Comment Orange Business Services veut devenir un leader du big data

Comment Orange Business Services veut devenir un leader du big data Rachat de Business & Decision, Hadoop as a Service, offre Datavenue… L'ESN constitue brique par brique une offre complète, depuis la collecte des données jusqu'à leur analyse.

Bonne nouvelle pour Orange : Business & Decision renoue avec la rentabilité. Au premier semestre 2017, l'entreprise de services du numérique (ESN) affiche un résultat opérationnel courant de 2,8 millions d'euros contre une perte d'un million un an plus tôt sur la première période. Fruit d'une importante restructuration et de cession d'actifs aux Etats-Unis, cette rentabilité retrouvée devrait conforter le choix d'Orange d'acquérir cette société française - avec laquelle l'opérateur télécoms est entré en négociation exclusive en mai dernier.

Spécialiste de la data sous toutes ses formes - business intelligence, big data, CRM - Business & Decision (B&D) est un groupe de 2 500 personnes, coté sur Euronext. Présent dans 12 pays, il a réalisé un chiffre d'affaires de 227,6 millions d'euros l'an dernier. Si l'opération se réalise, Orange augmenterait ainsi significativement la part des services applicatifs dans le chiffre d'affaires de sa filiale Orange Business Services (OBS). Dans le cadre de son plan stratégique Essentiels 2020 (dévoilé en 2015), l'opérateur se fixait comme objectif "de faire croitre de 10 points la part des services IT dans le mix de revenus d'Orange Business Services d'ici 2020."

Business & Decision, un rachat qui fait sens

Pour Olivier Rafal, analyste et consultant au sein du cabinet PAC - CXP, l'acquisition de B&D fait sens. "Si OBS est devenu un prestataire de services très important, notamment sur la partie infrastructure, il reste loin derrière sur le marché des services applicatifs", constate l'expert. OBS se situe à la cinquième place du classement global des ESN en France établi par PAC sur la base de leur chiffre d'affaires 2016. En revanche, elle ne figure pas dans le top 20 de son palmarès plus spécifique des services applicatifs.

"Nous souhaitons couvrir toute la chaine de la donnée"

Sur ce terrain, Orange Business Services a déjà procédé à plusieurs acquisitions par le passé. Il a notamment racheté Alsy (un intégrateur en solutions Microsoft) en 2010, Ocean (dans la gestion de flottes de véhicules) en 2015 ou encore Lexsi (un cabinet de conseil en cybersécurité) en 2016. Mais la reprise de B&D viendrait renforcer son expertise sur un marché particulièrement porteur. Celui de la data, un élément clé de toute transformation numérique. Si OBS possède déjà une division dédiée à ce domaine stratégique avec Orange Applications for Business (OAB), qui recouvre digital, analytics, IoT, B&D viendrait idéalement la compléter. Les deux structures sont de taille comparable mais le barycentre d'OAB se situe en France alors que B&D bénéficie d'une forte présence à l'international - avec 40% de ses effectifs hors de l'Hexagone.

 Les marchés adressés par les deux structures différent aussi. OBS est bien présent sur les segments de l'automobile, de l'industrie et de la smart city. B&D, lui, se positionne sur d'autres verticales comme la banque ou la distribution. B&D apporterait également à l'opérateur un modèle d'intégration applicative en mode projet. Marque bien identifiée, Business & Decision devrait conserver son nom.

De la collecte au traitement en masse

Cette montée en puissance dans les services vient surtout compléter la stratégie big data d'Orange. Comme l'explique le directeur des solutions IoT et analytics d'OBS, l'opérateur entend couvrir toute la chaîne de la donnée. "Il s'agit tout d'abord de collecter la donnée auprès de différentes sources puis de la transporter. Il faut ensuite assurer son traitement dans le cloud, le tout dans un environnement sécurisé. Enfin, la dernière étape, c'est l'analyse. Comment créer de la valeur business en optimisant les process ou en enrichissant l'expérience client", égraine Olivier Ondet. Le rachat de B&D porte sur cette dernière étape, celle de l'analyse de données.

Olivier Ondet est le directeur des solutions IoT et analytics d'OBS. © Orange

Pour couvrir les autres étapes, Orange fait feu de tout bois. Côté collecte des données, l'opérateur fait le forcing dans l'internet des objets. Un segment qui doit représenter 600 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2020, selon l'objectif fixé par son PDG, Stéphane Richard. OBS gère déjà 14 millions objets connectés, contre 10 millions l'an dernier. En juin, l'opérateur publiait un catalogue de 75 objets connectés pour le monde professionnel, testés et validés par ses soins.

En ce qui concerne le transport des données, Orange dispose évidemment de sa propre infrastructure. Il déploiement aussi un réseau LoRa, bas débit optimisé pour l'IoT, dont la couverture nationale doit s'achever d'ici la fin de l'année.

Pour la partie traitement des donnée, Orange peut s'appuyer sur Cloudwatt repris il y a deux ans. Depuis 2015, le cloud souverain propose une offre d'Hadoop as a Service. Un orchestrateur lui permet de configurer et démarrer ses clusters de calcul "en dix minutes", affirme le prestataire. Pour se faire, Cloudwatt propose les distributions Hadoop les plus populaires (Cloudera, MapR, Hortonworks…).

Une offre big data as a service

Toujours en 2015, Cloudwatt lançait avec Micropole (une ESN concurrente de Business & Decision), la couche applicative qui se positionne au-dessus de cette infrastructure Hadoop as a Service. Une solution en mode SaaS, baptisée Big Data 24, qui gère exploration de données, visualisation ou analyse prédictive. Cette plateforme de data science comme le présente Micropole, doit permettre aux entreprises de mener des expérimentations de type big data sans se soucier de la technologie sous-jacente. Basée sur un abonnement mensuel, la tarification dépend du volume de données selon quatre formules de 100 Go à 1 To.

C'est encore en 2015 qu'Orange déployait son offre Datavenue en France, puis à l'international l'année suivante. Elle se compose de deux produits. Proche de la philosophie de Big Data 24, le premier (Flexible Data) est une solution "as a service" taillée pour valider l'intérêt d'un projet big data avant de le déployer. A ceci près que Flexibe Data associe cloud et analytics mais aussi IoT. Elle assure la collecte des données depuis un site web, les réseaux sociaux ou encore des robots, des capteurs et tout autre objet connecté. Flexibe Data procède ensuite à leur stockage et à leur l'analyse via toute une panoplie de technologies open source (Zeppelin, Superset, Presto, Mesos, Consul, Ansible, Nifi, Kafka, Spark, Thrift Server).

La seconde brique de Datavenue, baptisée Flux Vision, réalise des mesures de fréquentation de zones d'activité en se basant sur les données techniques anonymisées issues du réseau mobile Orange. Elle fournit aux collectivités locales, aux professionnels du tourisme et des transports des indicateurs statistiques sur la provenance et les déplacements de population sur un espace géographique donné. Depuis cette année, Flux Vision est disponible en version "indoor". Orange utilise son réseau de téléphonie mobile mais aussi les données wifi pour mesurer les flux de population dans des lieux fermés comme des centres commerciaux ou des salles de spectacles.