ICO : par où commencer ?

J’ai décidé de partager avec vous notre propre expérience, pas à pas, en tant que jeune entreprise qui se lance dans l’aventure.

ICO : un terme très en vogue en ce moment. Il est presque devenu une virgule dans les phrases de tout bon startupper qui se respecte. Pour autant, on a encore le droit d’avoir des doutes quant à ce que cela recouvre, et de s'interroger sur leur utilité et sur le montage, même dans le cadre de son propre projet. Pas simple. Puisqu’une ICO n’est ni une science exacte, ni une opération avec des règles immuables, à ce jour, j’ai décidé de partager avec vous notre propre expérience, pas à pas, en tant que jeune entreprise qui se lance dans l’aventure.

D’abord un petit rappel sur ce qu’une ICO n’est pas censée être. Certains imaginent que c’est un moyen de lever des fonds "rapidement" pour n’importe quel projet tenant sur 12 slides, auprès de personnes qui ne savent pas quoi faire de leurs bitcoins, à qui l’on proposerait un vague retour sur investissement et tout ça sans rien lâcher au niveau des parts sociales. Presque incroyable ! Le plus dingue, c’est qu’il y a encore peu de temps, c’était parfois le cas. Nous avons des exemples en tête. Evidemment il y a déjà eu des procès, suite à des abus.

Aujourd’hui les ICO se sont structurées, et l’offre est devenue tellement importante, que seuls les projets bien construits arrivent à tirer leur épingle du jeu. Vous pensiez qu’une ICO se monte en deux mois et vous coûtera juste un peu de temps à y consacrer ? Partez plutôt sur 9 mois et 300 000 euros minimum. Bref, introduire votre entreprise en bourse (IPO) sur le marché libre en France, c’est plus simple (car bien balisé), clairement légal et moins cher.

Alors petit récapitulatif de mi-parcours : ce n’est plus tout à fait ce que l’on imaginait, c’est long, et c’est cher. Et je n’ai pas encore parlé de la mise en œuvre technique à haut risque, du contexte juridique ultra flou, et de l’aspect comptable rédhibitoire si l’on se décide à rester à France.

Bref, il faut une forte dose de motivation.

Se lancer dans l’ICO ? L’expérience d’une communauté collaborante élargie pour développer son activité au plus grand nombre, avec un engagement qui a du sens.

Alors pourquoi franchir le pas ?

Tout d’abord la nature du projet. Notre projet se prête de par sa nature à une ICO. Même si VeraCash est un service basé sur les métaux précieux, biens tangibles, sonnant et trébuchant, cela reste une monnaie d’échange basée depuis son origine sur un système de token. Ensuite nous avons une volonté forte de reporter notre système transactionnel sur une blockchain cogérée avec nos propres utilisateurs. Enfin nous sommes les premiers à dire que les crypto-actifs ne sont pas une mode, mais notre futur sur le plan monétaire. Pour autant, on considère que le bitcoin est plutôt un problème qu’une solution, et donc, si des projets de crypto-monnaies doivent se financer, c’est maintenant. Nous nous inscrivons dans cette mouvance. Ce qui veut dire aussi que si nous étions sur un projet sans rapport avec l’écosystème crypto/blockchain, nous serions passés par un mode de financement plus classique. On ne fait pas une ICO pour financer le développement d’une usine qui fabrique des bouteilles de limonade.

Là, j’ai parlé de notre légitimité à se lancer dans une ICO, mais pourquoi exclure les autres manières de lever de fonds ? Peut-être parce que nous avons fait le constat que, d’un côté, nous avions les fonds d’investissement qui bougent le petit doigt uniquement lorsque vous avez 100 000 clients/utilisateurs, et de l’autre côté, les business angels qui considèrent que votre "valo" est toujours trop élevée.

La vraie raison est que nous avons réussi une opération de crowdfunding en 2017. Nous avons pu tester ce que c’est : une population qui va à la fois investir, s’engager dans votre communauté d’utilisateurs et vous challenger pour améliorer votre service. Et l’ICO ressemble beaucoup au crowdfunding sur ces aspects, mais à une échelle bien plus vaste, touchant une communauté internationale et des utilisateurs qui connaissent déjà l’intérêt d’un service comme le nôtre. Difficile de revenir en arrière lorsque vous avez goûté au plaisir d’une communauté collaborante, avec qui vous co-construisez ce qu’ils seront les premiers à utiliser.

Concrètement, comment s’y prend-on ?

Tout était bien parti dans notre projet mais voilà, à l’instant où l’on se parle, le white paper (le document d’information de l’ICO) est 90% terminé mais en stand-by car nous sommes dans une incertitude structurelle pour le finaliser. Tout d’abord, devons-nous réellement organiser notre ICO depuis la France ? Des advisors (conseillers) nous parlent de Malte ou Luxembourg. Nous avons aussi de bons contacts avec le gouvernement de Gibraltar. Et pourtant ici en France, il fait plutôt bon créer des entreprises, mais voilà, le statut des ICO n’y est pas encore clair et nous attendons la loi Pacte qui va clarifier tout ça.

L’autre interrogation concerne la nature du token que l’on va émettre. En effet c’est lui que l’on va vendre à nos investisseurs en échange d’un droit d’usage spécial de notre plateforme et des avantages particuliers. C’est un token qualifié de "utility token". Mais si on se trompe dans la nature de notre token, nous pouvons nous retrouver à être considérés "security". Et alors dans ce cas, nous rentrons dans la catégorie des actifs financiers nécessitant le dépôt d’un dossier pour pouvoir être négocié comme tel. La SEC (l'autorité américaine de régulation des marchés financiers) a refusé récemment de tels tokens et les ICO ont tout simplement été annulées, les actifs remboursés aux investisseurs. La cata quoi ! Un test intéressant à faire pour se faire un avis, est le test d’Howey, dont il existe une version adaptée aux ICO. Ce test permet de vérifier si l’actif que vous émettez rentre dans la catégorie des produits de bourse ou pas. La SEC est une autorité tellement dure sur le sujet, que de nombreuses ICO s’interdisent de toucher le public US. Dans notre cas, je considère que, si nous validons clairement ce test, nous excluant de la catégorie security, nous pourrons proposer notre offre de manière sereine partout dans le monde, même auprès d’un public français.

Mais quand on a imaginé se lancer dans une ICO on a fait que 0,1% du chemin. L’étape capitale est de structurer son idée et de transmettre l’intérêt de son projet aux personnes qui vont acheter votre token lors du crowdsale. Pour cela, une seule chose reste à faire : finir de rédiger le white paper. Notre prochaine étape.