Fabrice de Biasio (DSI, Europe Airpost) "Nous virtualisons tout notre système d'information"

Serveur, stockage, postes de travail... La deuxième compagnie aérienne française s'est lancée dans un vaste chantier de virtualisation, avec à la clé le déploiement d'un Cloud privé.

Ex-filiale de La Poste, Europe Airpost (anciennement Aéropostale) est la deuxième compagnie aérienne française, après Air France. Avec un chiffre d'affaires annuel de 230 millions d'euros, elle est positionnée à la fois sur le transport de frets et de passagers.
 

JDN Solutions. Quels sont les principaux logiciels métier d'Europe Airpost ?

Fabrice de Biasio. Nous utilisons NetLine de Lufthansa Systems. C'est notre ERP métier. Les logiciels que nous utilisons dans le cadre de notre activité de compagnie aérienne, de la maintenance des avions à la répartition des charges en soute, sont commercialisés par des éditeurs spécialisés, et validés en matière de sécurité par des organismes comme l'Organisation mondiale pour l'aviation civile. 

Vous êtes arrivé en 2008 à la tête d'Europe Airpost. Quelle était votre feuille de route ? 

A mon arrivée, Europe Airpost venait d'être cédé par La Poste au groupe irlandais Air Contractors. Jusque-là, l'informatique de la société était conçue comme un centre de coût dont l'objectif se limitait à la production et au support. Il n'existait pas de DSI. La nouvelle direction souhaitait que le département informatique devienne un centre de profit avec pour vocation d'être innovant. Un poste de DSI que j'occupe depuis a donc été créé, et rattaché directement au comité de direction.  

J'ai hérité d'un empilement de serveurs et d'applications hétérogènes, une salle informatique d'ancienne génération installée dans un ancien bureau sans aucune redondance, et un parc de PC sous Windows NT 4. Ma première tâche a été de réaliser un schéma directeur informatique.
 

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Fabrice de Biasio est le DSI d'Europe Airpost. © Europe Airpost

Quels sont les premiers projets que vous avez mis en œuvre ? 

Nous avons commencé par remettre à plat le réseau qui combinait plusieurs débits différents. Ensuite, un projet de PRA [ndlr Plan de Reprise d'Activité], déjà dans les tuyaux, nous a amené à nous intéresser au datacenter. Nous nous sommes rendu compte qu'un PRA n'était pas une fin en soi. Plutôt que d'investir dans une nouvelle infrastructure physique à froid, mieux valait refondre notre centre de données.

Nous avons décidé de profiter du déménagement de notre siège social de Villepinte vers notre site de fret sur l'aéroport Roissy Charles de Gaulle. La société de services Diademys nous a fait une offre proposant la mise en place de deux salles serveurs redondantes autour de la technologie Datacore, permettant un redémarrage en cas de panne. Et ce pour un coût inférieur à celui du projet de PRA précédemment envisagé.  

Le projet a été bouclé en trois mois, entre juin et septembre 2009, c'est-à-dire pendant la saison la plus forte en termes d'activité. Les deux salles serveurs ont été installées à 800 mètres de distance, et reliées par plusieurs chemins en fibre optique. Ce qui inclut la modification d'un restaurant dans lequel l'un des deux datacenters à été déployé, l'installation des groupes électrogènes, de la climatisation... Mais aussi des baies, et des serveurs. Le tout sans interruption de service. Environ 6 mois de préparation ont été nécessaires pour préparer le chantier. 
 

Quel bilan faites-vous de la refonte de votre infrastructure de datacenter ?

Le résultat correspond à ce qui était présenté au départ. Finalement, nous avons mis en place un Cloud privé. Pour les utilisateurs, l'informatique est dans un nuage. Si l'un des deux datacenters n'est plus accessible, les accès basculent sans interruption de service sur l'autre grâce à la solution Datacore. Dans le même temps, la virtualisation par le biais de VMWare nous permet d'adapter la ressource informatique à l'activité. Depuis 2009, nous sommes passés de 20 serveurs virtualisés dans une baise HP à 80 serveurs virtualisés. Cette consolidation représente une économie d'énergie de plus de 50%.

