10 manières de rater sa campagne de crowdfunding

10 manières de rater sa campagne de crowdfunding Quelles sont les erreurs à ne pas commettre pour s'assurer du succès de sa campagne de financement participatif ?

Lancer une campagne de crowdfunding nécessite un savoir-faire bien particulier : le nombre de projets ayant explosé sur les plateformes, séduire les contributeurs relève désormais du casse-tête. En témoigne l'éclosion outre-Atlantique de la profession de coach en crowdfunding, des experts qui accompagnent les porteurs de projet dans l'élaboration puis la promotion de leur campagne. Les plateformes, elles aussi, donnent des conseils aux internautes qui souhaitent lever des fonds pour maximiser leurs chances de réussite. Voici dix erreurs à ne surtout pas commettre lorsqu'on crée sa campagne sur un site de financement participatif.

  1. Se lancer trop tôt

Faire l'impasse sur la préparation minutieuse de la campagne de crowdfunding est la principale cause d'échec, assure Anastasia Emmanuel, directrice Europe de la plateforme Indiegogo. "Un facteur de réussite important est tout simplement de présenter une campagne visuelle et accrocheuse qui explique clairement pourquoi vous voulez lever des fonds." Pour se faire une idée des principaux facteurs de succès d'une campagne, il peut être utile de faire un tour sur les principales plateformes (de prêt, don ou equity, en fonction de son projet) et d'étudier les pages des campagnes qui ont le mieux réussi.

Le jour où la campagne se lance, le porteur de projet doit déjà avoir préparé son plan de communication : campagne sur les réseaux sociaux, mise à jour de la page sur le site de financement participatif avec des nouvelles à annoncer aux contributeurs ou des vidéos additionnelles… Surtout, l'équipe doit identifier, avant de se lancer, une liste de contributeurs potentiels et des canaux pour atteindre son audience cible, ainsi qu'une liste de blogueurs ou journalistes qui pourraient potentiellement relayer la campagne. Pour s'assurer un bon départ, pourquoi ne pas créer un site Web en demandant aux potentiels internautes intéressés de laisser leur adresse mail, afin de les prévenir du lancement de la campagne ? Sur Indiegogo, 85% des campagnes qui atteignent leur objectif reçoivent leur première contribution dès le premier jour.

  1. Faire l'impasse sur le storytelling
Anastasia Emmanuel, directrice Europe d'Indiegogo. © Indiegogo

"Le storytelling est la clé pour communiquer votre passion aux potentiels contributeurs", souligne Anastasia Emmanuel, d'Indiegogo. Et pour raconter son histoire, les porteurs de projet disposent de deux supports : la page de campagne et la vidéo de présentation.

Kickstarter conseille de ne pas oublier de "faire les présentations" et de parler "du rôle de chaque membre de votre équipe". Surtout, les porteurs de projet sont invités à montrer l'envers du décor pour permettre aux potentiels contributeurs de découvrir leur univers de l'intérieur et de se sentir participants à part entière : "présentez l'état d'avancement de votre projet, publiez des photos de prototypes ou parlez de vos recherches, les contributeurs potentiels adorent ce genre de détails".

  1. Tourner une vidéo trop longue

La vidéo ne doit pas durer plus de deux à trois minutes, pour capter l'attention de l'internaute… Et elle doit se concentrer sur le storytelling. Les porteurs de projet doivent se mettre en scène, parler face caméra et décrire leur passion. Surtout, ne pas aborder les considérations techniques dans la vidéo : la page de campagne est bien plus adaptée pour entrer dans les détails.

"Vous n'avez pas besoin d'une vidéo super pro, assure Kickstarter. Les vidéos les plus réussies sont parfois "faites maison"."L'important : "présenter sa vision à long terme pour susciter l'intérêt".  

  1. Placer la barre trop haut

Les porteurs de projet doivent réfléchir avec précision au budget qu'ils vont annoncer vouloir lever. D'abord, parce que sur certaines plateformes comme Kickstarter, s'ils n'atteignent pas cette somme en promesses de dons ou préventes, l'ensemble de la campagne est annulée. Mais même sur des plateformes où le porteur de projet reçoit tout de même le montant, comme pour les campagnes flexibles d'Indiegogo, il vaut mieux ne pas être trop gourmand : dans ce cas, la commission prélevée par la plateforme est plus importante.

