Nos annonceurs proviennent en général des secteurs du tourisme et du voyage et sont très friands de ce genre d'informations.

C'est ce que vous permet votre partenariat avec nugg.ad ?

Nugg.ad nous permet de nous constituer une base de données nourrie par les informations comportementales "site centric". Cela me permet de qualifier l'audience de notre site à partir d'un mix de données provenant d'un panel de répondants à un questionnaire diffusé sur nos pages et des cookies posés. Cette qualification de notre audience doit faciliter la création de jumeaux statistiques à destination des annonceurs. Nous gardons ainsi la main mise sur l'exploitation de nos données.

Pourquoi ne pas avoir rejoint La Place Media ou Audience Square ?

La raison est d'abord économique. Si nous payons les frais d'utilisation du SSP, nous récupérons la marge que la Place Media ou Audience Square nous aurait ponctionnée or je pense que notre audience est suffisamment importante pour que nous nous passions d'eux. D'autant que notre marque aurait été dissoute puisque les annonceurs ne savent pas en général pas à quel site ils achètent de l'espace. Vendre de cette manière, en blind, même au sein d'un panel de marques premiums c'est pour moi risquer de tirer la valeur de son inventaire vers le bas.

Météo France Régie est intégrée au groupe depuis 2008. La structure officiait jusque-là en tant que régie externe, présidée depuis 1998 par Christophe Castets.Ce diplômé de l'Instititut d'études de relations internationales a notamment fondé Axidium Espace, un ad-network et d'HighNetwork, service d'optimisation de revenus.