Forex, CFD, options binaires : protéger les particuliers en professionnalisant la filière

Produits financiers à hauts risques, démarchages prégnants, mythe du trader solitaire, appât du gain facile, régulation faillible... Autant de facteurs réunis pour faciliter l'arnaque des particuliers. Avec le projet de loi Sapin II en cours, peut-on espérer une nouvelle orientation de la filière du Forex, CFD et options binaires ?

Une récente étude de l'Autorité des Marchés Financiers (AMF), coordonnée par le CSA, vient de tirer la sonnette d'alarme sur la pratique du trading avec des produits financiers hautement toxiques. Les principaux instruments visés ? L'investissement sur le Forex, marché de gré à gré très spéculatif, les CFD (Contrats financiers pour Différences), présentant un effet "levier" trop conséquent, et enfin très décrié les options binaires qui permettent de spéculer sur une courte durée (1 minute par exemple !) sur l'évolution d'un indice (sous-jacent) avec le risque de perdre l'intégralité de son capital initial. Deux faits sont désormais établis officiellement : un Français sur cinq a déjà été sollicité pour investir dans ce type de produits et plus de 90% des clients qui se sont risqués dans le Forex et le CFD étaient perdants.
Face à ce triste constat, le projet de loi Sapin II, ou "loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique", projette de prohiber la publicité électronique des produits à risque par des prestataires proposant un service d’investissement en France. Comment appréhender la mise en place de ce texte de loi ?


Coup de pied dans la fourmilière du trading en ligne
En réaction à ce projet de loi et pour se différencier des courtiers "scrupuleux" israélo-chypriotes, l’AFCoPSI (Association Française des Courtiers et Prestataires de Services d’Investissement) vient tout juste de se constituer pour défendre les courtiers régulés par l'AMF et localisés physiquement en France. Les cinq sociétés regroupées sont : IG, FXCM, CMC Markets, XTB et WH SELFINVEST. En effet, dans la nébuleuse du trading sur CFD, Forex et options binaires, des courtiers basés à Chypre profitent d'une faille de la filière. Ils bénéficient du MiFID (Passeport européen) mais ne sont pas sous l'autorité de l'AMF.

Ces courtiers sous pavillon chypriote utilisent des techniques commerciales abusives et contraires aux intérêts de leurs clients. Le modèle économique étant basé sur la perte de leur client, les commerciaux de ces courtiers le plus souvent basés en Israël utilisent une forme de manipulation psychologique en abusant de la confiance de particuliers non-initiés aux pratiques du trading. Avec l'interdiction de la publicité de la loi Sapin II, les courtiers de l'AFCoPSI craignent que les particuliers-investisseurs soient inondés par les publicités des prestataires illégaux. Sans attendre et pour combler cette faille inhérente au projet de loi, le rapporteur a proposé de généraliser l'interdiction à quiconque. Même si la loi Sapin II demande encore à évoluer et que chacune des parties prenantes - investisseurs et courtiers régulés en France - tente de tirer son épingle du jeu, espérons que cette première initiative gouvernementale française influencera les directives européennes à venir sur le sujet.


Cependant et indépendamment de la régulation par l'AMF, je pense que la spéculation sur CFD, Forex et options binaires n'a aucun intérêt à être proposée aux particuliers.

Réfléchir sur le rôle sociétal de ces investissements à risques
Selon l'étude CSA de l'AMF, l'arnaque à l'investissement n'est plus à démontrer : depuis 2008, 4,5 milliards d'euros ont été perdus par les personnes ayant investi sur ces produits d'investissement. 50% d'entre eux ont perdu moins de 1 000 euros, 20% de 1 000 à 10 000 euros et 6% de 10 000 à 50 000 euros.
Dans 80% des cas, les préjudices sont : la non-perception des rémunérations attendues, le manque d'informations sur les risques encourus et, enfin, la perte de l'épargne. Dans ce contexte, nous pouvons nous interroger sur l'utilité sociétale d'un tel service financier. D'un côté, nous estimons la part des particuliers investisseurs à 30 000 et de l'autre, une centaine de salariés seulement travaillant en France pour six sociétés de courtage. Exit l'idée que ces produits d'investissement créent de l'emploi et favorisent la richesse de notre pays ! Pour rendre équitable la partie, je propose tout simplement l'interdiction immédiate des options binaires et que l’investissement sur Forex et CFD, produits structurés et complexes, soient uniquement autorisé pour des professionnels habilités à gérer les comptes de clients investisseurs. Et répondant, pour le coup, à une vraie stratégie de trading patrimoniale où le particulier ne supporte pas 100% des risques. Il est temps de revenir à la réalité et d’accepter que ces produits soient considérés par le grand public comme nuisibles, une première étape pour viser également les produits dérivés (tracker, warrant, turbo), tout aussi dangereux, proposés cette fois-ci par les banques.