Les agences de notation, zones d'ombre de la finance mondiale Des méthodologies méconnues, mais publiques

norbert gaillard, consultant pour la banque mondiale.
Norbert Gaillard, consultant pour la Banque Mondiale. © DR

Cette position "oligopolistique", Carol Sirou, présidente de la section Europe Francophone de Standard & Poor's, en viendrait presque à la déplorer. "Les agences donnent une opinion, pas des directives. Les acteurs du marché sont libres de les suivre ou non." Pour elle, le rôle des agences est "surdimensionné". Tout comme les critiques formulées à leur encontre, et notamment celle de l'irresponsabilité des agences, qui souffleraient le chaud et le froid sur le marché. Carol Sirou insiste sur l'objectivité des méthodes : "Nous accordons un soin particulier aux méthodologies employées. Nous sommes conscients de l'importance du rôle des agences, et y répondons avec une très grande responsabilité."

Ces méthodologies, bien que globalement méconnues, ne sont pas secrètes. Elles ont d'ailleurs fait l'objet de la thèse de Norbert Gaillard, qui s'est focalisé plus particulièrement sur la notation souveraine. S'il existe des nuances entre les méthodes utilisées par Moody's, Fitch et Standard&Poor's – "qui sont flagrantes lorsque vous êtes bon connaisseur", assure Carol Sirou –, elles tendent toutes à répondre à une question, celle du risque de voir un émetteur de dette tomber en défaut.

Carol Sirou : "Les agences donnent une opinion, pas des directives."

En ce qui concerne la notation souveraine, cinq grands critères se dégagent. La dette publique par rapport aux recettes budgétaires, d'abord, "plus fiable que le rapport dette publique/PIB, car davantage soumis aux fluctuations conjoncturelles". Le PIB/habitant, "qui distingue les pays industrialisés des autres". L'historique des défauts de paiements au cours des 15 ou 20 dernières années. "On remarque en effet que les pays ayant déjà fait défaut ont plus largement tendance à retomber en défaut". La gouvernance économique et politique des pays, "avec un souci tout particulier des droits des créanciers et des investisseurs". Enfin, "moins important depuis une dizaine d'années", selon Norbert Gaillard, le taux d'inflation qui ne permet pas toujours de détecter l'émergence des pays du Sud.