Face à l’innovation, le salut des magasins passe par l’expérience client

L'e-commerce qui ne cessant d’innover et de pousser ses avantages, le brick&mortar se doit d’accélérer sa mutation. Ses fondamentaux du prix et du choix ne sont désormais plus assez différenciants. Il est urgent que le commerce physique revienne à sa raison d'être originelle.

Devant son miroir connecté, Sophie essaie virtuellement une nouvelle jupe. Elle se voit dedans aussi bien que si elle l’avait enfilée et un mot lui suffit pour changer de taille et de couleur. Se basant sur l’historique de ses achats, le système lui propose également un chemisier. Pour la convaincre d’acheter l’ensemble, il lui offre la retouche de la jupe, précisément calculée d’après les mensurations enregistrées par le miroir. Sophie sera livrée à domicile à partir du lendemain, dans un créneau qu’elle pourra elle-même définir en fonction de son emploi du temps.

Un tel scénario est loin d’être de la science-fiction. Les technologies et les concepts existent, et n’attendent plus que d’être déployés à grande échelle. Face à l'e-commerce qui ne cesse d’innover pour pousser ses avantages (choix, commodité…) et gommer ses inconvénients (logistique, limites de l’expérience…), le brick&mortar se doit d’accélérer sa mutation. Longtemps, les distributeurs ont pu rester focalisés sur leurs préoccupations traditionnelles de prix et de choix, mais ces fondamentaux ne sont désormais plus assez différenciants.   

Pour rester pertinent et compétitif, le commerce physique doit revenir à sa raison d’être originelle : permettre la rencontre d’un produit et d’un consommateur. Face à l'e-commerce ou au drive, son atout réside dans sa capacité à mettre en scène et faire découvrir l’offre, et non dans l’accumulation de linéaires chargés d’articles de commodité. Pour lancer un nouveau produit, éveiller la curiosité ou susciter un coup de cœur, le commerce physique reste, et restera, le mieux placé. À condition qu’il se redemande comment attirer des consommateurs, qui admettent de moins en moins d’endosser un rôle de manutentionnaire dans des magasins agencés comme des entrepôts. Bref, l’enjeu des enseignes aujourd'hui est de cultiver leur valeur ajoutée en réinventant l’expérience qu’elles proposent à leurs clients. 

Beaucoup l’ont d’ailleurs compris et les initiatives fleurissent. Grâce à la technologie, on relègue autant que possible la logistique en coulisses (avec un approvisionnement automatisé par tubes pneumatiques, par exemple, chez Undiz). L’espace ainsi libéré est réaménagé autour de la mise en valeur des produits, mais aussi d’interactions et de services nouveaux où la technologie joue de nouveau un rôle clé. Dans le secteur de la décoration, par exemple, la réalité augmentée permet d’insérer un meuble dans une photo de son domicile ou de changer la couleur d’un mur, et des configurateurs facilitent la composition d’une solution sur mesure. Optimiser la surface de vente permet en outre d’élargir les possibilités d’implantation, y compris en centre-ville, et donc de gagner en proximité. Enfin, l’amélioration des processus d’encaissement et de paiement doit permettre de remettre de l’humain dans les rayons pour apporter conseil, animation et convivialité, autant d’axes de différenciation qui répondent aussi aux attentes des consommateurs. 

Valorisant ses atouts spécifiques grâce à l’innovation technologique, le magasin de demain se positionnera donc, en complément des autres canaux de vente, comme le lieu d’une expérience premium, inspirante et engageante. Cette évolution, particulièrement adaptée à certains univers ou types d’articles (décoration, habillement…), correspond également à la demande des marques, elles-mêmes de plus en plus soucieuses de l’expérience client. Mais pour les distributeurs, à l’œil indéfectiblement rivé sur les prix, il s’agit d’un changement de perspective radical qu’il leur faut engager d’autant plus urgemment que les ajustements culturels seront profonds.