"Lorsque l'équipe détermine son objectif selon le montant qu'elle aimerait lever, plutôt que selon le montant dont elle a besoin pour atteindre la prochaine étape de son projet, le risque d'échec est plus grand", analyse Anastasia Emmanuel. Selon elle, l'objectif fixé devrait correspondre au "minimum absolu dont l'équipe a besoin". D'autant que statistiquement, plus l'objectif est atteint rapidement, plus la campagne a du succès : sur Indiegogo, 87% des campagnes qui atteignent leur objectif sont financées de 32% au-delà.

Plus l'objectif est bas, plus le montant recueilli est élevé

Les campagnes dont l'objectif est fixé entre 50 000 et 75 000 dollars lèvent en moyenne plus de fonds que celles à 100 000 dollars, révèle la directrice Europe d'Indiegogo. "La dynamique est un facteur clé de succès", explique-t-elle : plus l'objectif approche des 100%, plus les contributeurs voient la campagne comme une réussite et ont envie d'y participer. La probabilité qu'une campagne atteigne son objectif quadruple dès lors qu'elle atteint 10% du montant. "Lever 20 000 dollars en une semaine quand votre objectif est de 50 000 dollars est excitant, mais lever 20 000 dollars en une semaine quand il est de 150 000 l'est beaucoup moins", décrit Anastasia Emmanuel.

Ne pas oublier, cependant, de prendre en compte dans l'objectif une marge de sécurité, au-delà du budget dont on a strictement besoin, et de penser à la commission que prélèvera le site sur le montant levé. Par exemple, Kickstarter perçoit 5% du montant, mais rappelle aussi aux porteurs de projets que "les frais de traitement des cartes bancaires des contributeurs (environ 3 à 5 %) sont également prélevés". Ensuite, il faut tenir compte, en fonction de la situation fiscale du pays, de la somme qui sera prélevée par les impôts...

  1. Faire une campagne trop longue

Tant les coachs en crowdfunding que les plateformes sont unanimes : faire durer sa campagne n'assure pas le succès, bien au contraire. Indiegogo conseille de la fixer entre 30 et 45 jours, "assez longtemps pour se faire connaitre, mais pas assez longtemps pour perdre la dynamique". Du côté de Kickstarter, le bilan est encore plus radical : "Statistiquement, les campagnes de 30 jours ou moins présentent les meilleurs taux de réussite".

  1. Commencer et finir sa campagne pendant le week-end

"D'après nos statistiques basées sur plus de 400 000 projets, les campagnes devraient débuter au début de la semaine, lundi ou mardi, et surtout pas le week-end, pour augmenter leur chance de succès", assure la directrice Europe d'Indiegogo. De même, terminer l'appel aux contributeurs pendant un jour de la semaine est plus stratégique que pendant un week-end.

Eviter Noël et le début de l'été

Indiegogo observe peu de différences selon les mois de l'année, mais déconseille de lancer sa campagne trop près de Noël… Et de Thanksgiving, pour ceux qui souhaitent rencontrer le succès auprès des internautes américains. En Europe, il vaut mieux éviter le milieu de l'été, puisque la majorité des potentiels contributeurs sont en vacances.  

  1. Ne pas faire de FAQ

Bien des projets de financement participatif ont déçu leurs soutiens : arnaques, retards, produits de mauvaise qualité… Les contributeurs ont donc besoin d'être rassurés. La présence d'une FAQ claire et détaillée peut déterminer le succès d'une campagne. L'équipe doit prouver que le projet est bien ficelé et très organisé.

Parmi les questions utiles à aborder : détailler ce qui sera mis en œuvre au cas où l'objectif est dépassé, en distinguant plusieurs paliers ; décrire ses expériences passées pour rassurer sur son sérieux ; déterminer sa capacité de production et de livraison… "Indiquez la chronologie de votre projet et de l'envoi de vos récompenses", souligne Kickstarter. Avant de conseiller : "Communiquez de façon honnête sur les points qui posent encore problème et ce qui vous restent à régler". De manière générale, plus le projet est détaillé et clair, plus il a de chances de convaincre.

