Comment Oui.sncf propulse son bot sur Google Home, Alexa ou Messenger

Comment Oui.sncf propulse son bot sur Google Home, Alexa ou Messenger A la fois vocal et textuel, l'assistant conversationnel permet de consulter horaires de train, tarifs et disponibilité des voyages. Il gère déjà les réservations pour certains abonnés.

C'est suite à une première maquette d'application conçue pour Amazon Echo en juin 2016 que Oui.sncf (ex-Voyages-sncf.com) enclenche le développement d'un assistant conversationnel. L'agence de voyages en ligne de la SNCF opte d'emblée pour une orientation différente des chatbots développés jusqu'alors. "Exit la voie d'un FAQ amélioré. Nous avons préféré l'idée d'un service de type transactionnel donnant accès aux horaires et tarifs des trains, voire capable d'aller jusqu'à la réservation", explique Yannick Combourieu, directeur management produit de Oui.sncf. En mode agile, une première application est déployée en octobre de la même année. Lancée sur Messenger, elle permet de rechercher un trajet et poser une option de réservation. Fin 2017, elle est intégrée à Google Home dès la commercialisation de ce dernier en France. De même avec Alexa, l'assistant vocal d'Amazon, lors de son lancement dans l'Hexagone en juin 2018. Dans l'intervalle, le chatbot (désormais baptisé OuiBot) fait son apparition sur la page d'accueil de Oui.sncf.

En coulisses, une équipe d'une dizaine de salariés est mise sur pied pour orchestrer le chantier. Pluridisciplinaire, elle se compose de product owner, développeurs, designers d'interface... Quant à la plateforme technique, elle a été construite en interne. En ligne de mire, la filiale entend conserver la pleine maitrise de ses données. Hébergée depuis peu sur le cloud d'Amazon, la solution met en musique plusieurs librairies open source de NLP (natural language processing), notamment Stanford NLP, Open NLP d'Apache ou encore Duckling de Facebook.

"Nous avons créé une couche d'agrégation qui permet un accès plus facile à ces librairies, une meilleure qualification des phrases et de la contextualisation", détaille Yannick Combourieu. Baptisé The Open Conversation Kit (Tock), elle a d'ailleurs été publiée sous licence Apache 2. "Miser sur l'open source contribue à mutualiser nos efforts et être plus concurrentiels par rapport aux évolutions technologiques des Gafa", argue-t-on chez Oui.sncf. Aux côtés de son moteur de NLP, Tock s'articule autour d'un framework de machine learning intégrant des passerelles vers les différents assistants conversationnels. En parallèle, le kit opère une console graphique pour concevoir les modèles de traitement automatique du langage. L'enjeu : traduire les questions posées par les utilisateurs en requêtes informatiques compréhensibles par les bases de données. "Une demande de voyage peut être formulée de centaines de manières. Cet outil graphique permet à notre équipe conversationnelle d'aider la machine à saisir toutes les nuances, et ainsi d'accompagner le processus d'entrainement du modèle d'IA", complète Yannick Combourieu.

L'assistant OUIbot sur le site de la SNCF © JDN / Capture

L'un des principaux défis du projet ? Bâtir une ergonomie conversationnelle de qualité. "Alors que le vouvoiement est la règle en service client et sur les réseaux sociaux, le tutoiement est plus naturel sur le bot", argue-t-on chez Oui.sncf. Plus complexe à appréhender, la logique d'interaction n'est pas la même sur une messagerie instantanée comme Messenger ou un assistant vocal tel Amazon Echo ou Google Home. Sur Messenger, OuiBot pourra réaliser plusieurs propositions de trajet en poussant jusqu'à 9 vignettes simultanément. "Sur Amazon Echo ou Google Home, c'est impossible. Vocalement, l'utilisateur ne peut pas retenir 9 propositions d'un coup. D'où la nécessité de construire des arbres de dialogue. Si le visiteur souhaite se rendre à Marseille, on commence par lui proposer le trajet qu'on estime le meilleur pour lui. Puis on itère : préfère-t-il partir avant ou après la date indiquée ? Plutôt le matin ou l'après-midi ? Dispose-t-il d'une carte de réduction ?", détaille Yannick Combourieu.

Finalement, trois catégories d'interface utilisateur ont été élaborées : la première purement textuelle et graphique pour Messenger, la seconde uniquement vocale pour Google Home et Amazon Echo, la troisième pour Google Assistant avec la possibilité de combiner vocal et textuel. Pour accéder aux bases de données de Oui.sncf, toutes font appel aux mêmes API que celles utilisées par le site web et ses applications mobiles.

A ce jour, 10 000 visiteurs transitent par le bot quotidiennement, dont plus de la moitié via la version de OuiBot intégrée au site de Oui.sncf. Tous canaux conversationnels confondus, 1 000 options de billets sont posées chaque mois.

"20 000 réservations TGVmax sont réalisées chaque mois"

Pour la suite, Oui.sncf entend faire prendre à son assistant le virage de la réservation. Celle-ci est d'ailleurs déjà proposée aux clients de son service de souscription mensuelle TGVmax à la fois sur Messenger et Google Assistant. Résultat : 20 000 réservations TGVmax sont réalisées chaque mois via ces deux canaux. "C'est une première étape. Le dispositif évite en effet d'avoir à gérer le paiement vocal, les clients ayant déjà réglé par abonnement. Mais à terme, nous souhaitons pouvoir orchestrer la commande en mode conversationnel de bout en bout, jusqu'à la transaction financière", assure Yannick Combourieu. Au-delà du tunnel de réservation, la vision est également d'ouvrir dans le futur l'assistant à l'ensemble des informations présentes sur le site Oui.sncf (informations commerciales, personnalisation des contenus via reconnaissance du compte-client…). "En cela, le projet de bot structure aussi notre démarche d'APIsation", complète Yannick Combourieu. Autre évolution dans les cartons : faire de OuiBot une interface multilingue en vue de le déployer dans les principaux pays européens où Oui.sncf est implanté (Allemand, Espagne, Grande-Bretagne, Italie...).