Guide de survie pour les entreprises à l’ère de l’IoT

Sécurité et confidentialité, standardisation, fossé culturel en interne... Malgré le potentiel qu’il revêt, l’IoT a encore quelques défis à relever pour s’imposer.

Pour beaucoup, l’arrivée de l’Internet des objets (IoT) promet d’être l’une des évolutions technologiques les plus importantes de ces dernières années.  Certains vont jusqu’à parler de quatrième révolution industrielle. De fait c’est une approche susceptible de transformer la façon dont les entreprises pensent la prise de décision, notamment autour de l’amélioration de leurs processus de fabrication.

Le défi majeur de l’IoT réside dans la gestion et le traitement des données. Comme Eric Schmidt (l’ancien PDG de Google) l’a souligné, l’ensemble des communications humaines depuis la nuit des temps jusqu’en 2003, stocké sur format numérique, représenterait cinq milliards de giga octets. Aujourd’hui, c’est ce que notre monde ultra connecté génère en 48h et ce n’est que le début puisque l’adoption de l’IoT va intensifier la génération de données.

L’institut McKinsey Global a récemment estimé que l’Internet des objets pourrait générer entre 4 et 11 000 milliards de dollars de valeur dans le monde d’ici à 2025. Ce chiffre reflète le potentiel IoT des secteurs grand public et professionnel. Dans le secteur industriel, les analystes envisagent de formidables opportunités d’innovation et de transformations grâce à l’IoT. Reste à savoir par où commencer. 

Des opportunités pour tous 

Gartner prévoit que 4,9 milliards d’objets connectés seront en circulation en 2015, soit 30% de plus qu’en 2014, et que le chiffre devrait être de 25 milliards en 2020. Cette tendance sera particulièrement importante dans le secteur Industriel où la possibilité de relier des capteurs en réseau et d’établir des communications entre les machines (M2M, machine-to-machine) va transformer les approches de conception, de production et les capacités de toute la chaine   d’approvisionnement. C’est la rencontre de la technologie de production et de l’IT dont il s’agit, et en même temps, c’est bien plus que ça. L’IoT peut servir de lien entre les PGI (ERP),  la gestion de la chaine d’approvisionnement et les outils gestion de la relation client (CRM). 

Ce ne sont pas non plus que des projections futuristes. Une étude d’IDC révèle que 55% des constructeurs individuels et fabricants évaluent des projets IoT, sont en phase pilote ou même déjà en production. La baisse de prix des capteurs et la plus grande accessibilité aux nouvelles technologies vont continuer d’affecter tous les secteurs industriels.

Dans le monde de la santé, même si l’IoT décolle plus doucement, le potentiel n’en est pas moindre. Certains hôpitaux, par exemple, utilisent déjà des lits intelligents capables de s’ajuster automatiquement à la situation du malade ou d’alerter le personnel infirmier dès qu’un patient se lève. Les wearables les plus avancés ont la capacité de tenir le médecin informé en temps réel sur l’état d’un patient ayant besoin de soins spécifiques.

L’IoT est aussi très prometteur pour le secteur de l’assurance. Quand on pense aux très nombreux équipements grand public compatibles avec l’IoT, on imagine que les assureurs pourront délivrer les services numériques appropriés et conférer un niveau de granularité des données supérieur à leurs modèles traditionnels de modélisation des risques.

Malgré le potentiel qu’il revêt, l’IoT a encore quelques défis à relever pour s’imposer.

Sécurité et confidentialité

La nature même des objets connectés fait que la sécurité est la première question qui vient à l’esprit des entreprises qui se penchent sur le sujet. Entre les récits de hackers prenant  le contrôle d’une voiture connectée et les cas de compromission de webcams et d’appareils électroménagers connectés privés, le grand public se pose déjà les mêmes questions. Dans le monde de l’entreprise, ces perspectives poussent à aborder la gestion du risque de manière plus globale, pas uniquement sous l’angle des attaques extérieures mais également en prenant en compte les utilisateurs internes et le cadre général d’implémentation.

Udo Helmbrecht, directeur exécutif de l’Agence européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l'information, l’Enisa, déclare : « Je peux d’ores et déjà prédire que l’on sera confronté à des applications insuffisamment sécurisées créées par du personnel inexpérimenté. Statistiquement, il est certain qu’on entendra parler de nouvelles menaces… Les capteurs de l’Internet des objets sont très accessibles financièrement. On peut acheter des capteurs et des processeurs pour quelques euros et les assembler soi-même… On assiste à l’émergence d’un Internet des objets « do-it-yourself », dans lequel personne ne se soucie vraiment des problématiques de sécurité IT. »

La sûreté aussi s’interroge. Les usines hésitent à adopter des processus M2M pilotés par l’IoT faute d’être certaines de prévoir la fiabilité du fonctionnement de ces systèmes une fois qu’ils seront entièrement automatisés. Ces interrogations reflètent la suspicion générale vis-à-vis de la robotique et plus largement de l’utilisation massive de la technologie sur le lieu de travail. Kevin Ashton, directeur du centre Auto-ID du MIT, estime que la question ne devrait pas tant porter sur la fiabilité des machines mais qu’on devrait plutôt se demander : « Les voitures pilotées par des êtres humains sont-elles sûres ? La réponse est non. » Plus de 3000 personnes sont tuées dans des accidents de la route chaque jour dans le monde selon l’ASIRT (Association for Safe International Road Travel ) et dans la plupart des cas c’est une erreur humaine qui a provoqué l’accident. »

Standardisation 

Les aspects de standardisation et d’interopérabilité conditionnent souvent le développement d’une technologie et seront un des enjeux majeur pour la réussite de l’IoT.  Les organismes de normalisation et les consortiums sont importants, mais beaucoup craignent qu’il soit difficile pour les entreprises de s’accorder sur des règles et des paramètres communs. Une approche de concertation qui suive la philosophie du « travailler ensemble » (« better together ») est ce qu’il manque à l’IoT pour accélérer son adoption.  

