L’exemple des PME allemandes

Deux caractéristiques des PME allemandes exportatrices sont transposables en France. D'une part la mise en place de circuits d'assistance régionaux avec des interlocuteurs culturellement proches des PME. D'autre part, l'orientation progressive vers les PME des programmes d'apprentissage en vigueur dans les Grandes Écoles.

Le constat est connu et sans appel, la France manque de PME, sources  d’emplois et d’exportations. Nos voisins allemands en comptent trois fois plus, les Italiens deux fois. L’écart est  plus grand encore au niveau des ETI, les grosses PME. Ainsi, nous manquons de PME et celles qui existent ont peine à  grossir.

On ne peut pourtant pas reprocher à la puissance publique un manque  d’initiatives. Les gouvernements de ces dernières décennies ont tous considéré comme prioritaire le dossier des PME. Tous se sont préoccupés de fiscalité des successions, de fonds propres, de crédit et d’aide à l’export.  Des mesures ont été prises. Avec malheureusement les résultats que l’on sait. Cherchez l’erreur, pourrait-on dire.
L’observation attentive du milieu allemand de la PME fournit à cet égard des  éléments de réponses susceptibles d’application en France.
La comparaison montre tout d’abord que les PME performantes des deux pays se ressemblent à maints points de vue. Toutes affichent leur dynamisme et la forte motivation des personnels. Il y a la même passion du travail bien fait, de  la fidélité aux fournisseurs et aux clients, la même absence de hiérarchie formelle et …. la même méconnaissance de l’anglais. Et pour ce qui est de l’environnement fiscal ou financier, on ne peut certainement pas parler d’un avantage décisif du côté allemand.
Une différence certaine apparaît en revanche dans la capacité allemande à « sortir » du monde fermé entreprise-clients-fournisseurs et à jouer collectif. Les PME allemandes paraissent mieux insérées dans les organisations professionnelles spécialisées. Les Länder jouent sur ce plan un rôle de catalyseur. Le  soutien de la puissance publique aux PME s'exerce localement en Allemagne, et non pas depuis Berlin. La culture conviviale allemande fait le reste : c'est "en bande", par exemple, que ces PME participent aux 
expositions de Dubai ou de Canton.
Ces observations renvoient à la psychologie du patron de PME, beaucoup plus sensible à l’expérience de quelqu’un de son milieu qu’au discours d’un fonctionnaire culturellement lointain. A Shanghai par exemple, le patron allemand se tournera naturellement vers le « vieux » routier de son association professionnelle établi localement. Son homologue français hésitera à rencontrer le jeune diplômé français du bureau d’Ubifrance arrivé trois mois plus tôt.
Mais ce qui différencie sans doute le plus les PME françaises et allemandes est leur image sociale.  Alors qu’il ne viendrait jamais à l’idée d’un bachelier français de faire un jour carrière dans une PME, les choses sont radicalement  différentes en Allemagne, où l’admission en apprentissage est aussi valorisante que la réussite au concours d’entrée d’une Grande École française.

Sur ces deux plans il est possible d’agir. La première suggestion pourrait être le « recyclage » de retraités baroudeurs dans le conseil à l’exportation, sous la houlette des Régions et de la BPI. La deuxième concerne l’apprentissage en alternance, d’ores et déjà ouvert aux étudiants  d’Université et de Grandes Écoles, et qu’il conviendrait d’orienter aussi vers les PME. Ces « apprentis » comprendraient rapidement qu’il y a plus à apprendre dans la vision globale de gestion d’une PME qu’au sein d’un département cloisonné d’une société du CAC 40.