Louer les voitures des constructeurs, le nouveau modèle d'autopartage de Virtuo

Louer les voitures des constructeurs, le nouveau modèle d'autopartage de Virtuo Pour accélérer son développement à moindres frais, la start-up française teste un système dans lequel les constructeurs lui fournissent gratuitement des véhicules qu'elle loue.

Dans l'autopartage, les véhicules sont l'un des principaux pourvoyeurs de valeur, mais aussi de coûts. Leur acquisition en propre ou leasing, leur entretien, et l'optimisation de la flotte en fonction de la demande sont le premier poste de dépenses des services de location de voitures. Ce qui a poussé certaines start-up comme Ouicar ou Getaround à se reposer sur des particuliers ou des professionnels pour lui fournir ces véhicules, les acheminer et les entretenir. Afin de proposer un service unifié allant avec des véhicules haut de gamme, la start-up Virtuo s'est pour l'instant gardée de tester ce modèle économique : elle possède ses propres véhicules, que les clients viennent récupérer dans des parkings sous-terrain souvent proches de hubs comme les gares, et qui sont nettoyés entre chaque client.

Mais comme d'autres avant elle, la start-up fondée en 2015 se retrouve face au défi de l'accélération et du passage à l'échelle, pour dépasser les 4 000 véhicules loués dans 13 grandes villes françaises et 4 villes étrangères (Londres, Manchester, Barcelone, Madrid). Virtuo a réalisé en 2020 un chiffre d'affaires de "plusieurs dizaines de millions d'euros, plus proche des 50 que des 10", nous précise son cofondateur Karim Kaddoura. Avec une croissance de 10% par rapport à 2019 malgré la crise. Un chiffre qui fait toutefois pâle figure en comparaison avec la multiplication par dix des revenus constatée entre 2017 et 2019.

Décentraliser pour grandir

Pour poursuivre sa croissance, Virtuo a donc besoin de plus de véhicules. "Nous sommes aujourd'hui les seuls à amener l'offre (les voitures, ndlr) sur notre plateforme et nous nous demandons si nous ne pourrions pas passer la main à d'autres", explique Karim Kaddoura. "Si vous faites un iPhone avec seulement vos propres applis, c'est un business tout à fait extensible, mais pas autant que si vous laissiez tout le monde développer des applis", illustre-t-il, en référence au moment où Apple a décidé d'ouvrir iOS aux développeurs tiers, au tout début de l'iPhone.

Pour réussir cette transition, Virtuo a commencé en février à tester un modèle unique dans le secteur. Plutôt que de faire appel à des particuliers ou des loueurs professionnels pour grossir sa flotte, la start-up s'est alliée à un constructeur, le sud-coréen Hyundai. L'industriel lui met à disposition gratuitement quelques dizaines de ses modèles électriques Kona à Paris, en échange d'une commission de 20% sur les revenus tirés de chaque location. "Il n'y a pas de contrat de leasing, nous ne sommes pas propriétaires des voitures", précise Karim Kaddoura. 

Virtuo garde 80% des revenus

Le deal peut sembler particulièrement avantageux pour Virtuo, si on le compare par exemple avec ce qui se fait sur les plateformes d'autopartage faisant appel à des particuliers ou des entrepreneurs : les propriétaires des véhicules gardent environ 70% des revenus de la location. Mais il faut dire qu'en plus de son travail de plateforme de mise en relation, Viruto recharge, nettoie les véhicules et assure leur entretien, alors que ces tâches reviennent aux propriétaires des véhicules sur d'autres plateformes. L'accord revêt également une dimension publicitaire, ajoute Karim Kaddoura. "Nous permettons à Hyundai de toucher des urbains qui ne possèdent plus de véhicule et ont en moyenne 33 ans". L'offre bénéficie également d'une mise en avant par rapport au reste des locations dans l'application. Il n'est pas prévu de partage de données sur les clients entre les deux sociétés, assure Virtuo.

Ce modèle permet à Virtuo de faire croître sa flotte à peu de frais tout en maintenant le contrôle sur la qualité de service. La start-up ne se dit cependant pas fermée à l'idée de passer par des entrepreneurs de la location, comme le fait Getaround. "C'est à l'étude, mais nous voulons être certains de la qualité de service". Si Virtuo décidait d'adopter ce modèle, ce serait en faisant bénéficier les loueurs de son réseau de professionnels de l'entretien automobile, qui sont connectés à ses systèmes informatiques en temps réel et doivent appliquer un cahier des charges. "Nous pourrions brancher les entrepreneurs sur ces outils", suppute Karim Kaddoura. En attendant, la start-up a entamé des discussions avec BMW, Fiat et Peugeot afin de tester le même modèle économique qu'avec Hyundai. Le Coréen et la start-up se sont donnés rendez-vous en juin pour tirer un premier bilan de ce test et décider d'appuyer sur le frein ou l'accélérateur.