Logiciels collaboratifs : des gains de productivité aux gains de créativité

Multiplier la quantité d'informations disponibles et savoir l'analyser sont des enjeux immenses pour les entreprises, et les technologies collaboratives constituent une part importante de cette stratégie.

Depuis la création de la catégorie "collaborative software", les éditeurs se battent sur un seul créneau: les gains de productivité. Les logiciels de gestion de projets et les wikis optimisent les process de l'entreprise, les réseaux sociaux d'entreprise fluidifient la communication entre les équipes et les solutions de conferencing rapprochent les collaborateurs. C'est une avancée majeure pour les entreprises mais ce n'est qu'une première étape.

Les données sont au centre des préoccupations des entreprises

90% de l'information disponible dans le monde aujourd'hui a été créée durant les 24 derniers mois. Depuis le succès des logiciels collaboratifs dans les années 2000, chaque document, chaque application est capable de fournir des informations en temps réel sur les ventes, les leads générés par le marketing, la résolution de bugs, l'efficacité des process ou encore la satisfaction client. Outre la généralisation des objets connectés qui fournissent également un grand nombre de données, des entreprises comme Tellmeplus permettent même aux machines et aux pièces industrielles d'envoyer des informations en temps réel sans être connectés à internet.

Multiplier la quantité d'informations disponibles et savoir l'analyser sont des enjeux immenses pour les entreprises, et les technologies collaboratives constituent une part importante de cette stratégie.

Mais bizarrement, une source d'informations a été négligée dans les entreprises, il s'agit pourtant de la plus importante: les Hommes. Ils ont des idées, des craintes, des envies, des feedbacks, des besoins mais leur cerveau n'est pas (encore) connecté à internet et ils n'envoient pas toute cette information en temps réel sur un dashboard.

Depuis de nombreuses années, cette information reste cachée dans la plupart des organisations. C'est aussi le rôle de la technologie d'aider les hommes et les femmes qui travaillent dans les entreprises à partager ce genre d'informations parce qu'aujourd'hui ils n'osent pas ou n'ont pas l'occasion de le faire.

Identifier ce qui est caché

Les technologies actuelles permettent pourtant à chacun de s'exprimer librement. Les smartphones, les tablettes, les réseaux sociaux sont autant de moyens efficaces pour libérer la parole et l'expression libre. 

Pour la première fois, un grand nombre de personnes peuvent s'exprimer de manière anonyme ou pas en très peu de temps. Ils peuvent réagir sur les idées des autres, ils peuvent rebondir, commenter, préciser et finalement laisser vivre leurs idées et leurs opinions sur des projets, des politiques mises en place, des process etc.

C'est bien d'être alerté en temps réel lorsqu'un serveur tombe, lorsqu'un un deal est signé ou lorsqu'un visiteur n'a pas payé son panier mais imaginez être capable d'identifier les nouvelles idées, les freins, les peurs ou la motivation des équipes à tout moment?

Cela permettrait non seulement d'aboutir à des décisions plus réfléchies et à des solutions plus complètes sur chacun des projets d'une entreprise mais aussi d'engager les collaborateurs, facilitant ainsi la réalisation de ces mêmes projets.

Distinguer le temps asynchrone du temps synchrone

La quasi-totalité des applications collaboratives aujourd'hui se concentre sur le temps "asynchrone" (gestion de projet, partage de documents, réseaux sociaux d'entreprise...). Chaque collaborateur, chaque équipe suit son propre rythme, ses propres projets et la problématique est donc d'aligner les différents process pour que les collaborateurs travaillent comme un seul homme créant, là encore, de forts gains de productivité. C'est l'une des propositions de valeur forte de ces logiciels collaboratifs asynchrones pour les entreprises.

Certaines startups, comme Officevibe, se sont d'ailleurs lancé dans la collecte d' "informations humaines" de manière asynchrone. Ces services interrogent les collaborateurs au quotidien pour extraire des informations actionnables (motivation, obstacles, questions...) pour les managers.

Mais la vie d'une entreprise est marquée par des moments "synchrones" où les forces vives d'un projet, d'un département ou de toute l'entreprise sont regroupées. Réunions, séminaires, stand-up meetings, brainstorms, kick-off... ces formats collaboratifs ont été créés à l'origine dans un souci de productivité et d'alignement autour de process communs. Mais on l'a vu, ce rôle est maintenant très bien rempli par les logiciels collaboratifs asynchrones.

Aucun d'entre nous n'est plus intelligent que l'ensemble d'entre nous

Tim Gowers, médaille Fields de mathématique, a un jour proposé sur son blog de mener un raisonnement collaboratif afin de parvenir à démontrer une conjecture sur les nombres premiers. Le projet a été un succès, de nombreuses contributions ont permis de faire avancer la démonstration et ont donné lieu à une publication sur le sujet. Suite à cette expérience, Tim Gowers a lancé Polymath, une plateforme qui permet aux mathématiciens de collaborer pour trouver une solution à un problème.

Ce type d'expérience convient parfaitement au monde de l'entreprise où le travail en groupe est très répandu mais trop souvent mal encadré. L'intelligence collective n'est pas fondée sur une somme d'individualités mais plutôt sur une discipline et une méthode. Une étude publiée en 2010 dans la revue "Science" par des chercheurs du MIT a montré que le quotient intellectuel d'un groupe n'est pas déterminé par les quotients intellectuels des membres du groupe mais par le nombre de femmes qui composent le groupe ! Oubliez toute justification génétique vaseuse, il semblerait que ce phénomène s'explique simplement par la meilleure capacité des femmes à écouter et à laisser parler les autres membres du groupe.

Capacité d'écoute ne veut pas dire timidité ou manque de leadership, il est fondamental que chacun des membres du groupe n'hésite pas à apporter sa subjectivité et son opinion propre pour éviter le "moutonnisme".

Vers des gains de créativité

Maintenant que les réseaux sociaux d'entreprise et les logiciels de gestion de projet se sont imposés dans les entreprises, il est dommage que les moments de rassemblement, de "réunion" ne soient pas des moments de stimulation de l'intelligence collective.

Les logiciels collaboratifs "synchrones" permettent d'établir une discipline dans les échanges (tout le monde peut s'exprimer en même temps sans déranger celui qui parle) et garantissent un maximum de subjectivité notamment grâce aux échanges anonymes.

Le gain potentiel pour les entreprises est triple:

  • aboutir à des solutions ou des décisions plus riches et plus complètes issues d'une réflexion de groupe. Même les informations les plus "cachées", les craintes, les doutes, les leviers de motivation des équipes peuvent émerger grâce à ces formats collaboratifs nouveaux.
  • impliquer l'ensemble des membres d'une équipe, d'un projet ou même d'une entreprise dans le processus
  • faciliter la mise en application de ces décisions/solutions portée par un sentiment d'appartenance plus fort de la part des membres du groupe.

Ce nouveau type de logiciels, à la frontière entre le contact humain et le digital, la parole et les écrans, sont un accès direct et concret à l'intelligence collective des organisations.

Rassembler ses collaborateurs pour une présentation, un séminaire ou une simple réunion est une occasion trop belle de les impliquer, d'anticiper les problèmes éventuels et de faire émerger de nouvelles propositions pour réduire ce moment à quelques slides sur un Power-Point.

L'enjeu n'est plus de gagner en productivité en combattant la réunionnite ou les problèmes d'organisation mais de développer l'implication et la créativité des équipes à grande échelle.