Big data de santé : une nouvelle ère s'ouvre !

Tous les jours les patients utilisent internet et les réseaux sociaux pour parler de leur maladie. Il est indispensable de réussir à compiler et analyser cette masse de données non structurées pour améliorer les prises en charge.

L’an dernier à la même époque je vous parlais d’une table ronde organisée par le Festival de la Communication Santé dans les murs de l’Université d’été de la esanté. Cette session consacrée à la donnée et à son utilisation en santé dans le cadre d’études en vie réelle avait tenu toutes ses promesses.

Il faut dire que le sujet est particulièrement sensible et important pour juger de l’efficacité d’un médicament ou d’une molécule une fois que celle-ci est sur le marché sur un échantillon mondial, plutôt qu’avant commercialisation dans le cadre malgré tout restreint d’une étude clinique. Cette année un nouveau cap est franchi pour aller plus loin dans l’exploration du big data en santé au service des patients avec des datas bien plus difficiles à capter et à comprendre...

En effet, chaque jour les patients utilisent le web pour effectuer des recherches sur leurs pathologies ou sur leurs symptômes du moment. Chaque jour des centaines de patients prennent la parole, sur les réseaux sociaux par exemple, pour échanger sur leurs maladies et leur état de forme du jour. Toutes ces données sont très intéressantes pour étudier le comportement des patients dans leur “vraie vie”, sans filtre.

Mais tout cela est assez compliqué à compiler et à exploiter. C’est d’ailleurs un défi majeur pour tous les data scientists qui travaillent dans la santé mais aussi dans le marketing. Et ce depuis de nombreuses années déjà. Comment réussir à exploiter ces milliards de données non structurées (et même déstructurées pour certaines) pour les faire entrer dans des algorithmes et bientôt de l’intelligence artificielle à des fins de traitement ?

La voix patient, nouveaux enjeux incontournables

Christian Andreo, Directeur Général adjoint de AIDES nous en dit plus sur l’importance de cette prise en compte de la voix patient au sein de l’association : “Confronter son savoir expérientiel de la maladie à celui académique des soignants. Faire reconnaître celui-ci comme légitime et qu’il soit pris en compte. Tels ont été et sont encore des enjeux fondamentaux pour les personnes vivant avec le VIH et les associations.”

Qui dit données non structurées dit aussi marginalité de la donnée. Le témoignage est produit par un individu avec ses propres mots et son propre ressenti, comme le dit très bien Christian Andreo “on doit également avoir à l’esprit que l’on va aussi produire une information minoritaire, marginale même, mais qui reflète une réalité vécue par quelques personnes qui passent sous le radar des grands indicateurs.”

A ce titre, AIDES a depuis longtemps misé sur le développement des forums de patients comme avec seronet.info : “c’est une mine d’informations mais aussi d’empowerment pour les personnes elles-mêmes qui peinent parfois à être entendues sur leur vécu personnel de la maladie mais aussi, et surtout des traitements.”

Il est temps de passer à une analyse plus complète !

L’Association François Aupetit (afa), qui accompagne les patients atteints de la maladie de Crohn et de MICI est elle aussi en avance sur le sujet. Anne Buisson, Directrice adjointe de l’afa et présente à Castres début juillet pour cette table ronde, replace avec nous le contexte de cette première approche novatrice : “Les forums de l’afa sur Internet existent depuis 2000. Depuis 16 ans, le constat est que les malades sont une source de connaissance possible et complémentaire des autres sources de connaissances, scientifique notamment.”

Les data scientists qui travaillent avec l’afa peuvent se baser sur plus de 24 000 interactions sur les forums de l’association depuis 10 ans. Une mine incroyable de données pour mieux comprendre comment les patients parlent de leur maladie et améliorer ensuite leur suivi. Anne Buisson confirme : “L’enjeu est de capturer cette source de connaissance non structurée pour ensuite la structurer et générer à partir de l’objectivation de cette connaissance, l’amélioration de la qualité́ de vie des patients et de leur prise en charge.”

Une connaissance indispensable pour adapter les outils existants

Ces remontées, une fois structurées, permettent de mettre en place de nouveaux questionnaires pour mieux cibler les attentes et les besoins des patients. Non pas sur quelques entretiens individuels, mais sur 10 ans d’échanges “sans filtres” sur le forum. On imagine bien ce genre de procédés être étendus aux réseaux sociaux qui sont, on le sait, un lieu très important d’échanges sur la santé.

Cette nouvelle ère de la voix patient va permettre des traiter des volumes inédits pour aller encore plus loin dans la compréhension de la vie quotidienne des patients, pour un suivi toujours plus personnalisé et sur mesure. Le big data devient toujours plus complet et intelligent, c’est une très bonne chose pour les professionnels de santé ! Si le sujet vous intéresse, rendez-vous à Castres avec Anne Buisson, Christian Andreo, Sybille Gonzalez Monge et Arslan Mazouni pour une table ronde organisée par le Festival de la Communication Santé et la FNIM avec le très bon Eric Phélippeau pour animer les échanges.