Réseau social d'entreprise chez Renault et Volvo : quels enseignements ?

Réseau social d'entreprise chez Renault et Volvo : quels  enseignements ? Offres risquées, ROI long voire inexistant, adoption compliquée... Deux responsables de réseaux sociaux d'entreprise ont partagé leur retour d'expérience lors des TechDays, entre théorie enthousiasmante et difficultés sur le terrain.

Lors des récents TechDays de Microsoft, des responsables de projet de Renault et de Volvo ont témoigné sur leur déploiement d'un réseau social d'entreprise basé sur Sharepoint. Quatre citations particulièrement révélatrices ont été entendues lors de ces présentations.

Etaient donc invités à partager leur retour d'expérience : Damien Martayan, responsable du domaine Knowledge Management ("KM" ) à la DSI de Renault, et Stéphane Perrin, responsable des solutions de Product Planning, Project, Portfolio et Resource Management du groupe Volvo.

Invités par Microsoft, les deux constructeurs automobiles ont donc choisi Sharepoint comme socle technologique pour leur réseau social d'entreprise (essentiellement dédié au partage d'idées en interne). Certaines des remarques évoquées par les deux responsables valent en fait pour tout projet de RSE.

 

1 - "Il y a trois types de fournisseurs de RSE, et chacun présente des risques et des défauts"

Au moment de l'appel d'offres chez Renault, début 2011, Damien Martayan prend conscience que le marché des RSE est "pléthorique". "Très sollicité" par les fournisseurs qui ont eu vent de son projet, le responsable "KM" à la DSI de Renault parvient à cerner trois catégories de solutions distinctes.

"Il y a les 'natifs', comme Jive, Yammer ou BlueKiwi. Il y a aussi les généralistes, comme Microsoft ou IBM, qui proposent une nouvelle offre orientée RSE sur une base technologique déjà préexistante. Enfin, il y a les solutions très orientées business dotées de fonctionnalités sociales, comme Salesforces avec Chatter. Chaque type de fournisseur a ses défauts. Les natifs, proposant généralement tous des solutions en mode SaaS, sont pointus et rapides. Ils sont parfaits pour les petites entreprises. Mais chez Renault, l'écosystème est compliqué. En outre, ces spécialistes vont-ils résister face à des plus grands acteurs, qui ont aussi de l'appétit sur ce marché ?", interroge Damien Martayan.

Habitué aux problématiques des outils collaboratifs et du KM, Damien Martayan a préféré opter pour l'offre de Microsoft, incluant GED, portail, intégration avec Exchange ou Lync et reposant sur un Active Directory bien connu. Une polyvalence appréciée "d'autant qu'il difficile de savoir au début quels usages vont le plus émerger sur un RSE", fait remarquer le responsable du projet.

Le problème des généralistes comme Microsoft, selon lui ? "Il peuvent être plus lents que les autres et les natifs en particulier. Ils risquent d'être dépassés, en termes de fonctionnalités, par la vitesse du 2.0. Or, pour ce type de solutions, les utilisateurs peuvent justement s'attendre à vite retrouver certaines fonctionnalités", admet Damien Martayan. Quant aux solutions associées à un progiciel, comme Chatter l'est avec le CRM de Salesforce, "elles peuvent poser problème pour un déploiement généraliste", a estimé Damien Martayan.

 

2 - "Il ne faut pas obliger les employé à contribuer au RSE"

"Il est difficile, et pas conseillé, de quantifier le temps passé par les employés sur un RSE"

Lors de la session de questions-réponses, un participant a demandé comment gérer les inévitables réticences des employés face au RSE, des blocages trop généralisés mettant évidement en péril l'un des intérêt principaux d'un outil qui se veut "social". 

"Il ne faut pas obliger les employés à s'en servir. Certains ne seront pas motivés, et le resteront", estime Stéphane Perrin. Pour faire face aux réticents, Damien Martayan de Renault conseille lui de "bien montrer à la fois l'engagement de la direction générale, mais aussi que les idées qui naissent grâce à l'outil [d'abord pensé pour incuber des projets d'innovation de tous les salariés chez Renault, NDLR] peuvent aboutir et se matérialiser ensuite réellement".

 

3 - "Les RSE s'adressent aux cols blancs, pas aux cols bleus"


A la question "les RSE sont-ils réservés aux cols blancs ?", les deux responsables ont d'abord répondu par un silence approbateur. "Les employés qui doivent régulièrement utiliser un ordinateur et consultent fréquemment les e-mails, sont ceux qui ont le plus de facilité sur un RSE. Bref, ce sont bien les cols blancs qui sont prédisposés pour s'exprimer le plus sur les réseaux sociaux", a d'abord admis Damien Martayan. Stéphane Perrin a ensuite acquiescé : "Il y a bien des terminaux accessibles partout chez Volvo, y compris dans les usines. Tout le monde donc peut avoir accès, du moins en théorie, aux réseaux sociaux d'entreprise. Mais en pratique, tout le monde ne contribue pas au RSE".

 

4 - "Le ROI des RSE est loin d'être évident"


Évidemment interrogé sur l'épineuse question du ROI, Damien Martayan l'avoue clairement : le ROI n'est pas évident, voire absent. D'abord, "comment quantifier l'implication des salariés, le temps qu'ils auront passé à contribuer, à partager et se servir de l'outil ? Le mesurer, et donc le contrôler, ne serait d'ailleurs pas une bonne idée", estime Damien Martayan. En plus, "connaître en amont l'investissement en temps nécessaire au projet aurait sans doute entraîné son rejet", admet également le cadre, qui ajoute cependant que "le RSE pourra déboucher sur des gains réels, la solution pouvant ouvrir la voie à des innovations et des gains dont certains seront auditables et devraient justifier le projet".

Bénéficiant d'un soutien très fort de la direction, le projet de RSE est loin d'être compromis, même sans avoir démontré son ROI : la solution, déployée depuis mai dernier, devrait même pouvoir bénéficier de nouvelles fonctionnalités, et peut être même s'ouvrir vers l'extérieur.

Dernier enseignement de cette conférence : elle s'est déroulée dans une salle pleine à craquer, de participants de tous âges, signe d'un engouement incontestable et intergénérationnel autour de ces projets. Cependant, pour mémoire, le cabinet de conseil Lecko estime le chiffre d'affaires du marché des réseaux sociaux d'entreprise en France à moins de 9,5 millions d'euros en 2011. Il devrait croître de 60 % cette année.