Comment faire venir les jeunes ingénieurs à l'informatique ?

L'informatique tourne à plein régime, et beaucoup d'entreprises sont freinées dans leur croissance par un manque de ressources. Comment, dès lors, attirer les meilleurs ingénieurs, davantage séduits par la finance ou le nébuleux conseil en management ?

Il y a quelques semaines, je participais à une rencontre école-entreprises à l'Ecole Centrale.  Le principal thème de discussion était l'attractivité des métiers de l'informatique.

On le sait, l'informatique tourne à plein régime, et beaucoup d'entreprises sont freinées dans leur croissance par un manque de ressources. L'informatique française a grand besoin de cerveaux, et a du mal à attirer les meilleurs ingénieurs, séduits davantage par la finance ou le nébuleux 'conseil en management'. 


La question est donc posée :  comment faire venir les jeunes ingénieurs à l'informatique ?     


Certains suggéraient de mieux expliquer aux élèves ingénieurs qu'il ne s'agissait pas de coder, que l'informatique, pour eux, serait avant tout schémas directeurs et management, que les lignes de codes ils en verraient peut être un peu en début de carrière, mais bien vite ce serait l'affaire des autres, des moins qualifiés. Eux seraient des seigneurs, et n'auraient plus à toucher à ces saletés, tout juste verraient-ils parfois un clavier, pour répondre aux e-mails stratégiques du président. 

Je prétends au contraire que le code doit être replacé au coeur de notre métier, et c'est la beauté, la force, le génie, de quelques lignes de codes, qui doit attirer les plus brillants ingénieurs vers l'informatique.

Nous manquons en France de figure emblématique en la matière, de super-héros de l'informatique. Nos champions français, patrons de quelques grandes entreprises, sont avant tout des businessmen, qui ont rencontré le succès dans l'informatique comme ils l'auraient trouvé ailleurs :  en managers, en gestionnaires, éventuellement en stratèges, mais bien rarement en hacker de génie.
 
Pourtant, à l'origine de Microsoft, il y a un programme interpréteur de langage Basic qui tenait dans une ROM de 4 KO, une prouesse de développeur. A l'origine de Google, un algorithme lumineux. A l'origine de Netscape, un programme révolutionnaire, à l'origine de Linux, un développeur de génie. Aux Etats-Unis, le culte du hacker génial existe, nourri par ces réussites vertigineuses.  Et il aide à alimenter cette industrie avec les meilleurs talents d'une génération. Aux Etats-Unis, un étudiant surdoué peut se dire : je serai un programmeur génial et cela me fera milliardaire, je serai un hacker et je changerai le monde.

Certes, les ingénieurs des mines ne rêvent pas tous de manier le piolet, les ingénieurs du BTP ne sont pas tenus d'adorer la truelle. Ces métiers peuvent se contenter de managers qui ne sont pas artisans eux-mêmes parce qu'effectivement un ingénieur brillant, armé d'une truelle, ne fera pas un mur plus réussi. 

Mais un ingénieur brillant, armé d'un clavier, fera des programmes qui changeront le monde. La différence est fondamentale : l'essence de l'informatique est dans les programmes, et les programmes auront toujours un énorme besoin d'intelligence, souvent de génie. Il y a peu de métiers qui offrent à nos neurones une si extraordinaire « pâte à modeler » pour jouer, pour agir, pour créer, une pâte à modeler dont l'essence est le code source, et qui peut tout faire.

La programmation peut être un art et un jeu à la fois et ce n'est pas en reniant la ligne de code que l'on attirera les étudiants vers nos métiers. Il faut pouvoir leur présenter une part de rêve, le rêve d'être à l'origine d'une révolution, d'être un « changeur de monde », selon l'expression du Syntec.

Ce n'est certes pas en étant trader qu'ils changeront le monde. On sait que notre monde économique devient entièrement numérique, et derrière le numérique, quels qu'en soient les domaines d'application, il y a toujours des programmes. C'est cela qu'il faut transmettre aux jeunes ingénieurs : au travers des programmes, ils portent à bout de bras l'économie numérique, c'est-à-dire l'économie.