04 – Expérience « Client », Design thinking, Lean UX, Design sprint

Le DT a pour objectif l’obtention d’un cadrage élémentaire de certains aspects du produit à obtenir, lesquels se formaliseront dans un « product backlog » indispensable au démarrage de la construction applicative.

Dans un contexte de développement de SI, le design thinking représente une des techniques Agiles de facilitation du Sprint 0. Le DT aura alors pour objectif l’obtention d’un cadrage élémentaire de certains aspects du produit à obtenir, lesquels se formaliseront dans un « product backlog » indispensable au démarrage de la construction applicative. Pour faire simple : brainstormer, puis analyser les éléments d’un besoin co-construit et validé par l’ensemble des parties prenantes.

La pensée « Design »

Selon certaines communications, le design thinking se présente plus largement comme « un ensemble de stratégies permettant d’imaginer des solutions créatives à des problématiques business ». Le DT s’assimile parfois au  Lean UX,  une version simplifiée utilisant essentiellement ses techniques de mise en oeuvre les plus rapides. Sur le fond, le DT se présente toujours comme un processus de co-créativité impliquant l’utilisateur final (end-user) et les retours de son expérience réelle. Le DT permet alors d’atteindre les trois critères principaux déterminant le succès d’un produit : désirabilité, faisabilité, viabilité (figure suivante). La croisée de ces critères constitue le « design d’innovation ».

Notons néanmoins que dans le cas d’un produit applicatif à usage interne - souvent imposé ou incontournable - la notion de désirabilité, même si elle demeure un facteur important d’acceptation, n’est pas pour autant primordiale. En revanche, certains aspects organisationnels (réorganisation, changement de compétences, formation, recrutement, reclassement, etc.) sont rarement abordés à ce niveau.  Leur prise en compte devra alors être traitée ultérieurement dans d’autres étapes du Continuous Sprint 0. En lien avec le Lean Canvas et le Value Proposition Ddesign (justification de faisabilité financière), le DT aboutira généralement à une modélisation et à une description Agile d’un produit validé en continu par ses futurs utilisateurs.

Selon Alba Fieschi, une experte de ce domaine, « design thinking  et Agile sont deux approches n’ayant pas la même histoire. Le DT provient du design de produit à commercialiser alors que les techniques Agiles ont pour source le développement d’applications informatiques. Dans un contexte de transformation digitale, les deux techniques ont trouvé des complémentarités et il s’avère intéressant d’associer la puissance de leurs valeurs communes : co-construire en équipe pluri-disciplinaire, tester/ajuster, être focus sur la valeur apportée au client. »

Le processus « design »

En pratique, la mise en œuvre du design thinking s’organise selon un processus en plusieurs étapes dont le nombre varie en fonction des méthodes et des contextes particuliers. Initialement structuré en 7 étapes (définir, rechercher, imaginer, prototyper, sélectionner, implémenter, apprendre), le DT fut ensuite ramené à 5 (définir, imaginer, synthétiser, prototyper, tester), puis à 3 (inspirer, imaginer, implémenter). Dans tous les cas, ces enchaînements logiques ne s’appliquent pas lors d’un processus linéaire unique, mais dans une approche itérative d’exploration continue (figure suivante, Itération).

La structure des diverses méthodes de design thinking reste commune : étape ouverte de brainstorming, puis étape de synthèse analytique. Il est conseillé d’appliquer ces deux réflexions de « divergence » puis de « convergence » à deux besoins distincts : la définition du problème, puis sa résolution (figure du double diamant, une simple carte visuelle du processus de conception). Car ne pas se tromper de problème est aussi important que de ne pas se tromper de solution.

Dans sa version la plus légère ou UX, le design thinking rencontre avec efficacité l’expression de besoin Agile obtenue alors en trois étapes.

  1. Le Define est l’étape visant à mettre en place un « bon point de vue » lors d’une co-définition du besoin réel.
  2. L’Ideate  est l’étape de la production d'idées, généralement lors de brainstorming.
  3. Les étapes de Prototypage et de test, qui, dans le cas d'un développement utilisant des principes Agiles, se confondront afin de présenter en continu l’application en cours de construction. Les retours de l'utilisateur permettront alors d’affiner le « bon point de vue » et de raffiner la solution en explorant éventuellement d’autres options comme le recommande le principe fondamental de SAFe (Scaled Agile Framework for lean enterprises). Ce framework de mise à l’échelle du courant d’amélioration continue et de l’Agilité propose -sur la base d’un cœur de pratiques- des ambitions d’innovation instrumentées par des propositions organisationnelles ou techniques telles que « Assume variability preserve options ». Cette recommandation implique de conserver ouverts les choix d’innovation (Set-based design) le plus longtemps possible, y compris lors du développement (dernier Sprint du Product Increment consacré entre autres à l’exploration continue).

