Comment Paris va profiter des JO 2024 pour devenir une smart city

Comment Paris va profiter des JO 2024 pour devenir une smart city Congestion, gestion des foules, développement durable, transports… la ville intelligente aidera la capitale à mieux gérer les Jeux olympiques de 2024 et à remplir les objectifs écolos qu'elle a fixés.

Voilà déjà longtemps que le suspense s'était dissipé, mais c'est désormais confirmé : Paris accueillera les Jeux olympiques. Sa seule concurrente, Los Angeles, a accepté fin juillet le principe d'une double attribution, qui assure à la capitale française les Jeux de 2024 et à la ville californienne ceux de 2028. Une session du Comité international Olympique (CIO) organisée à Lima (Pérou) le 13 septembre a validé ces deux candidatures dans la soirée, faisant officiellement de Paris la ville hôte des Jeux Olympiques 2024.

Place désormais à la préparation des JO. Et pour cette édition, il ne s'agira pas seulement de construire de nouveaux équipements et infrastructures. Paris a placé les technologies et la smart city au cœur de son projet de candidature. Les différentes solutions envisagées doivent permettre d'atténuer les désagréments engendrés par la tenue des Jeux, d'assurer une meilleure gestion des foules ou encore d'atteindre les objectifs de développement durable fixés lors de la candidature.

Innover pour se démarquer

Paris n'était pourtant pas obligé de présenter un plan innovation au CIO, qui ne demandait rien aux villes candidates en la matière. "Mais nous savions qu'en face Los Angeles serait solide en matière d'innovation grâce aux acteurs de la Silicon Valley," se souvient Jérôme Lachaze, directeur du développement durable au comité de candidature Paris 2024. Il a donc été décidé de lancer en 2016 un appel à innovation, demandant aux start-up de proposer leurs solutions à certains défis posés par l'organisation des JO.

"C'était aussi une manière de valoriser tout ce qui a été fait ces dernières années pour soutenir les start-up en France et à Paris. Nous nous sommes dit que l'innovation était un sujet intéressant pour montrer que Paris n'est pas seulement la ville-lumière", raconte Nicolas Ledoux, associé au cabinet de conseil Algoé, qui a piloté l'appel à innovation. Plus de 200 start-up ont candidaté. Elles ont été départagées par un jury composé de membres du comité de candidature et des 15 partenaires des JO. Ces grands groupes comme Bouygues construction, RATP, Orange ou Engie ont chacun envoyé une personne en charge de l'innovation pour aider le comité de candidature à définir les grands thèmes de l'appel à innovation : "smart sport", "smart experience", "smart city", "smart mobility" et "smart event".

Urgences connectées

Parmi les élus, la société Placemeter s'est imposée dans la catégorie "smart city". "Cette start-up répond à un gros challenge de la candidature : démontrer comment on règle la question de la congestion générée par les Jeux", reconnaît Nicolas Ledoux. La technologie de vision par ordinateur développée par Placemeter compte et différencie les voitures, vélos, motos, piétons et camions. L'analyse de ces données permet d'estimer et d'anticiper les flux de personnes, ainsi que de tester l'influence d'aménagements de l'espace public sur ces mouvements. Nicolas Ledoux précise que les modèles d'estimation des flux utilisés actuellement sont peu concluants et échouent souvent à anticiper le comportement parfois irrationnel des foules. "A une plus petite échelle, on pourrait aussi s'en servir pour qualifier la performance d'une buvette et la déplacer si elle est mal située", ajoute-t-il.

Autre solution de gestion des foules sélectionnée, l'application d'appels d'urgence numériques Urgentix. Elle appelle les secours tout en géolocalisant immédiatement l'utilisateur, avant de lui proposer de filmer ce qu'il voit, permettant ainsi de mieux estimer la quantité de personnel à envoyer sur place. "Le témoignage d'une personne paniquée n'est pas toujours fiable, c'est un outil très précieux", justifie Nicolas Ledoux.

La voiture personnelle bannie

Navya et ses navettes électriques autonomes se sont imposés dans la catégorie "smart mobility". La start-up française ne s'est pas contentée de proposer l'un de ses modèles traditionnels. "L'idée est de les amener à faire évoluer leurs navettes vers une sorte d'hybride entre taxi et transport collectif", détaille Nicolas Ledoux. Leur rôle serait de transporter les athlètes sur le village olympique à la demande, grâce à des commandes vocales permettant d'arrêter la navette pour y monter n'importe où sur le site, puis lui annoncer où l'on souhaite se rendre.

La ville intelligente aidera aussi Paris à réaliser les objectifs de développement durable qu'elle s'est fixés, notamment le fait d'organiser des Jeux à impact environnemental positif. "Nous voulons utiliser les JO pour initier une transition écologique", résume Jérôme Lachaze. En matière de transports, la chasse au véhicule personnel est ouverte : il sera impossible d'en utiliser un pour se rendre aux JO, puisqu'aucune place de parking ne sera prévue à cet effet, sauf pour les athlètes et les personnes accréditées, qui se déplaceront en véhicules propres fournis par le partenaire Toyota. Afin de faciliter le déplacement sans voiture, les tickets de transports en commun seront inclus dans les places pour assister à une compétition. Le Plan Vélo de la Mairie de Paris sert également ces objectifs : il prévoit la construction de nouvelles pistes cyclables connectant le Stade de France et le centre aquatique (Saint-Denis) au village olympique (Paris) et 10 000 places de stationnement de vélo supplémentaires.

Collaboration avec les grands groupes

Pour ce qui est de l'énergie et de l'eau, des discussions sont en cours avec la Caisse des Dépôts pour intégrer des systèmes de gestion de l'eau intelligents ainsi que des smart grids afin de la réduire la consommation, les pertes, et bien sûr la facture. Engie planche notamment sur une boucle énergétique entre le Stade de France et le centre aquatique qui sera construit juste en face, à Saint-Denis. Equipé de panneaux solaires, le stade pourrait fournir en électricité le centre aquatique, ce qui "permettrait de le sortir de ce statut de bâtiment qui ne sert que 12 fois par an en lui donnant une utilité énergétique," se réjouit Jérôme Lachaze.

Maintenant que Paris est officiellement désignée, les solutions technologiques mises en avant durant la candidature, et les entreprises choisies pour les mettre en place, feront l'objet d'appels d'offre qui devraient intervenir à partir de 2021, après l'établissement des besoins et d'un cahier des charges en 2018-2019. En incluant des besoins forts en termes d'innovation et de smart city à ces cahiers des charges, Paris pourra s'assurer que les start-up auront accès aux marchés publics. Déjà, certains grands groupes partenaires, comme Orange ou Accor Hotels, ont commencé à travailler avec des start-up repérées lors de l'appel à innovation, afin d'inclure leurs produits dans leurs réponses aux appels d'offre.