Pierre-Emmanuel Cros (Performics France) "Plus de la moitié de nos investissements sur Facebook sont sur mobile"

Le tout nouveau président de Performics France revient sur la feuille de route qu'il s'est assignée et décrypte les enjeux qui se présentent à lui.

JDN. Vous avez récemment pris la tête de Performics France. Quelle est votre feuille de route ?

pierre emmanuel cros
Pierre-Emmanuel Cros, Président de Performics France. © S. de P. Performics

Pierre-Emmanuel Cros. Mon ambition est d'asseoir le positionnement pure-player de Performics au sein de ce grand groupe médias qu'est Publicis. Ma participation au salon Dmexco m'a conforté dans mon intuition que les technologies tierces seront les avantages concurrentiels du futur. Et le groupe Publicis va dans ce sens, en témoigne le récent partenariat signé avec Adobe ou notre collaboration poussée avec Radium One, pour le compte d'un client comme Bouygues Telecom par exemple. L'objectif est d'aider rapidement l'ensemble de nos clients à passer au "full programmatique", en instillant de la data dans toutes nos campagnes.

Qui dit technologie, dit également une plus grande maîtrise des solutions technologiques en self-service. Les outils proposés par Google, Facebook ou encore Twitter s'appréhendent de façon spécifique. A nous de travailler là dessus, tout comme nous devrons travailler les synergies entre on et offline de façon à devenir LE référent de l'analyse de la rentabilité d'un business. Bien sûr tout cela suppose de former et accompagner les équipes dans cette mutation, en mettant l'accent sur les profils technologiques, sans pour autant se départir de compétences liées à la compréhension des enjeux marketing de nos clients. Ici aussi l'objectif est disposer de spécialistes sur chacun de nos métiers.

D'un point de vue organisationnel comment va se traduire cette mutation ?
La société va désormais s'articuler autour de trois grands pôles. Le premier devra alimenter le savoir-faire technologique et le second sera constitué d'analystes multi-canaux dont l'expertise leur permettra de compiler et segmenter la data à des fins business. Le troisième conduira des réflexions transverses sur l'utilisation de la data et des surcouches solutions du marché. Il aura notamment pour mission de mettre en place les campagnes, dans ce cadre.

Allez-vous rester, quoi qu'il arrive, une agence de performance marketing ?
SEM, RTB, Social ads, mobile... Nous resterons orienté performance quel que soit le canal. Mais bien que l'agence s'appelle Performics, nous travaillons déjà massivement sur des campagnes branding, avec des indicateurs de visibilité qui commencent à s'installer, tels que OCR ou VCE... Autant de solutions dont nous accueillons l'arrivée avec un grand intérêt car elles constituent de nouvelles pierres à l'édifice de la rentabilité média. La marque et la performance, servent le discours digital d'une entreprise. Que l'on soit e-commerçant, distributeur, pure-players... Notre mission reste inchangée et, je tiens à le souligner, nous ne travaillons pas qu'avec des poids lourds du secteur. On peut tout à fait être une PME et travailler avec Performics.

Où en êtes-vous sur le mobile ?
On sent une véritable inflexion des investissements. Je ne peux pas entrer dans les détails mais je peux vous confirmer que nous sommes au dessus de la moyenne du marché. De fait le mobile n'est pas considéré comme un canal chez nous, mais comme un écran. On observe une très forte croissance sur le display mobile, notamment, porté par les investissements de nos clients sur Facebook. La moitié de nos investissements réalisés sur la plateforme sociale le sont d'ailleurs aujourd'hui sur mobile. Bien sûr les obstacles persistent. A commencer par le fait que tous nos clients ne sont pas encore équipés de sites optimisés. Mais le temps passé et le nombre de requêtes effectués explosent. A nous de remédier à la rupture de tracking que provoque l'absence des cookies sur le Web mobile et le cloisonnement app/web mobile.

La raison invoquée au moment de l'annonce de la fusion (avortée) Publicis - Omnicom était la nécessité de rivaliser avec Google & co. Google est votre concurrent ou votre partenaire ?
Un peu des deux. On évoque souvent une désintermédiation entre technologies et annonceurs, qui se feraient au détriment des agences. Mais je crois que les annonceurs auront toujours besoin des conseils transparents et objectifs que leur apportent aujourd'hui leurs agences. Googlet et Facebook sont, au vu de leur audience, des acteurs incontournables de l'écosystème. Et ils sont à ce titre de véritables partenaires avec lesquels nous travaillons main dans la main pour aider nos clients à toucher leurs consommateurs.

La Cnil est en train de mener des tests sur la politique des sites français en matière de gestion des cookies et de la vie privée... Que vous inspire la position plutôt ferme de l'institution ?
Je comprends tout à fait que l'on veuille réguler le marché de la publicité, notamment vis à vis de tout ce qui a trait à la data et à la protection de la vie privée des utilisateurs. Mais il faut tout de même se poser la question de la conséquence de certaines mesures sur l'écosytème digital ! Il ne faudrait pas tuer toute une économie alors même que ses acteurs multiplient les mesures pour s'auto-réguler, qu'il s'agisse de maîtriser le caractère intrusif ou répétitif des campagnes. D'autant que les consommateurs ne sont pas dupes des mauvaises pratiques. Je pense d'ailleurs que l'on s'orientera à terme vers un consommateurs tellement éduqué qu'il informera de lui même les marques qu'il est en processus de shopping. On commence de plus en plus à parler de cette inversion de la relation entre la marque et son client, avec un CRM qui devient VRM pour Vendor Relationship Management.

Autre débat en cours : l'application du cadre de la loi Sapin, rendue désuette par les mutations du secteur, selon l'Udecam. Comment vous positionnez-vous sur la question ?
La loi Sapin a instauré un cadre légal qui prône la transparence, afin de rétablir la confiance entre les annonceurs et leurs agences. Problème, nous opérons désormais dans un univers concurrentiel où tous les acteurs ne sont pas logés à la même enseigne. L'éditeur qui travaille avec Google ne connait pas la marge de ce dernier... Tout comme l'annonceur ne connait pas toujours celle de la régie avec laquelle il travaille...


Ancien directeur général de Performics France, Pierre-Emmanuel Cros, vient de succéder à Philippe Seignol à la tête de l'agence de performance digitale du groupe ZenithOptimedia. Après 8 années passées dans le groupe Aegis, Pierre-Emmanuel Cros a rejoint le groupe Publicis en 2008 en tant que Directeur délégué de Zed Digital puis comme Directeur général de Performics.