Intel joue à son tour un mauvais tour à AMD

A l'approche des verdicts de ses procès anti-trust, Intel a menacé AMD de remettre en cause l'accord de licence croisée qu'il a conclu avec lui en 2001. Pure coïncidence ou décision savamment calculée ?

Alors que les multiples instructions menées à l'échelle planétaire à l'encontre d'Intel pour abus de position dominante doivent aboutir avant la fin de l'année, le fondeur américain contre-attaque, mais de manière pour le moins inattendue.

Il vient en effet de prendre (une fois n'est pas coutume) pour cible AMD, en le menaçant de mettre un terme à un accord de licence croisée conclu avec lui depuis 2001. Jusqu'alors, Intel l'autorisait en effet à utiliser plusieurs de ses brevets dans le cadre de la conception de ses processeurs sous architecture x86.

Mais la création de la co-entreprise Global Foundries entre AMD et le fonds d'investissement d'Abou Dabi ATIC a mis le feu aux poudres. Intel justifiant son intention de priver AMD de l'utilisation de ses brevets d'ici 60 jours en raison de la violation de l'accord de licence croisée conclu avec lui 8 ans auparavant.

Car aux yeux d'Intel, il semblerait plus que probable que le co-actionnaire d'AMD dans Global Foundries - et majoritaire dans son capital - puisse avoir accès à des informations confidentielles relatifs à ses brevets. Une éventualité qui le chagrine au plus haut point.

Le contrat de licence croisée entre Intel et AMD ne concernerait que ses filiales directes et pas sa co-entreprise Global Foundries

Or, le contrat de licence croisée signé avec Intel ne concerne qu'AMD et ses filiales, et en aucun cas d'autres structures, comme peut l'être par exemple une co-entreprise, qui ne peut, aux dires d'Intel, être juridiquement associée à une filiale de plein exercice.

AMD, de son côté, ne l'a bien sûr pas entendu pas de cette oreille. Il a d'ailleurs fait savoir par la voix de Patrick Moorhead, son vice-président du marketing, qu'il "se tenait prêt à rendre public toutes les informations juridiques nécessaires démontrant que la création de Global Foundries ne pouvait en aucun cas interférer dans l'accord de licence croisée signé avec Intel". Une décision assortie toutefois d'un audacieux préalable : qu'Intel mette en évidence sa responsabilité dans les affaires d'abus de position dominante en cours.

Et AMD de montrer qu'il était même prêt son tour de monter lui-même au créneau en cas de persistance d'Intel à vouloir lui retirer ce droit de propriété intellectuelle en déclarant envisager toutes les dispositions juridiques nécessaires pour le contraindre à respecter ses engagements.

Le véritable mobile est-il de limiter le montant des dommages et intérêts demandés des procédures anti-trust ?

Une menace que Bruce Sewell, conseil juridique d'Intel, s'est d'ailleurs empressé de démonter : "AMD ne peut en aucun cas prétendre sans le consentement d'Intel à étendre à une entité tierce les droits de propriété intellectuelle qui lui ont été accordés".

Pour autant, Intel laisse la porte ouverte à la médiation en précisant dans son courrier du 16 mars adressé à AMD qu'il comptait bien régler cette affaire à l'amiable avant d'envisager toute poursuites. Une façon pour Intel de se montrer urbain vis-à-vis d'AMD en espérant certainement que ce dernier mette de l'eau dans son vin en tempérant la virulence de ses attaques portées dans le cadre de son procès anti-trust.

Et d'espérer qu'il limite au passage ses ardeurs dans le montant des dommages et intérêts demandés qui atteignent pour l'heure la somme pharaonique de 3 milliards de dollars. Ce qui, en ces temps de crise, apparaît plutôt difficile à avaler.