  1. Ne pas offrir de récompenses… Ou offrir des récompenses au-dessus de ses moyens !

Pour les campagnes de prêt ou d'equity, la question ne se pose pas. Mais sur les plateformes de dons, comme Kickstarter, Indiegogo ou Ulule, lorsqu'il ne s'agit pas de précommande, un porteur de projet peut être tenté de ne proposer aucune récompense. Grave erreur. Sur Indiegogo, les campagnes offrant des récompenses lève 143% plus d'argent que celles qui n'en offrent pas. Mais attention à ne pas proposer de récompenses avant d'en avoir étudié avec minutie la faisabilité, les possibilités de production et de livraison. Surtout, il faut prévoir toutes les possibilités, dont celle d'une explosion de la demande… Pour être prêt à y faire face.

Contribution la plus courante : 23 à 25 euros

"Essayez d'offrir des récompenses simples", conseille la directrice Europe d'Indiegogo. Sur Indiegogo, la contribution la plus courante est de 25 euros. Elle s'élève à 23 euros sur Kickstarter. Les options doivent être multiples, sans toutefois être trop nombreuses, pour ne pas perdre les potentiels contributeurs : un exemplaire du produit, une édition limitée, une collaboration, une expérience, un souvenir... Environ 70% des campagnes réussies sur Indiegogo proposent entre 5 et 7 récompenses différentes. Il est devenu courant d'ajouter des récompenses spéciales en cours de campagnes, pour conserver la dynamique : éditions limitées, avantages spéciaux…

Enfin, ne pas oublier de vérifier si la plateforme de crowdfunding interdit certaines récompenses… Kickstarter, par exemple, prohibe les concours, coupons ou bons, jeux d'argent et tombolas, les aliments et boissons énergisantes, les projets médicaux, les services financiers, les projets politiques, les armes, les stupéfiants…

  1. Ne faire de la promotion que sur les réseaux sociaux

Les emails sont le moyen le plus efficace de promouvoir une campagne de financement participatif, notamment parce que la plupart des projets sont principalement financés par la famille, les amis et les cercles proches des équipes. Sur Indiegogo, le taux de conversion des emails de promotion atteint 34%, plus que tous les autres moyens de communication. D'où l'importance de réunir une liste de contacts potentiellement intéressés avant même le début de la campagne.

"Attention à ne pas inonder les gens avec des e-mails en masse et de messages de groupe, mais assurez-vous de tenir votre public informé de l'évolution de votre campagne, rappelle Kickstarter. Tout est question d'équilibre." Avant de conseiller : "Pensez à créer des groupes de personnes à contacter de taille réduite afin d'adapter vos messages à chaque public. Proposez une description courte de votre projet et mettez en avant certaines récompenses. Soyez concis et n'oubliez pas d'inclure un lien vers votre page du projet !"

Les réseaux sociaux à l'origine de 20% des montants levés

Les réseaux sociaux sont bien sûr importants : sur Indiegogo, les fonds provenant de ce biais représentent en général 20% de la somme levée. Kickstarter conseille également de viser les communautés étendues en lien avec son projet… Voire d'organiser une petite fête pour mobiliser ses soutiens les plus proches.

10. Ne pas faire de mises à jour pendant la campagne

Conserver la dynamique pendant la campagne est l'un des facteurs primordiaux de réussite. De nombreuses plateformes mettent en avant les projets "trending", ceux qui attirent le plus de commentaires et de visiteurs et qui enregistrent le plus d'activité sur leur page. Rien de mieux pour se faire repérer que de publier régulièrement des actualités pour informer les contributeurs des étapes de financement franchies ou de l'avancement du projet : photos de l'équipe en plein travail, annonce sur un nouveau partenaire…

"Peu après le lancement d'un projet, le créateur commence à recevoir un flux de questions et de commentaires de contributeurs potentiels. Consultez vos messages. Répondez à chaque point soulevé. Si vous remarquez que certaines questions reviennent plus souvent que d'autres, ajoutez-les à votre FAQ", conseille Kickstarter.