C’est l’ambition de l’Open Fog Consortium qui réunit Dell, ARM, Cisco, Intel, Microsoft et le « Edge Laboratory » de l’Université de Princeton au sein d’un objectif commun : réduire le délai de production de solutions IoT par le développement d’une architecture ouverte.

D’autres consortiums s’attaquent aux problèmes de standardisation de l’IoT sous d’autres angles : l’Industrial Internet Consortium (IIC) est un groupe spécialisé dans les applications spécifiques des segments de marché industriels, comme le transport, le pétrole et le gaz, l’automatisation industrielle, la fabrication, etc. l’Open Interconnect Consortium (OIC), soutient l’interopérabilité des standards existants des réseaux. Enfin, le Thread Group a été créé pour rechercher la meilleure façon de connecter et contrôler les produits destinés aux particuliers et aux PME.

Ce ne sont que quelques-uns des groupes qui œuvrent en faveur de la standardisation, et de nouveaux émergent régulièrement, déterminés à accélérer le changement et à encourager l’adoption.

Cependant, malgré ces efforts soutenus, il faudra plusieurs années avant que les standards soient approuvés et adoptés, à tel point que les organisations qui préfèrent attendre et différer leur projet IoT risquent de se faire distancer.

Combler le fossé culturel en interne

L’autre défi à relever pour la réussite des projets d’IoT est culturel. L’IoT suppose que des liens soient créés entre les équipes IT et les équipes opérationnelles en charge de la technologie (d’ingénierie, de fabrication, de gestion des installations) pour créer une plateforme commune et accorder leurs approches et leurs contraintes.

En général on constate que c’est l’opérationnel qui est à l’initiative des projets IoT. L’IT devrait y participer davantage à l’avenir mais pour le moment des interrogations subsistent sur la fluidité technique, le manque de sécurité et les défauts de cohérence de l’architecture. Dans le cadre de notre collaboration avec des partenaires et des utilisateurs finaux lors du développement de notre « Edge Gateway », nous avons compris que l’un des rôles que nous devrions assumer en soutien de l’IoT est celui de médiateur entre les opérationnels et l’IT. Aux équipes IT, nous aimerions dire : l’IoT fait entrer l’IT dans l’opérationnel, acceptez cette situation et voyez-y un nouveau challenge et une opportunité. Aux équipes opérationnelles : le fait d’ajouter une adresse IP à un dispositif suffit à justifier qu’il soit placé sous la responsabilité du service IT qui devient nécessairement partie prenante.

Par où commencer ?

A ce stade, la meilleure pratique possible est de commencer petit en érigeant la sécurité comme priorité et en ayant l’analytique à l’esprit pour guider les choix d’architecture. L’expérimentation est un passage obligé pour comprendre et envisager ce qu’il est possible de faire avec l’IoT. 

Comme pour n’importe quel investissement dans la technologie, le retour sur investissement de l’IoT ne doit pas être laissé au hasard. Mesurez la réussite de vos projets et reliez l’estimation de vos investissements IoT à des considérations de business plus larges, comme l’amélioration de la qualité des produits, la diminution des retours de la part des clients ou la création de nouveaux potentiels de recettes. 

  • Pour les produits connectés et sous forme de service (Product-as-a service), demandez-vous dans quelle mesure les informations de capteurs, les données de positionnement géographique ou la connectivité peut transformer votre modèle de produit et le rendre innovant et envisagez ceci sous l’angle de la réalisation, de la conception du produit connecté, de sa fabrication et de sa maintenance.
  • Demandez-vous dans quelles ressources et compétences vous allez devoir investir pour que votre projet d’implémentation de l’IoT soit réussi. Il ne s’agit pas uniquement de technologies établies, comme celles des réseaux, de l’administration de l’infrastructure et de la sécurité, mais aussi de nouveaux domaines, dont ceux du Big Data, des technologies mobiles et analytiques, et du Cloud.
  • Vous vous souvenez le casse-tête de la mise en œuvre de systèmes ERP, SCM et CRM disparates qu’il fallait faire communiquer entre eux ? Et bien dans le monde de l’IoT, l’intégration peut être aussi délicate et il vaut mieux s’en préoccuper dès la phase de planification et faire l’effort de comprendre la marche à suivre.
  • Sélectionnez un partenaire expérimenté qui maîtrise parfaitement les subtilités de l’IoT, et qui a aussi une feuille de route pour vous accompagner. En effet, les futures innovations de la technologie font que le projet d’implémentation n’a rien de ponctuel et définitif, il va s’inscrire dans la durée et cette évolution transformative appelle à s’adjoindre les services d’un partenaire qui a une vision à long terme de la technologie.

Nous sommes sur le point de vivre une période d’innovation technologique majeure qui induira des changements radicaux pour les entreprises de toute taille. L’IoT va transformer la vision qu’ont les entreprises de leurs processus quotidiens et vont jusqu’à remettre en question des éléments rationnels. La capacité avec laquelle votre entreprise saura s’adapter, innover et prospérer en cette période ambitieuse départagera les leaders des autres. Il n’y aura pas d’autre choix que d’innover ou mourir. 

Selon McKinsey ces technologies de transformation exerceront leur influence sur l’économie en 2025, il sera alors trop tard pour les entreprises de se préparer à réagir. Nul ne peut se permettre d’arriver dernier.