Vers une fonction de Directeur de la Stratégie d’Innovation

La révolution impulsée par les nouvelles technologies ouvre la voie d'une remise en cause des modes de fonctionnement établis dans un contexte où la capacité d'initiative des entreprises est déterminante. Le pilotage de l'innovation serait-il en passe de devenir une fonction clé dans la direction des entreprises ?

Par le passé, l'organisation des services informatiques s'est développée dans des environnements qui eux-mêmes sont devenus par la force des choses de plus en plus complexes, au fur et à mesure de l'arrivée des nouvelles technologies, au fur et à mesure des exigences de plus en plus fortes dictées par la concurrence, par les clients, par le marché. Malheureusement, cette croissance de l'organisation des services informatiques n'a pas toujours été structurée et planifiée comme il aurait fallu qu'elle le soit.

Pour un bon nombre d'organisations, cela a abouti à des organisations informatiques pour lesquelles il est devenu presque impossible d'obtenir une image claire des services fournis, des composants informatiques parties prenantes dans la fourniture de ces services, et des profils des différents clients utilisateurs de ces services.

 

Aujourd'hui et à plus forte raison demain, cette vision agrégée du système d'information (c'est-à-dire du système informatique et du système de l'organisation) est devenue impérative pour une gestion des services alignée aux enjeux structurels et conjoncturels des entreprises. Dans un contexte où l'innovation jouent un rôle majeur dans la compétitivité des firmes, les actifs informatiques concernés sont de plus en plus spécifiques. Cette multiplication et mondialisation des interactions complexifient donc d'autant plus l'environnement informatique des entreprises. Aucune organisation un tant soit peu sophistiquée, qui veut se développer, ne peut le faire sans un système d'information qui évolue. Le recours croissant à l'informatique et aux nouvelles technologies de l'information en sont la preuve.

 

Paradoxalement, le recours à ces nouvelles technologies crée une complexité en termes de croissance de l'information disponible et de sources nombreuses et diverses. L'information est immédiate et instantanée, sans qu'on ait eu le temps de la vérifier, de la contrôler ou même de la filtrer. En conséquence, les efforts des organisations et des dirigeants se portent sur le développement de nouvelles structures, de nouveaux outils (techniques et méthodologiques) et de nouvelles compétences pour apprivoiser la complexité du SI dans son état à l'instant  "t " ainsi que dans une approche prospective par rapport à la mutation rendue nécessaire par une innovation souvent plus inéluctable que planifiée.

 

Mais comment garder le contrôle de l'information dans notre ère où le progrès a par exemple rendu possible le téléchargement de données depuis pratiquement n'importe quel coin de la planète en quelques secondes ?

 

C'est peut-être ici l'un des défis majeurs de ces prochaines années. A l'ère du "2.0", la gestion des flux d'informations, le filtrage des informations pertinentes, leur traitement et leur compréhension sont des challenges qui se posent à toutes les industries, à tous les métiers, à tous managers, et à tout système d'information.

 

Une première observation est donc de dire qu'un système d'information efficace repose(ra) sur :

 

- La connaissance des caractéristiques des composants du système informatique,

- La maîtrise des opérations et de l'organisation qui commandent et transforment l'Information,

- La gestion proactive de l'innovation, et le contrôle de la valeur créée par le système d'information, quel que soit le canal d'accès et de diffusion.

 

C'est dire à quel point la fonction de DSI est définitivement un métier d'avenir, mais pas seulement : nous pourrions assister à la généralisation de la fonction de Directeur de la Stratégie d'Innovation au côté de celle du Directeur du Système d'Information.

Encore peu répandue il y a quelques années, la Direction de l'Innovation gagne du terrain dans de nombreuses entreprises et monte en puissance dans un rôle de facilitateur ou mieux d'"harmonisateur" dans les rapports qu'entretiennent l'entreprise avec son système d'information, et ce jusqu'au niveau des directions générales.


Même si aujourd'hui cette fonction est pour bon nombre d'entreprises intégrée à celle du DSI, la séparation des rôles montre de plus en plus qu'elle présente l'intérêt de placer l'innovation au cœur d'une préoccupation stratégique de toute l'entreprise, et donc de faire évoluer la perception réductrice consistant à ramener la question de l'innovation à un enjeu interne DSI, uniquement promu par la parole du DSI.


La révolution tirée par l'innovation technologique et les nouvelles possibilités offertes par celle-ci ouvrent l'entreprise à une autre façon de produire, une autre façon de manager mais aussi à d'autres paramètres à prendre en compte tant d'un point de vue de sa productivité, que sur le plan de la gestion de ses ressources humaines. La communication, la collaboration et le traitement de l'information s'imbriquent de plus en plus dans un même ensemble unique, quasi-indissociable, dont la seule performance relève de celle du système d'information de l'entreprise.

Un des effets majeurs de cette révolution est visible dans l'évolution des modes de travail des entreprises, dans l'évolution des modes de consommation et des usages, mais aussi dans les mœurs, avec l'arrivée prochaine de cette nouvelle génération, dite "digital natives" (en référence au concept développé par Marc Prensky) dans les entreprises.

 

La stratégie d'innovation, son pilotage sur un plan opérationnel, sur le plan du "business development", l'anticipation sur la qualité des services de demain (thème approfondi dans mon ouvrage paru chez Eyrolles), l'orientation tactique vis-à-vis des Nouvelles Technologies de l'lnformation et de la Communication, la recherche, le développement durable et l'impact générationnel de l'innovation sur le management des ressources humaines, sont autant de sujets clés qui viendront grossir le portefeuille du Directeur de la Stratégie d'Innovation ces prochaines années.