Cyril Zimmermann (Hi Media) "Nos 30 milliards d'impressions pub passeront en real time bidding d'ici fin mars"

Si 2011 a été morose pour la publicité en ligne, la vente d'inventaires en temps réel devrait permettre de renouer avec la croissance. Mais pas n'importe comment, explique le président du groupe Hi-Media.

2011 a été une année plutôt morose en termes d'investissements publicitaires, quel regard portez-vous sur l'année écoulée ?

Cyril Zimmermann. L'année 2011 a, en fait, été segmentée en deux périodes : une première partie durant laquelle les investissements publicitaires ont connu une croissance soutenue et une deuxième, à partir de juillet, au cours de laquelle on a pu observer un net ralentissement voire même parfois un arrêt. C'est particulièrement vrai pour la France et le sud de l'Europe qui ont été les régions les plus affectées, preuve qu'il existe bien un lien entre le contexte économique et les investissements publicitaires consentis.

"Le marché de la publicité à la performance est porteur d'espoirs"

En conséquence, le volet "publicité" d'Hi-Media a été un peu malmené en 2011, avec un chiffre d'affaires de 105 millions d'euros, en baisse de 2% (contre une hausse de 4% du chiffre d'affaires global sur cette même période, ndlr). En revanche, le marché de la publicité à la performance, sur lequel nous nous sommes positionnés dans le courant de l'année, est lui porteur d'espoirs.

Justement, on considère que le real time bidding (RTB) représente aujourd'hui à peine 4% du marché du display en France. Peut-on affirmer qu'il puisse, à terme, être un levier de croissance ?

4% des investissements réalisés via des ventes d'espaces publicitaires automatisées : cela reste un résultat remarquable pour un secteur qui était encore inconnu il y a quelques mois. Et cela ne devrait pas s'arrêter, les prévisions établissant la part de marché du RTB à 20% des investissements display d'ici un à deux ans et 40% dans cinq ans. Bien sûr, il faudra réaliser entre temps un véritable travail d'éducation des annonceurs et des éditeurs pour qu'ils réussissent à appréhender au mieux ces outils technologiques.

"La rapidité des enchères et la transparence des outils de mesures vont rapidement faire progresser le RTB"

Le lancement de notre propre ad exchange courant septembre 2011, en partenariat avec Appnexus, un des leaders américains du real time bidding, va dans ce sens : permettre aux annonceurs ou aux agences d'achat media d'enchérir directement sur nos espaces publicitaires. Les résultats sont pour l'instant timides, avec des annonceurs qui dépensent entre 10 000 et 20 000 euros par campagne pour 6 milliards d'impressions par mois, mais je pense que la rapidité des mécanismes d'enchères et la transparence des outils de mesure de performance que ce dispositif permet vont très rapidement le populariser. D'ailleurs, nous prévoyons de l'étendre à l'ensemble de notre inventaire publicitaire d'ici fin mars, soit 30 milliards d'impressions par mois.

Pensez-vous qu'être présent sur l'ensemble de la chaîne de valeur, comme le sont Google et Criteo, est la solution pour devenir incontournable dans l'écosystème des ad exchanges ?

Les ad exchanges de Google, Hi-Media et MSN sont, à mes yeux, les seuls significatifs en Europe. Criteo a réussi à se positionner comme intermédiaire entre les activités de trading desk et les plateformes d'ad exchange, en exploitant intelligemment les données fournies par les annonceurs et les éditeurs. Mais l'entreprise n'a pas atteint la taille critique suffisante en termes d'inventaire publicitaire et n'est donc pas à l'abri d'une autonomie grandissante des annonceurs et éditeurs dans la gestion des outils technologiques... Auquel cas sa valeur ajoutée deviendrait moins évidente.

Quels sont les objectifs d'Hi-Media pour l'année 2012 ?

Nous voulons continuer à promouvoir le real time bidding et faire partie des deux ou trois acteurs qui atteindront cette fameuse taille critique. Pour cela, nous comptons nous appuyer sur notre réseau de sites que nous gérons pour 80% d'entre eux en régie exclusive. Cela nous permet de garder toute latitude dans notre offre publicitaire, en combinant des formats standards et des contenus plus originaux selon nos besoins.

"Le RTB va obliger les structures à repenser leur organisation"

Surtout, le real time bidding s'apparente pour le moment à une bulle dans laquelle beaucoup de monde veut être présent, sans pour autant s'interroger sur ce qu'elle va changer en termes d'organisation. En cela, on peut faire une comparaison avec les métiers de la banque pour lesquels, on a pu le voir, tous les métiers support, du back office au middle office, doivent jouer un rôle important. Depuis la création de campagnes créatives jusqu'à l'analyse des mesures de performance de ces campagnes, c'est toute une chaîne de l'organisation qui doit être structurée et optimisée, chose que nous nous efforçons de mettre en place chez Hi-Media.

Et concernant votre activité de paiement en ligne ?

Pour le moment, entre 85% et 90% du chiffre d'affaires réalisé dans le paiement en ligne provient des jeux-vidéos. Nous voulons désormais rapprocher nos activités d'édition, de régie et de solution de paiement en ligne, en misant sur la montée en puissance des formats de publication freemium dans le secteur de l'information. L'entrée au capital de "La Tribune" et les partenariats signés avec "Le Parisien" et "L'Equipe", qui ont recours à notre solution de paiement pour leurs contenus premiums, s'inscrivent dans cette logique.

Cyril Zimmermann est le président d'Hi-Media, groupe qu'il a fondé en 1996 et qui s'est spécialisé dans l'éditions de sites, la monétisation d'audience et les solutions de paiement en ligne. Ce diplômé de l'ESCP et de Sciences Po Paris est récemment entré au capital de "La Tribune", par le bias d'Hi-Media, en partenariat avec France Economie Regions.