Le dialogue social…c’est maintenant ?

En 2012, les lois Auroux fêtent leurs 30 ans. Que reste-t-il aujourd’hui de leur ambition dans une France où le taux de syndicalisation des salariés est le plus bas des pays de l’OCDE ?

Les partenaires sociaux et les directions semblent parfois éloignés les uns des autres. Devant les difficultés économiques, la reprise annoncée des PSE, on reparle beaucoup du dialogue social. Alors le dialogue social… c’est maintenant ?
Il faut parler vrai: l’entreprise est une entité qui  rassemble des intérêts différents (propriétaires, dirigeants, salariés) qui doivent trouver ensemble des équilibres permettant d’atteindre une performance globale. La recherche de ces équilibres se construit dans le cadre du dialogue social. S’entendre pour résoudre les problèmes au quotidien, s’écouter, se parler, trouver des compromis sur l’organisation du travail, les conditions de travail.
S’entendre c’est avoir des convergences mais aussi de divergences qui peuvent donner lieu à des crises …. Et c’est normal !
 C’est l’absence de crise qui doit inquiéter : elle est le signe d’une absence de rencontre, de confrontation, l’entreprise s’endort alors et court donc un risque. Elle fait partie de la vie d’une entreprise vivante et évolutive. Elle peut être considérée comme un vecteur de réajustement et de progrès plutôt qu’un gaspillage d’énergie et de temps.
Force est de constater que l’histoire sociale française s’est écrite dans la douleur
. Notre vieux pays centralisateur a donné naissance à un syndicalisme révolutionnaire dont les avancées sociales ne se font que par la lutte pour aboutir à des règles législatives.

Changer les comportements
Il est urgent de modifier les comportements des protagonistes pour un dialogue responsable :
* Fixer des règles
 : en France, l’interventionnisme de l’Etat spontané ou réclamé nous conduit trop souvent à une déstabilisation (voire une infantilisation) du dialogue social et évidemment, seule responsable en cas d’échec, l’incapacité des partenaires sociaux à s’entendre ! L’Etat doit créer le cadre, fixer les règles, mais ne doit pas être un des acteurs. Si l’on veut développer une attitude responsable des partenaires dans l’entreprise, il  doit, comme en Allemagne, laisser l’autonomie, une fois les règles fixées.
L’absence de dialogue responsabilisant en amont est pénalisante, elle conduit au maintien des clivages ancestraux, à la paupérisation de la représentation syndicale et à un patronat qui s’en contente. N’a–t-on pas ce que l’on mérite ?

* Donner accès au plus grand nombre aux instances de dialogue
, pour cela il faut simplifier et flexibiliser la mise en œuvre. La majorité des salariés du privé PME et TPE en France n’ont pas accès à un dialogue social structuré.  A noter que fin novembre 2012, pour la première fois, les salariés des TPE seront invités à voter pour les instances syndicales qu’ils estiment pouvoir les représenter. Les résultats de ce vote, agrégé à celui de cette année dans les entreprises et celui à venir également pour les travailleurs agricoles, va redessiner la nouvelle carte de la représentativité syndicale en France… A titre d’exemple passer de 49 à 50 salariés qui implique la mise en place d’un Comité d’entreprise, c’est 1 salarié de plus mais 34 obligations réglementaires supplémentaires !
* Se comprendre mutuellement : former les parties prenantes, partenaires sociaux ET directions. Pour les managers une bonne compréhension du rôle des partenaires sociaux ne serait pas un luxe !
* Reconnaître la gestion d’un mandat social dans le parcours professionnel : la seule certitude pour nos syndicalistes est de ne pas faire carrière : ambitieux programme !
* Proposer un bilan de compétences de début et de fin de mandat, valider les compétences acquises au cours du mandat et réaliser un point de carrière annuel.
* Limiter les renouvèlements successifs des mandats sociaux
pour éviter l’engagement à vie.
* Créer, au sein de l’entreprise, un champ de discussion des thèmes à aborder et ne pas se limiter aux seules obligations légales. Il faut autoriser qu’un accord puisse déroger à la loi dans l’intérêt de l’entreprise et de ses salariés en fonction du contexte marché et territoire.
* Redéfinir les processus d’information/consultation
pour plus de proximité et d’anticipation. Pourquoi comme aujourd’hui attendre le dernier moment alors que tout le monde connait la fin de l’histoire !
*
Rendre obligatoire les instances de médiations qui pourraient éviter bien des conflits et des procédures judicaires sans fin et obliger le juge à entrer dans l’entreprise pour débloquer des situations. Une forme de négociation assistée toujours préférable à toute forme de violence ou d'injonction.
Un dialogue social rénové permettrait d’instaurer un cercle vertueux et renforcerait la compétitivité de nos entreprises. Il faut donc urgemment redessiner, réarchitecturer le dialogue social.