Note : cette communication n’a pas pour but de présenter le design thinking, de nombreux articles se trouvent sur le Net. Par contre elle fournira quelques conseils dans l’utilisation Agile des principes DT.

Complexité de la vision exhaustive « Backlog »  

Un informaticien, même expérimenté et Agile, se trouverait certainement en difficulté s’il devait couvrir la totalité des techniques impliquées dans un « Continuous sprint 0 » (poster récapitulatif de cette proposition ici), car cette phase englobe la totalité des disciplines permettant de spécifier et de modéliser globalement (au sens primitif du terme) l’espace du problème, de la solution et de son acceptation.  Dans cette optique, le DT se limitera à un processus de co-créativité impliquant l’utilisateur final (end-user) - et les retours de son expérience réelle - afin d’obtenir sa validation permanente.  Lors d’une approche de développement de SI souhaitée « Agile », le choix de la version la plus légère du DT s’impose. Le modèle le plus simple en 3 étapes sera privilégié autant que possible (inspiration, idéation, implémentation).  Par sécurité on s’attachera à la validation dite du « Double diamant » organisée en 4 phases (découvrir, définir, développer, livrer) où s’illustrent alternativement les pensées divergentes et convergentes. Au final, les exigences du livrable idéal se présenteront sous la forme d’une Produit Minimum Viable synthétisé par des expressions Agiles de type Story telling ou Impact mapping. Ces communications avec le métier, les utilisateurs ou les clients d’une application ne représentent jamais une perte de temps. Néanmoins, en fonction de la complexité de la préoccupation à couvrir, de la taille de l’organisation, et surtout de l’importance du Time to market, il est parfois nécessaire de se contenter du plus sommaire ou du plus rapide - sans pour autant tomber dans le minimalisme absolu (spécifier simple mais pas simpliste).

Note vitale : éviter le biais de la recherche de complétude lors de la spécification et reporter la formalisation des détails au cœur de la réalisation resteront toujours les pratiques essentielles du cœur de l’agilité réelle.

Selon Alba Fieschi, en bonus, le design thinking présente aussi un intérêt en matière de team building. « Concernant les organisations conséquentes, l'intérêt du DT se situe dans « l’apport de sens aux équipes » qui travaillent le plus souvent en silos et parfois selon des procédures de communication administrativement figées - d’où une dilution de responsabilités face à la valeur créée du produit final.  Parfois les interlocuteurs ne se connaissent même pas ou n’ont communiqué sur le sujet que par mails ou conférences téléphoniques. Le design thinking apporte alors les bases d’un engagement essentiel lors d’une co-construction plus coopérative où se mobilisent les acteurs d'une vision commune. Se mettent alors en œuvre naturellement les bases du team building : se connaître, créer une équipe, accomplir des choses ensemble, se faire confiance, s'entraider...»  

Du design thinking au design sprint

« Le design sprint se présente comme un raccourci permettant de passer rapidement du stade de l'idée à l'apprentissage via les retours rapides d'utilisateurs. » L’objectif est de réduire le risque lors de la mise sur le marché de nouveaux services ou de produits innovants. Ce processus permet à l'équipe, en définissant clairement les besoins, de valider ou d'invalider des hypothèses et de décider des options structurantes avant que la première ligne de code ne soit écrite. Les principes fondamentaux de ce processus imposent des contraintes organisationnelles telles que :  unité de temps et de lieu, équipe pluridisciplinaire, prototypage rapide et tests utilisateurs finaux.  Le design sprint permet aussi de résoudre de grands défis managériaux en simplifiant et impliquant simultanément quatre grands courants de créativité : design thinking, Lean startup, UX design, méthode agile.

Note : des approfondissements sur le principe du design sprint et sur les détails de sa mise en œuvre pratique se trouvent aisément sur le web.

Autres extensions possibles des techniques DT

Au-delà d’un produit, une approche de type DT peut aussi s’appliquer à l’analyse d’un contexte et à la matérialisation d’un « futur cible » à organiser (comme par exemple les compétences et les outils de ressources humaines dans une vision de leurs métiers à divers horizons). Les ateliers pourront alors utiliser soit des techniques de DT conventionnelles, soit une hybridation avec des outils de projections de contexte à partir du présent ou de rétro-projection à partir de la cible future. Par expérience, il semble que le premier principe soit plus aisé à mettre en œuvre que le second, même si ce dernier (atelier Remember the future) soit conceptuellement plus puissant. Une grande partie de l’efficacité de l’exercice réside dans sa préparation, la compréhension des concepts et des objectifs réels par tous les participants, l’organisation matérielle, la qualité des éléments visuels, les animations, les techniques et supports de formalisation de la restitution.

Conclusion

Le design thinking et ses techniques dérivées ou simplifiées, se trouvent désormais au cœur des développements actuels de systèmes d’information et plus particulièrement dans leur vision des futurs produits d’un monde digitalisé. Il serait dommage de s’en priver.