Droit des marques : match nul entre Google et Vuitton


La justice européenne reconnait le droit des marques sur Internet mais limite la responsabilité des prestataires de référencement payant, comme Google.

La Cour de justice de l'Union européenne a tranché en faveur des titulaires de marque dans l'affaire qui opposait Vuitton (groupe LVMH), Viaticum (Bourse des vols/Bourse des voyages) et Eurochallenges à Google quant à l'usage des noms de marques en tant que mots-clés dans Adwords,

Pour la Cour, l'association du nom d'une marque déposée à l'annonce Adwords d'un annonceur qui n'en est pas titulaire peut en effet induire en erreur l'internaute quant à l'origine du produit ou du service qu'il recherche. Dans ce cas, le tribunal reconnait le droit du titulaire de se retourner contre l'annonceur qui utilise sa marque en tant que mot-clé sans son accord. Dans ce cas, la Cour de justice de l'Union européenne renvoie à la juridiction nationale la charge d'apprécier, au cas par cas, s'il y a atteinte à cette fonction d'indication d'origine.

C'est de cette manière qu'eBay a été condamné par le Tribunal de grande instance de Paris, en février 2010, pour avoir utilisé des mots-clés proches de la marque de luxe Vuitton pour afficher des liens sponsorisés renvoyant l'internaute vers son site d'enchères (lire l'article eBay condamné à verser 200 000 euros à Louis Vuitton, du 11/02/2010).

Quant à Google, ou tout autre prestataire de référencement payant, il n'est pas jugé responsable de l'utilisation par ses clients annonceurs du nom de marque d'autrui, car le moteur de recherche n'en fait pas directement usage pour sa propre communication. Encore faut-il aussi que sa neutralité soit prouvée, c'est-à-dire qu'il stocke de manière automatique et passive les données confiées par les annonceurs. S'il a par contre connaissance du caractère illicite des données ou activités de ses clients, il engage alors sa propre responsabilité. Aussi est-il tenu de stopper les campagnes illicites dont il aurait connaissance.

Cette décision va donc dans le sens de l'avis consultatif rendu par l'avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne, Poaires Maduro (lire l'article Google libre de vendre des noms de marques dans Adwords ?, du 22/09/2010). Pourtant la justice française en 2005, puis européenne en 2006, avaient initialement donné raison à Vuitton jugeant Google responsable de contrefaçon, concurrence déloyale et publicité mensongère.

Dans un communiqué, les représentants de l'industrie du luxe en Europe, comme par ailleur LVMH, se félicitent pourtant de cette conclusion donnant aux marques les mêmes droits sur ou hors Internet. 

Enfin, le jugement de la Cour de justice de l'Union européenne vaut comme interprétation du droit de l'Union. Reste donc désormais à la justice française de régler le litige opposant Vuitton, Viaticum et Eurochallenges au moteur de recherche américain.