Buzzfeed : la nouvelle pépite du Web qui veut ringardiser les médias

Buzzfeed : la nouvelle pépite du Web qui veut ringardiser les médias Le spécialiste des contenus viraux veut devenir un acteur majeur du monde des médias et compte bien supplanter une presse traditionnelle qu'il juge dépassée.

Le site américain d'informations nouvelle génération, Buzzfeed, a de l'ambition et le fait savoir. Celui qui a construit son succès sur fond de "listes" et GIF animés, en bref des aspirateurs à clics dotés d'un très fort potentiel viral, ambitionne ni plus de moins que de devenir " l'un des plus gros sites du Net d'ici l'année prochain". C'est son fondateur et PDG, Jonah Peretti qui le revendique dans une note publiée sur LinkedIn où il fait le point sur la situation de la société et détaille ses projets pour faire encore mieux. Outre cette promesse, il annonce, en vrac, un trafic de 85 millions de visiteurs uniques en août (Comscore n'en comptabilise toutefois "que" 31,9 millions pour le mois de juillet),  une application pour iPhone solidement installée dans le top 5 de sa catégorie et une chaîne Youtube qui diffuse près 50 millions de vidéos chaque mois. La raison du succès ? Une stratégie de publication qui s'articule autour d'un algorithme qui permet aux équipes d'identifier les sujets qui buzzent, en partant du constat qu'un changement de paradigme s'est opéré dans la recherche de l'information. "Nous sommes passés de l'âge de la recherche en ligne à celui du partage en ligne", expliquait ainsi Jonah Peretti lors du festival tech d'Austin, SXSW. 

La frontière entre l'éditorial et la technologie devient ténue

C'est en rendant la frontière entre technologie et éditorial plus ténue que Buzzfeed a su construire ce succès d'audience fulgurant. Sans pour autant oublier d'être rentable. Là où les groupes médias traditionnels sont souvent obligés de recourir à un mécène où à des aides gouvernementales pour éponger leurs dettes, le site américain est passé en moins de quatre ans du statut de petite start-up à celui d'entreprise de plus de 300 employés tout en étant bénéficiaire. Avec à la clé près de 700 campagnes qui seront réalisées lors de la seule année 2013 et une promesse publicitaire qui détonne.

Le porte-étendard du native advertising

"100% de nos revenus viennent de social content marketing. Car je déteste les bannières. Nous utilisons la même technologie et les données analytiques dont nous nous servons pour nos contenus, pour des marques.", précisait encore Jonah Peretti lors de SXSW. Ainsi cette campagne pour le compte de la Fiat 500L se décline-t-elle dans un article qui recense les "14 raisons d'être redevable à l'égard de l'Italie" dans une page où l'on retrouve les fils Facebook et Twitter de Fiat USA. Un modus operandi baptisé native advertising (lire l'article, Native advertising : buzzword mort-né ou nouveau concept révolutionnaire ?, du 09/09/2013) dont Buzzfeed est l'un des principaux porte-étendards. 

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Le native advertising pour Fiat. © Capture d'écran Buzzfeed

Celui qui se présente comme un trait d'union entre les contenus UGC qui pullulent sur les réseaux sociaux et des groupes médias dépassés par le phénomène veut pousser la logique encore plus loin. "Les contenus réalisés par les internautes ne suffisent pas à combler le vide laissé par les médias traditionnels en déclin', explique Jonah Peretti en égrenant une liste, forcément, de ses axes clés de développement. Parmi eux, l'investigation (il a déjà recruté des pointures telles que l'ancien rédacteur en chef de Spin et l'ancienne rédactrice en chef adjointe de l'actu du New York Times), la vidéo, le mobile, l'international et la publicité. Rien de fondamentalement disruptif donc, ces créneaux étant déjà clairement identifiés par l'ensemble du marché comme stratégiques. Mais lui semble déterminé à pousser la logique sociale encore plus loin. "Nous allons développer nos partenariats avec Facebook et Twitter pour faire de l'achat d'espace au-delà de BuzzFeed et nous allons développer nos pages sociales pour faire de la publicité sociale sur tout le Web", explique-t-il. Pour y arriver il pourra s'appuyer sur les près de 20 millions de dollars qu'il a levés fin 2012 auprès d'actionnaires historiques tels que RRE Ventures, Hearst Interactive Media, SoftBank, Lerer Ventures et les frères Lazerow, cofondateurs de Buddy Media.

S'inspirer de l'exemple du Huffington Post

Conscient qu'il ne s'agit pas de grandir pour grandir, il se refuse toutefois à céder à la tentation de se diversifier dans des domaines trop éloignés de son cœur de métier. Pas de déclinaison télévisuelle ou radiophonique, de création de sites en marque blanche ou de réseau social en vue. Il préfère laisser le premier aux groupes médias, les autres aux sociétés technologiques. Jonah Peretti espère faire sans doute aussi bien que le Huffington Post, autre pure-player moqué à ses débuts pour son positionnement "infotainment", vendu à AOL pour 315 millions de dollars et vainqueur d'un Pulitzer grâce à un reportage sur le retour à la vie normale des vétérans de l'armée.