L’autoédition surfera sur la vague du livre numérique
Le livre numérique (ebook) représentait 28% des ventes de livres aux USA en novembre 2012. En France nous peinons à atteindre… 1%. Autant dire que la marge de progression est conséquente.
Certains esprits chagrins diront que la vieille Europe est réfractaire et ne veut pas lire sur écran.Pourtant le Royaume-Uni, qui n’a rien à envier à notre longue histoire culturelle, est déjà à 9% de parts de marché et cela continue de grimper, vite. La France est un des leaders mondiaux des nouvelles technologies, les tablettes numériques connaissent un engouement indiscutable, l’internet est désormais dans tous les foyers ou presque… Notre pays continue d’être un leader dans de nombreux secteurs innovants. Dans ces conditions, comment croire à une résistance culturelle propre à la France et qui ne concernerait… que le livre ? Que celui qui n’a jamais écrit un mot sur un traitement de texte lève le doigt ! En réalité les Français sont prêts. La lenteur du décollage de l’e-book est due à quatre freins principaux : le prix encore élevé des liseuses électroniques, le prix élevé des e-books, la faiblesse de l’offre (peu d’e-books sont disponibles sur le marché, affaiblissant l’attrait des librairies numériques) et enfin les DRM, ces cadenas numériques supposés empêcher le piratage et qui ne font en réalité que décourager les acheteurs à cause de leur complexité.
Laissons couler un peu d’eau sous les ponts et projetons-nous dans un avenir proche…
Le prix des liseuses numériques aura fortement chuté. Les modèles d’entrée de gamme se trouveront pour une poignée d’euros aux coins des rues et en supermarchés, à côté des ardoises d’écoliers. Le prix des e-books aura baissé également. Il sera possible d’accéder aux best-sellers du moment à moitié prix du papier, voire moins. Les couplages livre papier - livre numérique seront monnaie courante (comme les films vendus simultanément en Blu-ray et en format classique). Les librairies d’e-books proposeront un choix conséquent à des prix bas, voire gratuits pour servir de produits d’appel, permettant d’attirer le lecteur.
Bien sûr, cette évolution dans la façon d’acheter et de
lire induiront des changements profonds dans l’industrie du livre. Le livre de poche, en concurrence directe avec l’e-book
sur le créneau des livres bon marché, connaîtra des chutes de ventes
importantes.
De nouveaux éditeurs construiront de nouveaux modèles
économiques basés sur le numérique et permettant de baisser fortement les prix
de vente, déstabilisant les éditeurs bien implantés. Certains demanderont au
législateur de les protéger par des lois et des subventions. On accusera les
vilains pirates informatiques de déstabiliser le marché en téléchargeant
illégalement des livres. On reprochera à l’ebook ses caractéristiques
déflationnistes, on l’accusera de détruire de la valeur.
Après les bouleversements, de nouveaux équilibres se
mettront en place. Au final une certitude : les Français liront des
livres numériques.
Dans ce futur proche, dont la dynamique est déjà enclenchée, un phénomène poursuivra son essor inexorable : l’autoédition, qui consiste à publier soi-même son livre sans passer par un éditeur. Elle progresse déjà en France au rythme soutenu de 30% par an depuis 2004, d’après les statistiques de la Bibliothèque Nationale de France. Les livres autoédités représentaient déjà 12% du dépôt légal des livres français en 2011, soit 1 livre sur 8.
Le développement du livre numérique va puissamment
contribuer à développer l’autoédition, car il facilite la publication et la
promotion d’un livre, rendue possible en quelques clics. Cette dynamique sera à double sens : l’autoédition
contribuera également à dynamiser l’essor du livre numérique.
Pour deux
raisons : d’abord les auteurs autoédités multiplient l’offre disponible,
proposant un choix plus vaste de livres aux lecteurs et contribuant ainsi à
rendre les librairies numériques plus attrayantes. Ensuite, ils n’hésitent pas
à proposer des prix de vente très bas. Les best-sellers américains autoédités, dont
certains dépassent aujourd’hui le million d’exemplaires numériques vendus, se
vendent en général autour de 2 ou 3 dollars, parfois moins, soit 7 à 10 fois
moins cher qu’un livre papier publié par un éditeur traditionnel !
En France peu d’auteurs autoédités ont connu des gros
succès jusqu’à présent mais quelques success stories se font jour. Dans les
mois et les années à venir cela deviendra monnaie courante. Les éditeurs
traditionnels, qui renâclent à considérer l’autoédition comme un mode de
publication à part entière, seront les premiers à courtiser ces auteurs
autoédités à succès.
Le livre numérique, accompagné par l’autoédition, sera à
n’en pas douter un eldorado éditorial dans les prochaines années en France et
en Europe.