Facebook et Twitter se comportent comme des ennemis de la liberté, donc de la démocratie

Facebook et Twitter se comportent comme des ennemis de la liberté, donc de la démocratie Ces plateformes ont agi sans décision de justice ni légitimité pour censurer le compte de Donald Trump. C'est un risque démocratique majeur dont notre pays doit se protéger en garantissant la liberté d'expression sur les plateformes numériques, avec pour seule limite les lois de la République.

On peut ne pas aimer les tweets de Donald Trump. Chacun est libre de lui répondre, soit en réfutant ses arguments, soit en lui exprimant son désaccord. On peut, si on est citoyen américain, penser que Donald Trump est un mauvais président. Un vote constitutionnel est organisé régulièrement et permet de changer de président. On peut également juger le bilan du président Trump désastreux. Des milliers de graphiques disponibles sur Internet, établis à partir de sources sûres montrent qu'il n'a pas fait ce qu'il avait promis, voire qu'il a fait l'inverse. On peut aussi penser que Donald Trump a encouragé la sédition. Il existe des lois et tribunaux qui pourront en juger et condamner le peroxydé. On peut enfin, et toujours si on est citoyen américain, penser que Donald Trump est inapte à gouverner le pays et aller voir son représentant légitime au Congrès et demander l'ouverture d'une procédure d'impeachment, régie par la Constitution du pays.

Toutes ces actions sont légales, légitimes et totalement démocratiques. En revanche, que des sociétés qui ne sont en aucun cas légitimes (personne n'a voté pour elles) et qui agissent sans base légale (aucun tribunal ne s'étant prononcé) s'arrogent le droit de censurer le président des Etats-Unis est inacceptable dans un monde démocratique. Ce qu'ont fait Facebook et Twitter en supprimant définitivement le compte de Donald Trump est révoltant et révélateur de leur nature profondément anti-démocratique. Evidemment, le golfeur-président a tout pour être détesté, on pourrait donc se dire "bien fait pour lui". Jusqu'au jour où ce sera notre compte ou celui de notre voisin qui sera supprimé. La liberté ce n'est pas la censure par des gendarmes du bon goût autoproclamés, c'est l'application de la Loi. La liberté, ce n'est pas trouver "normal" qu'un compte soit supprimé sans base légale parce qu'on n'aime pas le type qui en est le propriétaire. Car quand un groupe de personnes illégitimes commence à "faire le bien" pour les autres sans leur accord, cela se finit toujours en barbarie.

Facebook et Twitter se cachent derrière leur statut d'hébergeur et de plateforme (la LCEN en France et la Section 230 aux Etats-Unis) pour s'exonérer de la responsabilité des propos qui sont tenus sur leur site. Cela leur a permis de prospérer. Alors qu'il a été maintes fois démontré que Facebook servait de plateforme de recrutement pour des djihadistes. Twitter va encore plus loin car le site refuse de coopérer avec la police judiciaire. Oui, c'est assez incroyable de le dire mais Twitter ne donne pas suite aux demandes de renseignements de la police sur des tweets antisémites par exemple. Toutefois, si ces deux plateformes sont des hébergeurs, cela doit leur enlever la possibilité de choisir ce qu'elles publient. Elles devraient tout publier, sauf ce qui leur est signalé par la justice ou la police, et dans ce cas supprimer promptement ce qui est porté à leur connaissance.

La menace d'une censure par Facebook et Twitter doit être prise au sérieux. En Pologne, pays qui a fait l'amère expérience de la censure soviétique pendant une cinquantaine d'années, on ne s'y est pas trompé. Un projet de loi sur la liberté d'expression en ligne permettra aux citoyens de porter plainte si l'une de leurs publications est injustement supprimée par un réseau social. Les plateformes qui ne respecteront pas cette liberté de parole paieront 1,8 million d'euros par contenu supprimé. La France doit d'urgence adopter une loi similaire. Elle doit garantir la liberté d'expression de ses citoyens sur les réseaux sociaux. Si lesdits citoyens dépassent les bornes, ce sera aux tribunaux de trancher. Pas à des plateformes illégitimes.

La liberté s'applique aussi à Facebook et Twitter. Si ces plateformes veulent choisir ce qu'elles publient, c'est leur bon droit. Dans ce cas, elles devront abandonner leur statut d'hébergeur et adopter celui de média. Elles pourront alors choisir à qui elles donnent la parole. Mais, elles devront accepter la responsabilité ex-ante des contenus qu'elles diffusent, comme tous les médias. Un journal comme L'Humanité par exemple, choisit de ne pas donner la parole au directeur général du FMI, il en a parfaitement le droit. Mais si ce même journal publie un propos antisémite, il sera condamné, en son nom. On ne peut pas à la fois se prétendre hébergeur pour s'exonérer de toute responsabilité dans les horreurs qu'on publie (et Facebook comme Twitter en sont remplis) et choisir à qui on donne la parole comme si on était un média.