L’employeur peut-il librement accéder aux fichiers des ordinateurs de ses salariés ?

Quel salarié n’utilise pas l’ordinateur dont il dispose à titre professionnel pour envoyer des messages personnels ? Cette question a pour corollaire une autre : l’employeur peut-il avoir librement accès à tous les fichiers des ordinateurs de ses salariés ?

La position de la jurisprudence en la matière est constante : les fichiers créés par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel. De sorte que l’employeur est en droit de les ouvrir hors de la présence de l’intéressé.

A une restriction près : l’employeur ne peut avoir accès aux fichiers qui sont identifiés comme personnels (Cass. soc 18 octobre 2006 n° 04-48025).

Peu importe que le salarié invoque des correspondances présentant par nature un caractère personnel, l’argument étant inopérant.
Encore faut il concrètement qu’il ait créé sur son ordinateur un répertoire intitulé « personnel » dans lequel il aura placé ses fichiers.
C’est à cette seule condition qu’il pourra se constituer un espace, en théorie, inviolable. A contrario, il a été jugé que le fait de donner son prénom à un répertoire ne suffisait pas à l’identifier comme personnel (Cass. soc 21 octobre 2009, n° 07-43877).
Cette affaire concernait un salarié licencié pour faute lourde pour avoir préparé le démantèlement de l’entreprise dans laquelle il était responsable commercial marketing, en participant à la mise en place d’une structure directement concurrente.
Un huissier mandaté par l’employeur avait ouvert l’ordinateur en l’absence du salarié et trouvé un fichier litigieux dans un sous répertoire dénommé JM, initiales correspondant au prénom du salarié qui s’appelait Jean-Michel.

L’argument consistant à prétendre que le répertoire JM devait nécessairement être considéré comme personnel a été balayé par la Cour de cassation.
Récemment, les hauts magistrats ont également jugé que la seule dénomination « mes documents » donnée à un fichier ne lui confèrait pas un caractère personnel (Cass. soc 10 mai 2012 n° 11-13884).
La protection de la vie privée du salarié dans l’entreprise est donc subordonnée exclusivement à la création d’un répertoire intitulé « personnel ».