Au total, j'estime que le coût de notre infrastructure aurait été de 30 à 40% supérieur si nous n'avions pas virtualisé le stockage. D'autant qu'avec une solution type Datacore, nous sommes plus adaptables si nous souhaitons intégrer une autre technologie de stockage, lors d'un rachat par exemple. D'autres acteurs nous proposaient des solutions nous obligeant à être associé à une technologie de stockage. Datacore nous a permis aussi d'améliorer la performance d'exécution des applications métier en accélérant la vitesse des entrées et sorties. Les logiciels sont entre 20 et 30% plus rapide.  

"Nous intégrons des tablettes tactiles dans les tableaux de bord des avions pour dématérialiser les cartes"

Nous avons utilisé notre baie HP historique pour créer début 2010 un troisième salle informatique sur notre site de l'aéroport de Marignane. Cette infrastructure supporte un "mini PRA" [ndlr également piloté par Datacore]. Elle nous permet de disposer de trois systèmes redondants, comme c'est recommandé dans l'aviation. Ce dispositif a pour but de nous prémunir contre les grands virus, les attaques informatiques, ou encore une éventuelle destruction du site de Roissy suite à une catastrophe majeure.

Comptez-vous étendre la virtualisation aux postes de travail ? 

Les premiers postes de travail ont été virtualisés en janvier. Nous utilisons les solutions VMware View et ThinApp. L'objectif est d'aboutir à la virtualisation de l'ensemble des postes fixes d'ici fin 2011. Nous virtualiserons ensuite les ordinateurs portables. Le projet est assez complexe car il nécessite de documenter toutes les applications et la manière dont travail les utilisateurs. Mais, les gains sont importants. Comme pour les serveurs, l'administration est simplifiée. Au lieu de demander de 2 à 8 heures de travail, l'installation d'un nouveau poste de travail peut se faire quasi-instantanément. Les utilisateurs peuvent passer d'un poste à l'autre, et retrouvent l'ensemble de leur environnement, leurs applications, leur paramétrage, et leurs données. Si un ordinateur portable est perdu, ce n'est plus un problème. 

Nous avons également la possibilité de mutualiser le stockage des postes de travail. On ne provisionne que les disques dont on a besoin. Nous envisageons d'ailleurs de passer sur une configuration de poste de travail plus légère, avec de petits disques durs locaux ou une configuration de type Pano.


Ces projets de virtualisation vous ont-il amenés à revoir le périmètre de votre équipe d'administration ?

De deux administrateurs systèmes et réseaux, la DSI ne compte plus qu'une personne dans ce domaine. Nous avons pu d'ailleurs la nommer chef de projet. Elle apporte ainsi désormais une valeur ajoutée aux métiers, tout en étant plus efficace sur l'administration. Côté postes de travail, notre équipe de trois administrateurs peut se réduire à une personne dont le travail sera plus efficace.   

Qu'en est-il de vos principaux projets en matière d'applications métiers ?

Nous avons un projet de datawarehouse sous Oracle, nos progiciels reposant sur cette base de données. Nous déployons Oracle Hyperion pour le reporting de notre contrôle de gestion. Parallèlement, nous optimisons nos services utilisateurs en nous inspirant des bonnes pratiques Itil. En matière de gestion de parc, nous avons en outre rationalisé nos copieurs et imprimantes. De 170 terminaux, nous sommes passés à 57 aujourd'hui.    

Nous avons aussi pour projet de passer à une nouvelle génération d'Electronic Flight Bag. Le nouvel outil d'aide à la navigation proposé aux pilotes et co-pilotes sera intégré aux tableaux de bord des avions. Il s'agira d'un écran tactile qui permettra de visualiser les cartes, et pemettra d'accéder à nos applications. L'objectif est de dématérialiser les 20 kilos de documents cartographiques embarqués dans les avions. 

 
Le système d'information d'Europe Airpost
Source : JDN Solutions
Postes de travail fixes 400 (Windows)
Postes de travail portables 300 (Windows)
Serveurs 80 serveurs virtuels (VMware) sous Windows 2003, Windows 2008, Linux
Stockage Deux baies de stockage IBM (System Storage DS5100), une baie HP, deux contrôleurs DataCore (stockage serveurs et postes de travail).
ERP NetLine de Lufthansa Systems