Etat de l'art du marché des prestations intellectuelles informatiques

Le marché est en profonde mutation. Les grandes SSII françaises doivent remettre en question leur process et business model pour fournir des prestations de services de qualité !

État actuel du marché des services informatiques

Il y a environ 18 ans, lorsque j'intervenais pour une grande SSII, il se disait que le marché français de la prestation intellectuelle informatique allait complètement se transformer dans les 4 à 5 ans à venir. Les petites et moyennes SSII étant vouées à être absorbées par les grandes SSII et donc à disparaitre.

Finalement, cela a mis un peu plus de temps mais le constat est le même. Depuis 10 ans, on a remarqué le fort engagement des grands comptes vers la massification des prestations et dans la mise en place de structures industrialisées que sont les contrats cadre et les référencements, ceci permettant de travailler sur la masse de prestations et le chiffre d'affaires, plutôt que sur la qualité. Ce schéma qui permet encore aujourd'hui de réduire les coûts d'achats, n'a pas uniquement été initié par les grands donneurs d'ordre mais relevait autant de la volonté des grandes SSII d'augmenter leur volume de prestations et donc de dynamiser leur croissance. De fait, les grands comptes se retrouvent plus à acheter des "produits" de masse que des compétences.

Cette mutation a eu pour conséquence de fermer progressivement le marché des grands comptes au mid-market et aux PME qui n'ont pas la possibilité de se faire référencer de par leur taille ou la tenue des engagements demandés. Ces sociétés se sont donc retrouvées obligées d'intervenir au coût donné par les grandes SSII généralistes, en sous-traitance ou en portage. Les collaborateurs qui interviennent dans ces conditions se retrouvent déconnectés de leur structure initiale en termes de suivi opérationnel et administratif et c'est l'une des raisons pour lesquelles il y a des problèmes récurrents de délit de marchandage et prêt-illicite de main d'oeuvre dans la profession... Mais ces PME n'ont pas eu le choix : soit elles acceptent ces conditions qui manquent cruellement de transparence, soit elles s'orientent vers d'autres types de marché.

Visibilité des sociétés de services de niche qui évoluent sur ce marché

Face au monopole des grandes SSII, ces PME SSII voient leur visibilité réduite auprès des grands comptes. Si l'intervention en gré à gré - la sollicitation par des opérationnels grands comptes pour intervention d'experts dans leurs projets - perdure c'est uniquement dans certains secteurs d'activités sur des prestations très ponctuelles et de plus en plus rares. Aussi pour continuer d'exister, elles se retrouvent finalement confrontées à 3 types de possibilités :

- l'intervention en portage : à la demande des clients opérationnels, ces sociétés se font porter par les grandes SSII référencées dans les contrats cadres. En contrepartie l'entreprise qui "porte" perçoit une taxe d'au minimum de 10%, et qui plus généralement atteint les 15%, pour effectuer ce portage administratif sans aucune autre valeur ajoutée.

- l'intervention en sous-traitance qui fait intervenir les équipes de la société initiale pour la société référencée. Cette dernière prélève une marge minimum de 20% et plus généralement de 30-35% au détriment de la société qui fournit les compétences.

- il existe une dernière possibilité très ponctuelle consistant à sélectionner une petite SSII parmi des grands acteurs de la prestation intellectuelle informatique qui servira de challenger en termes de compétence, de pertinence et de qualité.

Pour intervenir sur des projets grands comptes, les PME SSII n'ont pas d'autre choix que de payer cette véritable taxe. La sous-traitance et le portage ne sont, en somme, que des leviers financiers et non pas une recherche de compétence alors que le nombre de projets nécessitant des expertises très pointues est en recrudescence.


Une alternative pour contourner le dictat des grandes SSII

Aujourd'hui, les entreprises du mid-market et les PME SSII ont 3 alternatives pour faire face aux grandes SSII :

- l'utilisation des places de marché entre les grands comptes et les sociétés, pas nécessairement référencées. La place de marché permet aux grands donneurs d'avoir une multitude de fournisseurs auxquels ils peuvent adresser leurs consultations. Néanmoins, dans ce cas de figure, les grands donneurs d'ordre ne prennent généralement pas le temps de mieux connaître ces acteurs et, surtout, les places de marché ne s'engagent pas vis-à-vis d'eux. En général, les places de marché sont plutôt utilisées pour effectuer de sourcing entre SSII.

- le regroupement d'acteurs SSII au sein de GIE (Groupement d'Intérêt Economique) pour essayer d'accéder aux référencements tout en montrant un peu de plus de force vis-à-vis des Grands Comptes. Dans la réalité, ces GIE ne sont pas une vraie réponse aux besoins des grands donneurs d'ordre. Ils ont en fait besoin de s'appuyer sur un système de guichet unique permettant une relation multi-fournisseurs industrialisée en termes d'engagement, de négociation des prix et du suivi des travaux. Les GIE se sont plutôt retrouvés dans une dynamique Régionale il y a quelques années.

- une plate-forme de services industrialisée qui va prendre en compte les engagements contractuels, extrêmement lourds pour ces PME, et être garant de la pertinence des compétences proposées et de la qualité des travaux afin d'offrir la notion de guichet unique multi-fournisseurs aux Grands Comptes. Tel est le fonctionnement du modèle INOP'S, qui s'inscrit dans le cadre de l'initiative gouvernementale - le Pacte PME - ayant pour but d'aider les PME à accéder au marché des Grands Comptes privés ou publics.

Grâce au modèle de plate-forme industrialisée, les PME récupèrent entre 10 et 20 % de leur marge tout en pouvant utiliser leur relation directe avec les grands comptes, le contraire de la sous-traitance, ceci avec une meilleure garantie de la qualité des travaux réalisés.