Virtualisation des serveurs : le guide du DSI

Un nombre croissant d’entreprises répertoriées au classement Fortune 1000 font appel sous une forme ou sous une autre à la virtualisation. Le point sur les différents atouts qui ont permis à cette technologie de s’imposer.

Il y a cinq ans à peine, la virtualisation, c'est-à-dire l'utilisation de ressources virtuelles et non physiques (serveurs ou mémoires), était considérée comme onéreuse, exotique et complexe. Aujourd'hui, la virtualisation est une technologie à part entière. Selon une enquête menée par le cabinet Forrester Research en 2007, 51 % des entreprises utilisent ou testent cette technologie[1] - une adoption rapide qualifiée de "mégatendance" par de nombreux cabinets d'analystes. De fait, les directeurs des services informatiques qui en ignorent les avantages le font à leurs risques et périls.

En fait, le concept de virtualisation n'a rien de nouveau. Utilisée dans le domaine du stockage des données depuis des années, cette technologie permet aux entreprises de tirer une valeur ajoutée supplémentaire de leurs investissements en maximisant l'utilisation de leurs ressources physiques. Sur le plan informatique, la virtualisation permet à un seul et même ordinateur physique d'exécuter différents systèmes d'exploitation. Au sein d'un environnement virtuel, Microsoft Windows, Sun Solaris, Novell Netware et Linux peuvent ainsi parfaitement cohabiter et fonctionner simultanément.

Selon la définition de Andi Mann du cabinet Enterprise Management Associates, "Avec la virtualisation, une ressource physique unique - un serveur, un système d'exploitation, une application ou un périphérique de stockage - se présente sous la forme de plusieurs ressources logiques. Plusieurs ressources physiques (périphériques de stockage ou serveurs) peuvent aussi se présenter comme une seule ressource logique".[2]

En permettant à un système informatique de gérer simultanément plusieurs applications et systèmes d'exploitation, les responsables de centres informatiques peuvent réduire le nombre de serveurs utilisés et - mieux encore - d'en abaisser les coûts d'administration. Cette approche apporte des avantages significatifs, à savoir une baisse du coût des serveurs, du stockage et des réseaux, une augmentation du rendement énergétique et une meilleure agilité de l'entreprise. La virtualisation a par ailleurs un impact positif sur l'environnement. Le fait qu'un seul et unique système assume la tâche de plusieurs équipements permet de consommer moins d'énergie et de dégager moins de chaleur.

Consolidation des systèmes

La gestion des centres de données se heurte à un problème-clé : les dépenses d'exploitation (coûts d'hébergement, de gestion et d'alimentation électrique des équipements) absorbent trop souvent une partie excessive du budget annuel. Une meilleure utilisation des équipements permet, entre autres, de relever ce défi. Il est couramment admis que de nombreux serveurs utilisés dans des centres de données fonctionnent en sous-régime et que certains serveurs sont loin d'approcher leur capacité opérationnelle maximale.

Dans certains centres de données, l'utilisation des serveurs atteint à peine 5 à 15%. On peut en déduire que 85 à 95% des ressources système ne servent à rien et que les salles des serveurs sont encombrées de machines sous-exploitées et de systèmes de sauvegarde correspondants. La virtualisation permet aux entreprises de gérer leur infrastructure réseau de façon beaucoup plus dynamique en la consolidant au sein d'une unique architecture serveur et en "faisant le ménage" dans le centre de données. En outre, la mise en œuvre d'une stratégie de consolidation de serveurs libèrera le précieux espace que représentent les salles de serveurs, à la clé une baisse des frais immobiliers.

Paramètres administratifs

Dans un environnement virtualisé, le logiciel de virtualisation peut déployer un serveur en s'appuyant sur un gabarit prédéfini et en déplaçant les images du serveur d'un serveur physique vers un autre, éliminant ainsi toute configuration manuelle. Les serveurs peuvent être créés et supprimés en parfaite transparence selon les besoins, ce qui réduit sensiblement les délais de réalisation et limite les besoins en main d'œuvre.

La virtualisation offre aux responsables des centres de données une grande liberté, c'est là un des avantages-clés de cette technologie. En effet, le déploiement d'un serveur virtuel requiert quelques minutes au lieu de plusieurs semaines dans le cas d'un serveur physique. Autre point fort, les machines virtuelles peuvent être déplacées très facilement entre deux serveurs physiques sans subir de panne importante, ce qui minimise les interruptions de fonctionnement et favorise la continuité de service. En outre, les mises à jour de maintenance peuvent être effectuées à tout moment de la journée.

