Allemagne & France : quelle reprise économique ?

En Allemagne, la demande intérieure explique l'essentiel de la reprise observée depuis le début de l'année 2013.

Confirmation de la reprise en zone euro

La reprise dans la zone euro s’annonce tout à la fois progressive et modeste. L'indicateur avancé de l'OCDE pour la zone euro a atteint 100,6 en août après 100,4 en juillet, Il se retrouve ainsi au-dessus de sa moyenne de long terme et à son niveau le plus élevé depuis juillet 2011. Cette évolution signale une "inflexion positive de la croissance" mais la poursuite des efforts de consolidation des finances publiques, la mise en œuvre des réformes structurelles et le niveau encore élevé du chômage continuent de peser sur la demande interne dans la plupart des pays de la zone euro.
En France, les mesures d’économies budgétaires décidées pour 2013, notamment les hausses d’impôts, se concentrent sur le second semestre, ce qui exerce un frein sur la demande. L’Allemagne est dans une situation opposée. Outre Rhin, le retour à l’équilibre des comptes publics offre des marges de manœuvre à la chancelière A. Merkel, qui a inscrit EUR 28 milliards dépenses supplémentaires (1 point de PIB) à son programme. De fait, l’activité allemande est davantage tirée par la demande intérieure : au premier semestre 2013, celle-ci a apporté 0,4 point de pourcentage à la croissance du PIB alors que, fait inhabituel, la contribution du commerce extérieur était négative.

Dichotomie France Allemagne ?

Les données publiées cette semaine et intéressant le mois d’août semblent le confirmer. En Allemagne, la production industrielle a, en effet, nettement rebondi (+1,4 % m/m) après avoir enregistré une chute de 1,1 % en juillet. Les données détaillées montrent que le secteur manufacturier (+2,1 % m/m) a été le principal moteur de cette forte progression, tandis que la production dans les secteurs de l’énergie et de la construction se contractait, en raison des températures élevées au cours du mois d’août. Les enquêtes récentes indiquent que la reprise dans le secteur s’est poursuivie en septembre, bien qu’à un rythme moins marqué. L’IFO était en légère hausse par rapport au mois précédent, progressant pour le cinquième mois consécutif. A 53,8, son niveau le plus élevé depuis janvier 2013, l’indice PMI composite demeurait, quant à lui, en zone d’expansion de l’activité pour le cinquième mois consécutif. Au total, la production industrielle a augmenté de 1,4% t/t entre juin et août. En faisant l’hypothèse d’une stagnation en septembre (la contraction des commandes industrielles en août, -0,3% m/m après -1,9% en juillet, laisse anticiper une légère correction à la baisse), elle serait encore en hausse de 0,8 % t/t au troisième trimestre. Somme toute, la croissance du PIB allemand devrait être de l’ordre de 0,5 % t/t au T3, après +0,7 % t/t au T2, celle-ci étant fortement corrélée à l’activité dans l’industrie. Son le poids dans l’économie fédérale a progressé au cours de la dernière décennie. Il représente désormais 25% de la valeur ajoutée totale contre 23 % en 2000. Au total, la croissance allemande serait de l’ordre de 0,8% cette année avant d’accélérer l’année prochaine à 1,8 %.

France, peut mieux faire

En France, la production industrielle a faiblement augmenté en août (+0,2 % m/m), après trois mois consécutif de repli. En conséquence, elle devrait décroitre de plus de 1% t/t au troisième trimestre, après le fort rebond du trimestre précédent (+1,2 % t/t). Contrairement à l’Allemagne, la croissance française n’est pas aussi étroitement corrélée à l’activité dans le secteur industriel. Le poids du secteur manufacturier dans l‘économie nationale a reculé au cours de la dernière décennie. Il ne représente plus que 15 % de la valeur ajoutée totale. Par ailleurs, les enquêtes, bien que moins fiables que par le passé, indiquent que l’économie est entrée dans une phase de reprise. En septembre, la nouvelle hausse de trois points de l’indicateur synthétique du climat des affaires de l’INSEE est de bon augure, tout comme la poursuite du redressement progressif de la confiance des ménages (+1 point en septembre) qui s’explique principalement par l’amélioration de leur jugement sur l’évolution du chômage. Après le net rebond du deuxième trimestre (+0,5 % t/t), nous anticipons une stagnation de la croissance du PIB au T3.
La Banque de France, quant à elle, est légèrement plus optimiste.
Elle vient néanmoins de réviser à la baisse sa prévision de croissance pour le troisième trimestre de 0,2 % t/t à 0,1% t/t. En effet, même si les signes de reprise sont plus nombreux, le chômage reste élevé, la compétitivité faible, enfin l’instabilité de l’environnement fiscal est peu propice à un redressement vigoureux de l’investissement privé. D’ici la fin de l’année, l’INSEE estime toutefois le PIB devrait retrouver son niveau d'avant-crise. Nous anticipons une croissance du PIB légèrement positive cette année et proche de 1% en 2014.  

Pays du sud, en rattrapage

Dans l’ensemble, la croissance de la zone euro devrait légèrement ralentir au troisième trimestre par rapport au T2 (+0,2 % t/t au T3 après +0,3 %, selon la dernière estimation du T2, publiées en début de semaine). Si la production industrielle a chuté en juillet, générant un acquis négatif pour le T3, le renforcement de l’activité dans les services devrait pouvoir compenser ce repli. A 52,2, en septembre, son plus haut niveau depuis juin 2011, l’indice d’activité du PMI services dans la zone euro, se retrouve en zone d’expansion pour le deuxième mois consécutif. Par ailleurs, les enquêtes signalent que la reprise ne se limite pas à l’Allemagne. En particulier, les indices PMI composites remontent en Europe du Sud, où ils étaient plutôt en retrait (en Italie à 52,8, l’indice composite d’activité est à son plus haut depuis avril 2011).
Enfin, la Banque centrale européenne reste prudente, reconnaissant que de nombreux risques planent encore sur les perspectives de l’union monétaire. Elle devrait laisser ses taux directeurs inchangés au moins jusqu’à la fin de 2014, garantissant ainsi le maintien de taux bas sur le marché monétaire ainsi que de faibles écarts de rendements sur les marchés de la dette souveraine, conditions indispensables d’une reprise durable de l’activité dans la zone euro.