Inventions de salariés : inopposabilité de la convention collective

Pour le salarié, le droit à obtenir une rémunération supplémentaire, au titre d'une invention de mission, ne peut pas dépendre du caractère exceptionnel de l'invention mise au point.

Par principe, le droit au brevet appartient à l'inventeur ou à son ayant cause. Par exception, la loi prévoit que les inventions faites par le salarié dans l'exécution d'un contrat de travail comportant une mission inventive appartiennent à l'employeur.
Ainsi, conformément à l'article L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle, le salarié qui met au point une invention de mission doit percevoir une rémunération supplémentaire à son salaire, visant à rémunérer ce transfert de propriété.

Le législateur a laissé aux conventions collectives, aux accords d'entreprise ou à défaut aux contrats individuels de travail le soin de fixer les modalités de calcul de cette rémunération supplémentaire.

Quelques conventions collectives, antérieures à la loi du du 26 novembre 1990 (le dispositif actuel prévu à l'article L.611-7 précité est issu de cette loi), prévoient des modalités de calcul de cette rémunération supplémentaire.
Les litiges entre salariés et employeurs, portant sur cette question de la rémunération supplémentaire, donnent ainsi l'occasion de juger de la validité de ces conventions collectives.

Par arrêt en date du 12 février 2013, la Cour de cassation considère que l'article 29 de la convention collective de l'industrie pharmaceutique est inopposable : "l'article L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de la loi du 26 novembre 1990, modifiant l'article 1er ter de la loi du 13 juillet 1978 qui disposait que le salarié, auteur d'une invention de mission, pouvait bénéficier d'une rémunération supplémentaire, dispose dorénavant que ce salarié doit bénéficier d'une telle rémunération ; qu'après avoir relevé que l'article 29 de la convention collective de l'industrie pharmaceutique subordonne le droit à la rémunération supplémentaire à la double condition de la délivrance d'un brevet et de l'intérêt exceptionnel que l'invention présente pour l'entreprise, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que ces dispositions, contraires au texte désormais applicable, lequel est d'ordre public, devaient être réputées non écrites, peu important qu'aucun brevet n'ait été déposé ou délivré, dès lors que les clauses d'une convention collective ne peuvent restreindre les droits que le salarié tient de la loi" (Cour de cassation, 12 fév. 2013, RG : 12-12898, Legifrance).
Cette décision s'inscrit dans le prolongement de la jurisprudence de la Cour de cassation qui confirme que le versement de la rémunération supplémentaire ne doit pas dépendre de la volonté de l'employeur (voir Cour de cassation, 22 fév. 2005, RG : 03-11027Legifrance : à propos de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie).


Face à l'inopposabilité d'une convention collective, le recours à l'accord d'entreprise (ou au contrat de travail) pour fixer les modalités de calcul de la rémunération supplémentaire devient une nécessité.