L'utilisation de la virtualisation pour la mise en œuvre de serveurs permet également de limiter les problèmes de sécurité au sein des centres de données. Chaque application étant incorporée dans son propre serveur virtuel, il n'existe aucun conflit entre applications lors de mises à niveau ou de modifications. Chaque application peut être isolée des autres applications, ce qui favorise la sécurité.

Une consommation d'énergie en baisse


À l'heure où le réchauffement de la planète suscite une prise de conscience de plus en plus vive, la virtualisation contribue à la baisse des dépenses dans ce domaine-clé que représente l'énergie. Il n'est pas nécessaire d'être un spécialiste des technologies réseau pour imaginer que les commutateurs de réseau sont des gouffres d'énergie.  Une étude effectuée pour le compte d'AMD indique que la consommation mondiale d'électricité et d'énergie des centres informatiques totalise chaque année 7,2 milliards de dollars, un chiffre qui devrait continuer à augmenter[3].

La virtualisation des serveurs permet de réduire considérablement l'utilisation de systèmes superflus. En conséquence, les entreprises dotées d'un environnement informatique virtuel utiliseront moins de matériels et consommeront par conséquent moins d'énergie. Du point de vue de la responsabilité citoyenne des entreprises, la virtualisation est capitale pour minimiser l'empreinte environnementale. 

La virtualisation est une technologie très gourmande en mémoire et en puissance de calcul et qui impose aux serveurs des demandes que l'on trouve rarement dans les autres environnements logiciels. Pour utiliser leurs ressources informatiques avec une efficacité maximale, les centres informatiques virtuels doivent pouvoir compter sur des plates-formes de serveurs capables de fournir un environnement robuste et évolutif tout en préservant un haut rendement énergétique. Pour répondre à ces demandes complexes, les centres de données s'appuient de plus en plus sur des ressources technologiques basées sur des matériels spécifiques.

Perspectives

Aujourd'hui, un centre de données affichant un rendement énergétique et un coût optimisés ne constitue plus une option, mais une obligation. La virtualisation a déjà modifié en profondeur le paysage des centres informatiques modernes en favorisant la continuité de service et en augmentant la disponibilité au meilleur coût. Les enquêtes effectuées par les cabinets d'analyste suggèrent que les entreprises s'intéressent de plus en plus au concept de virtualisation et il y a fort à parier que les entreprises de toutes tailles vont jouer la carte de la virtualisation pour rendre leurs activités plus rentables et plus écologiques au cours des mois à venir. 

Selon une enquête effectuée en 2008 par le Butler Group, les outils de virtualisation pourraient permettre d'améliorer les taux d'utilisation des serveurs de 25 %, soit de 40 % par rapport à aujourd'hui[4]. Ces chiffres confirment l'impression que la virtualisation va gagner en popularité au cours des prochaines années à venir et s'imposer comme la norme dans les centres de données du monde entier. Compte tenu de l'augmentation du nombre d'applications critiques virtuelles, les centres informatiques virtuels constitueront bientôt un véritable standard industriel.

Alors que quelques années plus tôt, les responsables étaient pratiquement obligés de justifier la virtualisation de leurs centres de données, ils doivent aujourd'hui en justifier l'absence. Qu'il s'agisse des avantages qu'elle apporte à la facilité d'administration ou de sa capacité à augmenter le rendement des serveurs, la virtualisation pourrait bien s'imposer comme le segment du marché des serveurs qui affiche la croissance la plus rapide et il ne fait aucun doute que de plus en plus de systèmes achetés aujourd'hui pour équiper des centres de données entreront tôt ou tard en contact avec la virtualisation.


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[1] "Server Virtualization Accelerates in North America", Forrester Research, Inc., février 2007

[2] Mann, Andi, Virtualization 101, Enterprise Management Associates (EMA)

[3] Jonathan G. Koomey, Ph.D.: Estimating regional power consumption by servers: A technical Note, 5 décembre 2007

[4] Killer app?' CXO US Edition, Neil Davey, www.cxoamerica.com/pastissue/article.asp?art=27020&issue=168