La crise financière et industrie informatique

Comment la crise financière internationale va-t-elle affecter le secteur informatique en France ? Quels sont les effets prévisibles de cette crise pour les industries du logiciel et des services ? Quelques pistes de réflexion.

Un article récent du New York Time au titre inquiétant de "Specter of Crisis..." finissait en ces termes : "it seems to me  like the industry is still in denial" *.L'industrie en question, vous l'aviez deviné, n'est autre que l'industrie des Technologies de l'Information. Qu'en est-il réellement de ce secteur ? Sommes-nous toujours dans le déni - de crise - pour le secteur IT malgré le climat anxiogène ambiant ?

Il ne fait plus de doute pour personne que les grands groupes bancaires ont déjà donné le tempo en réduisant tous les investissements IT au strict nécessaire et qu'avec en plus, une industrie automobile désormais en panne, l'avenir du secteur IT s'annonce pour le moins nuageux.

- L'industrie logicielle connaît déjà un ralentissement sérieux, et les prochains trimestres pour les grands éditeurs (SAP en tête) ne laissent pas envisager d'amélioration. A cela, il faut rajouter la baisse annoncée (et attendue !) des couts de développement (essentiellement liée à la contraction des taux journaliers et au recours croissant à l'offshoring) ; les grands clients de l'industrie logicielle vont privilégier les solutions développées sur mesure plutôt que de recourir à des logiciels et progiciels au coût de plus en plus faramineux.

Il semble que seules les offres très spécifiques et très modulaires soient en mesure de résister à ce recul.


Le modèle des solutions "on demand", semble en revanche plutôt adapté en cette période de réduction des investissement. Ajustable en fonction des besoins (à la hausse comme à la baisse), il présente un intérêt pour les clients qui disposent désormais d'un levier d'agilité avec ce type d'offres ; d'autre part, il est à noter que le coût des abonnements (on ne parle plus de licences utilisateurs) ne pèse plus de la même manière dans les budgets IT des entreprises utilisatrices.


- L'industrie du conseil et de l'intégration (SSII) va connaître  des temps difficiles, les projets constituant aussi un poste d'économies pour les entreprises.

Déjà, des projets sont gelés et consultants et autres prestataires de services sont "sortis" afin de limiter les sources de dépenses qui ne sont pas jugées indispensables : des équipes entières sont de retour aux sièges des SSII depuis quelques semaines (ce mouvement s'étant amorcé bien avant le crack boursier de septembre)

     - Les grands projets de refonte des SI qui doivent absolument aboutir sont poursuivis, mais avec une plus grande vigilance autour des budgets : ce sont ces projets pluriannuels  - le plus souvent au forfait - pour lesquels les gros intégrateurs dépêchent des équipes fournies d'ingénieurs. Les SSII positionnées sur ces projets traverseront la crise sans trop de difficulté.

     - Par contre, les "big player" du conseil - dont les missions sont plutôt de courte durée, auront plus de mal à résister, même si les entreprises doivent continuer de lancer des missions de GRC (Risk & Compliance), des initiatives de réduction des coûts, des missions d'efficacité opérationnelle ou d'optimisation de la performance.

Les taux de staffing des grandes SSII va sensiblement reculer pour les départements Consulting, alors que leur branche intégration se maintiendra, mais au prix d'un effort sur les prix de ventes journaliers.

     - Les petites SSII sont plus vulnérables à la conjoncture, et les sociétés n'ayant pas de spécificité ou d'expertise particulièrement recherchée, vont avoir du mal à se différencier et donc à résister à la tension qui s'annonce sur les prix.

     - Par contre, les "niche player" (ou acteurs de niche) pourront sortir renforcés de cette crise, à condition qu'ils conservent leur spécificité et gardent une trajectoire claire. Ces "niches player" doivent continuer de recruter des experts et maitriser leurs ratios financiers...


Nous y sommes, "denial" ou pas, l'industrie IT doit prendre conscience, malgré ses effets décalés de la tendance qui s'est amorcée depuis quelques semaines.

Petites ou grandes, les entreprises du secteur doivent s'y préparer sans attendre ...

* " il me semble que notre industrie est encore dans le déni."