Proposition de loi pour la protection "d'informations économiques" : encore du travail

Les motivations de cette proposition de loi sont certes louables, mais elle reste encore "à travailler" et il semble que l'arsenal juridique des moyens disponibles à ce jour, pour lutter contre les agissements indélicats, soit efficace et adpaté.

Une proposition de loi a été présentée à l'Assemblée Nationale en janvier 2011, relative à la protection des informations économiques, et tendant à modifier l'article 226-14 du Code pénal pour y insérer des sanctions réprimant l'atteinte aux dites informations.
Les auteurs de la proposition cherchent à protéger les actifs immatériels de l'entreprise, qui sortent du champ du brevet, et qui recouvrent les informations juridiques, financières, commerciales, scientifiques, techniques, économiques ou industrielles.
Selon eux, les textes en vigueur présentent une "cohérence et une efficacité lacunaires". Tout en reconnaissant la relative efficacité des mesures actuelles sur le plan de la réparation financière, les auteurs souhaitent "réprimer les agissements préjudiciables". Le ton est ainsi donné.

Les définitions données par le texte proposé soulèvent quelques interrogations.
Tout d'abord, les actes répréhensibles sont ceux qui consistent à : "s'approprier, conserver, reproduire ou porter à la connaissance d'un tiers non autorisé" les informations protégées.
L'auteur desdits actes est "toute personne non autorisée par le détenteur, ou par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur". Le détenteur est quant à lui "la personne morale ou physique qui dispose de manière licite du droit de détenir ou d'avoir accès à cette information".

Les sanctions prévues sont celles de l'article 314-1 du Code pénal, qui sont doublées en cas "d'intention de nuire". On retrouve ici les difficultés liées à la preuve de cette intention. De plus, les peines sont également doublées lorsqu'il en est résulté "un profit personnel, direct ou indirect" pour l'auteur de l'infraction. En première lecture, on peut s'interroger sur les situations que cherche à couvrir ce paragraphe. En effet, l'auteur d'un acte répréhensible agit a priori par intérêt et en vue de son profit. S'agit-il ici d'invoquer ce qu'il est convenu d'appeler la mauvaise foi ?

Pour ce qui est des informations à protéger, le nouvel article 226-14-2 en donne la définition suivante : "Sont qualifiées d'informations à caractère économique protégées, les informations ne constituant pas des connaissances générales librement accessibles par le public, ayant, directement ou indirectement, une valeur économique pour l'entreprise, et pour la protection desquelles leur détenteur légitime a mis en oeuvre des mesures substantielles conformes aux lois et usages, en vue de les tenir secrètes".
Sauf erreur, ceci ressemble fort à la définition communément admise du savoir-faire. En effet, on y retrouve le caractère secret, l'absence d'accès libre par le public, sa valeur économique pour l'entreprise, et le fait que des mesures substantielles aient été prises par cette dernière pour la protection de ces informations. Ainsi, la proposition de loi ne semble pas apporter d'éléments fondamentalement nouveaux quant à la nature des informations destinées à être protégées.

Reste le problème majeur, et d'ailleurs récurrent, à savoir identifier les informations en question. En effet, la charge de la preuve incombe au détenteur de ces dernières. Cette proposition de loi, malgré son intérêt et sa motivation louable, doit selon nous être affinée afin d'éviter des dérives qui pourraient résulter de ses interprétations divergentes possibles, qui pourraient menacer la sécurité des tiers.

Que les détenteurs des dites informations se rassurent : quel que soit le sort réservé par les députés à ce texte, il semble que les nombreux textes actuels offrent des possibilités élargies d'actions à l'encontre de tiers indélicats.